L’objectif fixé pour cet été est clair; Swiss Athletics s’attend (au moins) à faire aussi bien aux Championnats d’Europe de Berlin que lors de la dernière édition d’Amsterdam en 2016. Autrement dit, la Fédération suisse d’athlétisme s’augurerait, du 7 au 12 août prochain, de retrouver une large délégation helvétique (de 50 athlètes ?) souriante et portant dans ses valises, pas moins de cinq médailles. C’est bien le résultat historique que cette même sélection avait été capable de retourner depuis les Pays-Bas il y a deux ans. Et pour ce faire, Swiss Athletics peut compter sur de jeunes et frais talents, directement issus – pour certains – des compétitions juniors. En conférence de presse printanière à Zofingue, la Fédération a établi clairement ses attentes pour la présente saison, en compagnie du sprinteur Alex Wilson (100m, 200m et 4x100m), Géraldine Ruckstuhl (heptathlon) et Martina Strähl (coureuse de fond). Retour en détails.
Lire (bientôt) également: Alex Wilson: « Maintenant, une finale ne me suffit plus; je veux une médaille! »
« Nous espérons que cette année sera aussi riche d’exploits que la saison passée », entonne Beat Freihofer, mercredi en début d’après-midi à l’Hôtel de Ville de Zofingue. Le responsable de presse de Swiss Athletics ouvre allègrement la conférence de presse annuelle de la fédération. Aussi car, faut-il admettre, la Suisse a franchi un pas en athlétisme tout au long de l’année 2017, mais aussi lors de la saison en salle de cet hiver, marquée par l’apogée des championnats du monde de Birmingham, où plusieurs Helvètes ont tenu haut leur rang dans la hiérarchie mondiale de leur discipline. Parmi ceux-ci, figure avant tout Mujinga Kambundji, médaillée de bronze aux 60 mètres derrière un duo masterclass ivoirien – une première pour le sprint féminin suisse. Les dirigeants de Swiss Athletics ont pourtant réaffirmé de grandes ambitions, tout en dessinant les contours d’une humilité qui est celle d’une petite nation – la Suisse – appelée à s’illustrer grandement sur la scène planétaire. Par ailleurs, le choix de la ville de Zofingue, en terre de réception, n’est pas anodin. Le syndic de la ville, Hans-Ruedi Hottiger l’a affirmé en guise de bienvenue ; « Zofingue est un écrin convivial qui vit par sa riche tradition, tout en étant portée sur le futur. » Il est vrai, la ville du canton d’Argovie présente une simplicité savante, terre d’accueil d’athlètes d’expérience et de jeunes en devenir. C’est par ailleurs ici, au Trinermatten, qu’auront lieu les championnats suisses les 13 et 14 juillet prochains. Une belle mise à l’épreuve à un mois des Européens de Berlin où une grande délégation suisse est prévue par la fédération nationale du 7 au 12 août ; 50 athlètes pour égaler la présence nombreuse des deux précédentes éditions à Amsterdam en 2016 et Zürich en 2014 ? Pourquoi pas ; les attentes sont élevées et le potentiel des athlètes nationaux également.
« Notre but est d’égaler le nombre très réjouissant de médailles récoltées à Amsterdam. Nous sommes toutefois conscients que c’est un but élevé »
Peter Haas, chef des performances sportives de Swiss Athletics
Les premiers signes sur la scène internationale ont été étudiés en Diamond League ; Mujinga Kambundji promet une saison intéressante avec ses 11”17 secondes sur les 100 mètres de Doha, et ses 22”72 sur le demi-tour de piste à Shanghai. Puis, Kariem Hussein s’est, lui aussi, illustré pour son premier meeting de la saison au Qatar. Et même s’il n’était pas au mieux aux 400 mètres haies, sa forme actuelle, après un camp d’entraînement à Potchefstroom (Afrique du Sud) avec la team de son entraîneur Laurent Meuwly, lui aura ouvert les voies vers une remise en forme certaine. À cela, si l’on ajoute la présence future de Selina Büchel au meeting d’Eugene (Oregon, USA) ce samedi soir et celles provisoires de Lea Sprunger et Fabienne Schlumpf à Oslo le 7 juin prochain, les starters suisses auront pleinement le temps et l’opportunité de tester leur forme sur les grands plateaux internationaux. « Le fait que jamais autant de Suisses ont trouvé des places de départ dans les Diamond League à l’étranger est un signe fort [en vue des Championnats d’Europe en capitale allemande] », précise le chef des performances sportives de Swiss Athletics Peter Haas. Il y a deux ans, la délégation suisse était revenue avec pas moins de cinq médailles historiques des Pays-Bas ; cette année, l’objectif est de faire (au moins)… aussi bien. « Notre but est d’égaler le nombre très réjouissant de médailles récoltées à Amsterdam. Nous sommes toutefois conscients que c’est un but élevé – consent encore Peter Haas avant de poursuivre – Pour que cela soit possible, nos têtes d’affiche doivent être en pleine santé et en pleine forme. Et ce n’est pas tout : nous devons avoir la chance – nécessaire – en compétition ; les deux quatrièmes places à Amsterdam [ndlr, Selina Büchel sur 800 mètres et Clélia Rard-Reuse sur 100 mètres haies, sans compter le relai suisse féminin du 4×100 mètres], nous ont montré que ça se jouait parfois à trois fois rien. » Néanmoins, au vue du riche contingent suisse et de ses très belles performances lors des derniers championnats du monde à Londres – marquée en grande partie par la 5e place de Lea Sprunger aux 400 mètres haies –, ainsi que les nombreuses très bonnes performances personnelles sur les longues distances – à l’image de Tadesse Abraham et surtout du jeune (classe 1996) Genevois Julien Wanders, détenteur du record d’Europe U23, établi au semi-marathon de Barcelone (1h09), et une très bonne 8e place (et meilleur Européen) aux mondiaux de semi-marathon de Valence du 24 mars –, l’exploit attendu s’annonce possible.
