Kaamelott: le roi Arthur fait-il encore légende ?

Une facilitation de paix n’est pas un chemin de velours, c’est une voie semée d’embûches et de chausse-trappes. Mais de quelle paix parle-t-on réellement ? Celle du royaume de Logres menée de façon autoritaire par Lancelot du Lac, ou celle du roi Arthur qui semble toujours traîner son trouble dépressif récurrent ? Seule certitude: entre ses vacances amoureuses, le souvenir de sa formation à Rome et la guerre fratricide qu’il livre à Sire Lancelot, Arthur Pendragon délaisse toujours la quête du Graal.

Avant sa sortie le 21 juillet, le premier volet de la trilogie Kaamelott s’élève au rang de pellicule phare de l’été. Près de dix ans après la dernière saison parue sur petit écran, le roi Arthur – qui n’est de fait plus roi – revient littéralement pour tout casser. Et c’est ce qu’il fait, presque au sens propre. C’est peut-être parce qu’il était si attendu que le film ressort si bien sur grand écran; passionnant, il laisse imaginer le vaste monde que renferme l’histoire d’Arthur Pendragon et de Lancelot du Lac. Kaamelott, fort de ses deux doubles lettres, est fondé sur des légendes de parchemin auxquelles Alexandre Astier a finement réussi à lui prêter un menu caractère de fable. Et ça fonctionne plutôt bien.

Dans ce premier volet, tous les personnages de la série ont évolué, la plupart de façon spectaculaire. On retrouve les acteurs d’un temps – Christian Clavier, François Rollin, Antoine de Caunes – dans leurs rôles, mais sous une voilure complètement différente. Même le Duc d’Aquitaine – Alain Chabat – se métamorphose; il fait parler son intelligence toute personnelle avant de complètement disparaître du volet. Tous sonnent le glas d’un temps révolu, celui du format court, et dessinent le contour du renouveau. Comme par le fait que le peuple saxon a désormais un visage de proue, par l’intermédiaire de l’instigateur Horda, interprété par pas moins anglosaxon que Sting. Les alliances sont nouvelles, polymorphes et deviennent particulièrement instables. C’était probablement attendu, mais résolument habile au service de la puissance comique.

Une attaque burgonde

Dans ce vaste monde retrouvé, Guillaume Briat, brillant interprète du roi Burgonde, est sans doute l’homme qui marque le plus, par-delà même les apparitions des filles et fils d’Alexandre Astier dans le film. Le personnage était pourtant d’un rôle secondaire, bien que présent dans la plupart des Livres de la série. Mais sous la plume d’un bon scénariste, il a grandi. Il a gagné en couleurs, en profondeur et surtout en sensibilité. C’est probablement par lui que transite toute la simplicité contenue dans l’écriture du film, telle une figure totem reconnaissable parmi mille, qui focalise l’attention et évite de la disperser.

Alexandre Astier s’entoure toujours de personnes qu’il connait parfaitement bien. Or, Guillaume Briat n’en faisait pas tout-à-fait partie au début. Choisi sur audition, il a progressivement su habiller le personnage du roi Burgonde, à tel point de le rendre presque incontournable. « J’ai passé un casting un peu étrange parce que le Roi Burgonde est un peu étrange, expliquait-t-il dans une interview à Eklecty-City.fr Mais c’était une sorte de figuration, intelligente comme on dit dans le métier. » Des années d’immersion plus tard dans un personnage aux caractères plus atypiques qu’inédits, l’acteur de 54 ans est toujours là. Sans compter qu’à chaque fois qu’Astier produit un film (qu’il soit d’animation ou de légende), Briat n’est jamais bien loin.

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Faut-il encore écouter la bande originale du film sur vinyle pour comprendre l’importance que revêt le peuple Burgonde dans ce premier opus. Pas moins de quatre titres lui sont consacrés et ils ouvrent des champs d’imagination monstres dans lesquels il n’est pas inutile de plonger avant de se fondre dans les salles obscures.

La Mor le Roy Artu

Le narratif est intelligent; faisant fi de tout équilibre, Astier semble avoir mis son protagoniste face à de nouvelles menaces et aux côtés d’alliés toujours plus imprévisibles. Kaamelott est ainsi devenu une plaque mouvante où l’autorité est volatile, aux rapports de force turbulents. Mais tout n’est pas pour autant volatile. Certains mécanismes dans l’écriture du film concordent avec ceux présents, il y a dix ans déjà, dans la série. En cela, les codes de base du parfait film d’aventure ont parfaitement été respectés.

Arthur Pendragon recommence un quête à zéro; il voyage, tergiverse et retrouve peu à peu la stature de héros qui l’anime. Et comme pour toute quête digne d’un chevalier de la Table ronde, le moment où il constitue son équipe est un moment légendaire. Voilà donc ce que l’on retrouve dans ce premier volet. Cela dit, on ne sait pas vraiment si c’est la fragilité qui se cache derrière la force ou le mystique derrière la puissance qui donne au personnage un cachet prodigieux. Car même quand il n’est plus roi, Arthur reste un personnage de grandeur. À tout instant. Et cela ne pouvait en aucun cas changer, pas même en dix ans.

Ce qui est également certain, c’est qu’Alexandre Astier se complaît à écrire des personnages qui n’en font toujours qu’à leur tête; le comique dans l’entêtement et le mystère constant de savoir où cela va mener dans l’histoire. Dans un autre registre, d’ailleurs, l’on ne sait jamais si Arthur ressort vainqueur ou perdant de ses combats intérieurs, si ses convictions sont réellement profondes ou s’il est habité d’un destin trop lourd à endosser. Sa dépression chronique le pousse à marcher sur la pointe des pieds au bord des ravins de la mort. Mais par quelles forces de la nature parvient-il à ne jamais tomber au fond ?

L’épaule de Shedda

Reste encore un détail dans l’histoire: comprenez bien que la vraie intrigue, au final, ne sera plus de savoir si Arthur va réellement redevenir roi ou s’il trouvera réellement le Graal au terme de la trilogie mais, au contraire, elle sera de connaître l’issue de la relation fratricide entre Lancelot du Lac et l’Élu des Dieux.

Et plus qu’autre chose, la trame réside dans une histoire d’amour complexe. Entre Guenièvre et Shedda subsiste une partie de la réponse aux intrigues. Mais qui est Shedda ? À découvrir le 21 juillet dans les salles.

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