Les Crimes de Grindelwald, le nouvel opus de la saga des “Animaux Fantastiques” rend une touche de nostalgie

“Fantastic Beasts: The Crimes of Grindelwald”, le deuxième opus des “Animaux Fantastiques” de J.K.Rowling et adapté à nouveau par David Yates sort ce mercredi 14 novembre au cinéma. [David Yates/2018]

Le nouvel opus de la saga des “Animaux Fantastiques” sort ce mercredi dans les salles suisses. Intitulé “Les Crimes de Grindelwald”, la nouvelle adaptation cinématographique de David Yates des écrits de J.K. Rowling plaît véritablement. De l’incarnation envoûtée de Gellert Grindelwald par Johnny Depp à la toute première apparition de Jude Law sous les traits du professeur Albus Dumbledore, le film a su prendre de sérieux risques dans sa mise en perspective du monde élargi de la sorcellerie ante-Harry Potter. Admirable, même si l’on attendait plus de la réapparition de Dumbledore à l’écran.

Avec la sortie du nouvel opus de la saga des “Animaux Fantastiques” – dans l’adaptation toujours aussi fidèle des écrits de J.K. Rowling –, David Yates ne manque pas de rendre au spectateur attentif les symboles et le décor (fantastiques autant que nostalgiques) qui ont fait la réputation des huit films de la saga “Harry Potter”. On a eu beau remonter dans le temps, dans les New York et Paris de 1927 que tous les emblèmes et les insignes des derniers ”Reliques de la Mort” ont déjà repris forme, dans un contexte d’effets spéciaux qui n’ont, une fois de plus, déçu personne. La reconnaissable baguette de Sureau dans les mains de Gellert Grindelwald (Johnny Depp) – qui en devient la figure principale du récit, par rapport au premier numéro sorti en 2016 – et le fameux décor de Poudlard que l’on redécouvre dans ses plus fins traits, inchangé depuis le souvenir des aventures de Harry, Ron et Hermione traduisent définitivement cette nouvelle œuvre cinématographique dans la lignée intelligente et ingénieuse de la réalisation du natif de Merseyside (en Angleterre). L’histoire est celle-ci, l’on traverse à nouveau l’Atlantique dans le sens du retour; de New-York (où Grindelwald a été emprisonné) jusqu’en Europe où la véritable trame du récit prend réellement son ampleur. Au-delà de Londres, l’on découvre surtout aussi les chemins de traverse parisiens. Un détour, dans la réalisation, qui était bien censé nous dépayser, nous rappeler que le cadre scénographique n’est pas resté inerte depuis le final des aventures de Potter. Et pourtant, en cela même, le style de représentation n’a pas beaucoup surpris, en ce que la capitale française des années d’après-guerre a beaucoup eu trait du décor habituel des sous-terrains magiques londoniens. L’on comprend dès lors que l’innovation n’est donc pas dans l’idéalisation du cadre et de l’entourage qui entoure le monde magique idéé par l’écrivaine et scénariste britannique; si David Yates assumait que le premier volet de la nouvelle saga s’imprégnait d’une histoire complètement nouvelle hors des repères de l’école de sorcellerie de Poudlard, force est de constater que ce second volet revient presque (et avec une insistance toutefois bien dissimulée) aux grands fondamentaux et en cela, c’est bien l’adaptation filmique de Yates qui en prend la propre initiative.

En revanche, dans le choix des images, le réalisateur s’est maintes fois prêté à la caméra subjective, la substituant au point de vue de plusieurs personnages tout au long des 134 minutes de film. Et cela commence très tôt, d’abord lors de la scène d’évasion de Gellert Grindelwald à New York (où la caméra se substitue constamment au point de vue des forces de l’ordre), puis surtout lors d’une introduction parfaitement (et volontairement) ambigüe mettant en scène Norbert Dragonneau (Eddie Redmayne) et son frère Theseus (Callum Turner) au Ministère britannique de la Magie, reconnaissable de par les briques anthracites de ses couloirs. Jouant du point de vue de ses acteurs ainsi – technique utilisée avec majeure parcimonie tout au long des quatre derniers opus de la saga Harry Potter –, David Yates cherche d’autant plus à impliquer le spectateur dans les moments forts de l’action, quitte à décontenancer davantage l’audience. Et d’autre part, cela permet également de prendre plus de distance avec le personnage – très central – de Grindelwald.

