Une pierre qui roule : Queens of the Stone Age

Les Queens of the Stone Age dissimulés derrière un velours de lumière. Tamisé ? non effréné plutôt ! © leMultimedia.info / Oreste Di Cristino

Point d’orgue de cette soirée dominicale, Josh Homme et ses compagnons ont fait mordre la poussière au Stravinski. Les Queens of the Stone Age ont rempli les attentes d’une des plus grosses soirées du festival : show généreusement rodé, jeux de lumières époustouflants et maestria à la hauteur du groupe californien. Seule ombre au tableau : une acoustique qui semble s’être calquée sur les open airs estivaux, oubliant les qualités inhérentes de l’Auditorium.

Peu avant vingt-deux heures, l’atmosphère est lourde. Dans l’attente du concert, un couple commente : « Tu les as déjà vu en concert ? Il paraît que c’est extraordinaire. En tout cas, je te fais confiance… On verra bien ». Grandes attentes, petite marge d’erreur. C’est que depuis plus de vingt ans les pourfendeurs du stoner ont quitté le sable et les cactus pour sillonner les routes goudronnées de contrées éloignées. Créés sous l’impulsion de Josh Homme au terme de la magnifique odyssée Kyuss avec John Garcia et Brant Bjork, les Queens se sont imposés comme l’une des – si ce n’est la plus – grande machine du rock californien contemporaine. Moins bourdonnant et écrasant que sa précédente formation, le grand rouquin et son immuable chemise à carreaux a su insuffler aux reines de la pierre un son plus aérien, plus rapide et des tonalités pop, sans pour autant renoncer à sa fougue. Dans sa course, il emmène avec lui Nick Oliveri, évincé quelques années plus tard suite à ses problèmes d’addiction. Ce dernier marquera de son (gros) grain de folie punkien l’album Rated R (2000). Point culminant des Queens, l’album Song for the Deaf, deux ans après, permettra au groupe d’acquérir définitivement sa renommée. Ce masterpiece tient évidemment des éléments satellitaires ayant participé à l’album : Mark Lanagan et sa voix rocailleuse, le retour de Dave Grohl (Nirvana) ou encore les faux jingles radiophoniques orchestrés par Twiggy Ramirez (Marilin Manson). Road trip à la Kerouac, les titres sont indissociables de leur ensemble. Traversée du désert, dunes arides, soif inassouvie, descende abrupte : « Sky is Falling ». On se plaît à se perdre dans cette étendue désertique hallucinée, marquant de sa fourche l’histoire du rock.

Une machinerie bien orchestrée

Lancé sur les chapeaux de roues avec la BO d’Orange mécanique, clin d’œil à leur album Like Clockwork (2013), les Reines sont à la hauteur de leur stature : Les écrans géants du Stravinski resteront tristement éteints et les photographes – méfiance depuis l’incident impliquant Homme et une photographe en 2017 ? – sont priés de rester à bonne distance de la scène. Il fallait être dans les premiers rangs pour scruter les faits et gestes du groupe. Pour le reste, le spectacle est grandiose : mention spéciale à Jon Theodore, livrant un puissant solo de batterie. La sobriété de la scène, agrémentée de tubes de néon, contraste avec les artifices visuels. Les incessantes inclinaisons des spots – émerveillant sur « No One Knows » – nous rendent victime de vertiges et dépassent la vitesse des riffs de Troy Van Leeuwen. Le magicien ayant conçu ce ballet d’étoiles filantes mériterait une distinction pour son œuvre. La crise d’épilepsie évitée, fort est de constater que lors de l’interprétation des titres du dernier album en date Vilains (2017), le Stravinski, tout comme une partie de la critique, semble d’avantage dissipé alors qu’il reste déchaîné sur le reste du set. De ce show à l’américaine, on retiendra une grande maîtrise, aussi bien technique qu’artistique, alors que tout semble être hors de contrôle et décentré. QOTSA vaut la peine d’être vécu en live. Tout aurait été parfait, sans un son complètement mâchouillé, gloubi-boulga uniforme et sans relief. Certainement la faute aux périodes des festivals en plein air. Dommage pour les quelques 3’500 personnes présentes au Stravinski.