Laurent Meuwly: « De plus en plus, la spécificité est de commencer tôt dans la saison avec des grandes compétitions »

Laurent Meuwly concède; les Suisses ne sont pas habitués à reprendre leur saison si tôt, dès le début du mois de mai. Mais c'est aussi la marque de leur évolution parmi les meilleurs mondiaux. © leMultimedia.info / Oreste Di Cristino

Un constat est certain; les Suisses entrent de plus en plus tôt dans leur saison, au début du mois de mai. Si cela a été le cas notamment pour Mujinga Kambundji, cela s’est aussi révélé pour de nombreux autres athlètes helvétiques, alignés chacun dans un des six premiers meetings de Diamond League, à Doha, Shanghai, Eugene, Rome, Oslo et Stockholm. Deux athlètes de la Team Meuwly ont par ailleurs connu un début de saison à destins croisés; Kariem Hussein a connu un début tourmenté en Qatar (8e), alors que Lea Sprunger a manqué ses débuts en capitale italienne (8e) avant de se reprendre en Norvège (4e). Tous négocient des enjeux importants en ce début de saison déjà bien entamé; nous en avons parlé avec Laurent Meuwly à 48 heures de la première édition du meeting CITIUS à Berne (samedi 20h30).

Gardons un premier mot sur Kariem Hussein qui a connu quelques difficultés à entrer dans sa saison à Doha (Qatar). Est-il apte à reprendre la compétition prochainement (sans doute au meeting de la Diamond League à Paris le 30 juin prochain) ?

Il a toujours des difficultés physiques. Tout s’est bien passé jusqu’en janvier et il a ensuite eu une petite blessure musculaire qui, en soi, n’était pas grave mais qui a créé des déséquilibres à la reprise des entraînements. Il a un nerf irrité depuis et c’est justement ce qui l’empêche actuellement de s’entraîner normalement et donc de refaire des compétitions.

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Les Suisses ont-il de manière générale quelques difficultés à reprendre la compétition, d’autant plus quand les premiers départs sont effectués début mai ?

Ce n’est pas dans notre culture. Il y a quelques années, l’on ne voyait pas beaucoup de Suisses en Diamond League et maintenant, il y en a. Et suivant la discipline, cela peut être plus difficile d’entrer dans la saison car de nombreux Suisses étaient habitués à entrer dans de petits meetings en Suisse dans des conditions qu’ils connaissaient parfaitement, auprès de stades sur lesquels ils avaient déjà couru, sans avoir besoin de voyager. Il entraient donc progressivement dans la saison et étaient prêts au moment d’aborder les plus grandes échéances. Maintenant, en revanche, avec les invitations que ceux-ci reçoivent en Diamond League, il faut être prêts à répondre présents début mai. Cela constitue des situations nouvelles auxquelles il faudra prendre le temps de s’habituer. Ce n’est qu’en le faisant que l’on en prend l’habitude.

En 2018, nous avons vu beaucoup de Suisses commencer très tôt leur saison. Il était important de se remettre dans le bain plus tôt cette année, marquée par les Championnats d’Europe de Berlin (7 au 12 août) ?

Pas nécessairement, on débute toujours vers la mi-mai, même si la saison prochaine sera un peu spéciale parce que les championnats du monde à Doha auront lieu en octobre. C’est un peu le grand championnat qui dicte la planification de la saison et cela dépend aussi de la participation ou non de l’athlète à la saison en salle. Puis, si l’on veut véritablement s’aligner en Diamond League, nous devons nous adapter au calendrier de l’IAAF. Mais par rapport à des athlètes sud-africains, australiens, parfois américains, qui courent pratiquement toute l’année, en Suisse, nous avons encore la chance de pouvoir planifier les périodes dans lesquelles l’on s’attend à être en forme et d’autres moins. Mais il est donné maintenant, de plus en plus, que la spécificité est de commencer tôt avec des grandes compétitions. Il arrivait que pour certains de nos athlètes, Athletissima soit parmi les premières courses de la saison, alors que cette année, ce sera déjà la mi-saison pour nous.

« Comme [Lea Sprunger] a fait une grande saison en salle, nous avons pris le temps de nous reposer, de nous régénérer et de travailler. Nous sommes plutôt en retard au niveau du planning par rapport à l’année passée mais tout se passe comme prévu »

Laurent Meuwly, entraîneur de Lea Sprunger

Lea Sprunger, depuis une année, donne l’impression d’avoir retrouvé un nouveau souffle sur ses 400 mètres haies. Après une fin d’année 2017 et un début d’année 2018 très réussis – malgré une disqualification aux Mondiaux en salle de Birmingham –, pouvons-nous nous attendre à ce qu’elle revienne en forme pour les Européens de cet été ?

L’entraînement est bien évidemment orienté pour Berlin. Comme elle a fait une grande saison en salle [ndlr, quatre victoires en quatre course à Karlsruhe, Madrid, Torun et aux championnats suisses de Macolin et deux records nationaux sur 400 mètres plat et 200 mètres], nous avons pris le temps de nous reposer, de nous régénérer et de travailler. Nous sommes plutôt en retard au niveau du planning par rapport à l’année passée mais tout se passe comme prévu, étape après étape. Elle a fait une très bonne course à Oslo [ndlr, 4e en 55”07], elle aurait pu faire une bonne course à Genève si elle n’avait pas eu un petit souci sur la dernière haie [ndlr, temps en 55”60] donc je pense que ce relai [4×400 mètres] ici à Berne – où la pression est diluée sur quatre athlètes – et les 400 mètres plat qu’elle courra à La Chaux-de-Fonds lui feront du bien avant de retrouver Athletissima le 5 juillet. Ce programme sera idéal pour aborder les échéances de juillet et août de la meilleure des manières.

S’illustrer dans un relai et sur les 400 mètres plat est une étape importante de la préparation pour une coureuse sur haies ?

L’année passée, Lea était la meilleure Européenne sur 400 mètres plat et cet hiver, elle a gagné le World [Indoor] Tour sur 400m plat aussi. C’est dire si la discipline est loin d’être accessoire pour elle; c’est une discipline sur laquelle, elle peut performer parmi les meilleures. Ce week-end, c’est surtout la course en équipe qui lui change un peu de son habitude d’être jugée constamment sur ses propres performances en individuel. Ici, la pression sera moindre, elle donnera son meilleur pour l’équipe, tout en ayant des informations importantes sur son propre temps, afin de préparer la suite. Cette course vient à un moment idéal dans la saison.