Une figure éprouvée d’Albus Dumbledore (en accord avec les volontés de David Yates)

Les dessous du monde de Harry Potter réservent certes une mise en abîme plus complexifiée des relations et des histoires de chaque personnages ou intervenant dans l’heptalogie du sorcier à la cicatrice. C’est à cet instant que l’on découvre les origines et la personnification d’un manitou que l’on n’aurait jamais imaginé être humain: Nagini (Claudia Kim). Sous un visage d’ange, un peu blanchâtre et aux provenances asiatiques – qui n’est apparue sous nulle autre forme que sous celle d’un crotale mangemort autrefois auprès de Lord Voldemort –, est présentée dans ce nouvel opus à l’image d’une femme protectrice et presque timide (auprès de Croyance Bellebosse, interprété par Ezra Miller) mais condamnée par le temps à vivre sous la forme d’un serpent maléfique. Encore une fois, c’est ici que l’on attendait de la part de la réalisation filmique une once d’innovation. Et celle-ci est assurément réussie à l’image également du personnage de Nicolas Flamel (Brontis Jodorowski) – un alchimiste de plus de 600 ans et créateur de la pierre philosophale –, qui apparaît pour la toute première fois à l’écran après que son nom ait longuement été mentionné dans le tout premier tome des histoire de Harry Potter, “à l’école des sorciers” (2001). Les deux figures, qui rappellent intensément et infiniment que l’histoire de Grindelwald explore les plus larges profondeurs inexplorées de la mise en scène du monde magique tel qu’imaginé par Rowling (le “Wizarding World”), tirent en eux l’image qu’on leur prêtait volontiers dans le récit; un serpent qui s’adjuge sa pleine part d’humanisme et d’humanité et un scientifique très âgé encore capable d’exercer un pouvoir en faveur du “bien”. Et c’est ici que réside la véritable part d’intérêt du film. Bien que les personnages de Norbert Dragonneau, Porpentina Goldstein (Katerina Waterston) et Jakob Kowalski (Dan Fogler) nous apparaissent tels les défendeurs premiers du monde des sorciers – entendant bien que Kowalski soit un non-Maj’, un moldu, ce qui constitue une énorme innovation dans le scénario imaginé par l’écrivaine britannique –, c’est bien sur la présence de l’ensemble des personnages secondaires, au-delà du protagoniste évident Gellert Grindelwald, que l’on porte tout naturellement notre attention. Le spectateur ne part plus de l’inconnu; c’est pourquoi les noms de Nagini, Nicolas Flamel, Minerva Mcgonnagall et surtout celui d’Albus Dumbledore font facilement réagir. Et à ce sujet – petite réserve de la rédaction –, le tant attendu personnage de Dumbledore (Jude Law) manque un quelque chose évident de prestant.

“Dumbledore apparaît à l’écran tel un homme éprouvé, sans véritable pouvoir mais qui semble surtout garder le trait de caractère qui a toujours été le sien: sa méfiance envers l’Ordre et le Ministère de la Magie”

Dumbledore est jeune, cheveux courts. Et surtout, il n’est pas encore le directeur de la prestigieuse école de Poudlard. Il y enseigne plutôt la défense contre les forces du mal – et non pas la transfiguration comme on aurait pu s’y attendre –, un rôle qu’on lui a reconnu plus tôt sous le trait du Professeur Lupin dans le troisième film de la saga Harry Potter “et le Prisonnier d’Azkaban” (2004). Ceci dit, le jeu de Jude Law est admirable, d’autant plus qu’il connaît parfaitement le rôle qui a été autrefois celui de Richard Harris (“Harry Potter et la Chambre des Secrets”, 2002) puis surtout de Michael Gambon. Mais il s’en est assuré (sur les conseils de David Yates) de ne pas en recopier le trait. C’est un peu dommage car le spectateur se serait davantage reconnu dans le portrait d’un Albus Dumbledore aux cheveux tout aussi blanchissants (ou grisonnants) qu’avant. D’autant plus que le “jeune Dumbledore” n’a pas la prestance qu’on lui attribuait dans sa vieillesse et juste avant sa mort dans “Le Prince de Sang-Mêlé” (2009). Il vit dans un regret évident, qu’il avoue même à Leta Lestrange (Zoë Kravitz) dans le courant du film. Plus qu’un mage surpuissant – dont Grindelwald lui-même lui en assure la stature –, Dumbledore apparaît à l’écran tel un homme éprouvé, sans véritable pouvoir mais qui semble surtout garder le trait de caractère qui a toujours été le sien: sa méfiance envers l’Ordre et le Ministère de la Magie. Et c’est tout naturellement, qu’il compte sur le jeune Norbert Dragonneau pour accomplir le devoir qu’il se réserve d’exécuter par lui-même: combattre Gellert Grindelwald.