10 marathoniens déjà qualifiés, 33 ont déjà atteint les minimas
Dix marathoniens s’apprêtent déjà à disputer les Européens à Berlin au mois d’août prochain, parmi lesquels figurent logiquement Tadesse Abraham – qui partira pour un long stage de préparation en Éthiopie – chez les hommes, la Veveysanne Laura Hrebec – malgré qu’elle n’ait pas réussi à descendre au-dessous du temps de référence de 2h40’00 (record personnel à 2h40’28 au marathon de Lausanne en octobre dernier) – et Martina Strähl chez les femmes. Maude Mathys n’est quant à elle pas encore qualifiée malgré ses 2h31’17 pour le troisième marathon (seulement!) de sa carrière à Zürich. La Blonaysanne figure néanmoins parmi les 33 athlètes qui ont réussi à atteindre les minimas pour Berlin et qui nourrissent de très bonnes chances d’être sélectionnés pour les Championnats d’Europe. De son côté, la marathonienne du LV Langenthal, présente en conférence de presse ce mercredi matin à Zofingue, se prépare déjà à l’échéance allemande. Il faut dire que la coureuse de fond de 31 ans tient la forme après sa victoire, il y a quatre jours, au Grand Prix de Berne (16,09km). Elle est ainsi devenue la première Suissesse à remporter la course depuis Franziska Rochat-Moser en 1998. Martina Strähl, actuelle numéro 2 européenne sur les 21km saura mener sa préparation de la meilleure des façons, en alternant notamment les courses entre la piste et la route. Dix mois après avoir dû renoncer aux championnats du monde de Londres en août 2017 à cause de douleurs au sacrum, elle s’apprête à défier la concurrence européenne sur le tracé berlinois. Un vaste défi pour la spécialiste des courses de montagne.
« Nous n’éprouvons aucune inquiétude pour nos deux relais 4×100 mètres, mais nous espérons pouvoir compter quatre relais à Berlin avec les 4x400m »
Peter Haas, chef des performances sportives de Swiss Athletics
Sur le versant piste, selon les responsables de Swiss Athletics, il y a une belle – et grande – chance de retrouver au moins trois relais suisses à Berlin. Le relai 4×100 mètres féminin – composé de Salomé Kora, Mujinga Kambundji, Ajla Del Ponte et Sarah Atcho – de l’entraîneur jurassien Raphaël Monachon, nommé en décembre dernier en remplacement de l’Allemand Ralph Mouchbahani, figure à la troisième place au classement européen des équipes nationales. Quant au relai 4x100m masculin, où figure notamment Alex Wilson, il est classé 11e; ce qui est prometteur en vue des prochaines échéances, où la Fédération espère au moins que ceux-ci figurent parmi les 16 meilleures formations continentales, condition sine qua non de sélection aux Européens. Puis, viennent les autres relais; les 4×400 mètres féminins et masculins sont plus lointains au classement, même si ce dernier a de bonnes chances de figurer également à Berlin. « Le meeting [CITIUS Bern] de Wankdorf devrait être – je l’espère – le juste endroit pour nos relais de prouver leur potentiel en vue du mois d’août », aiguillonne alors Peter Haas avec un optimisme non dissimulé: « Nous n’éprouvons aucune inquiétude pour nos deux relais 4×100 mètres, mais nous espérons pouvoir compter quatre relais à Berlin avec les 4x400m. Néanmoins, les chances sont grandes d’en voir au moins trois. » À noter qu’une première sélection provisoire de la part de Swiss Athletics est prévue au 18 juin, lors desquelles seront prises en comptes les performances qui respectent les minimas sur les deux dernières saisons, 2017 et 2018. La sélection finale, en revanche, sera opérée le 29 juillet. Le temps pour les Swiss Starters de prendre la mesure de leur début de saison, à peine débutée.
Des délégations renforcées aussi pour les Européens U18 de Györ et les Mondiaux U20 de Tampere
Au-delà des championnats élites de Berlin, le vaste programme de l’athlétisme suisse poursuit un objectif très précis également pour sa relève talentueuse, qui se doit de montrer une ambition certaine afin de parvenir au succès. En attendant, c’est la Fédération qui nourrit l’espoir de poursuivre la lancée qui est celle de sa jeunesse sportive. L’exercice 2017, faut-il dire, n’a de loin pas été mauvais; avec une moisson de cinq médailles aux championnats d’Europe U23 de Bydgoszcz (Pologne) et pas moins de quatre aux Européens de Grosseto (Italie). Cette année 2018, le parcours professionnel de ces jeunes talents poursuit une voie tout aussi éclairée avec les championnats d’Europe U18 de Györ et les mondiaux U20 de Tampere. À ces occasions, Swiss Athletics entend tout aussi se démarquer; environ 30 athlètes seront présentés en Hongrie du 5 au 8 juillet et une quinzaine (peut-être 20) en Finlande du 10 au 15 juillet; deux conséquentes délégations qui ont pour mission de porter l’athlétisme suisse à son plus haut niveau dans les prochaines années, voire la prochaine décennie. Les sélections par ailleurs sont quasiment complètes; 36 athlètes ont déjà assuré les minimas pour Györ (et 12 pour Tampere) – parmi lesquels figure la sœur cadette de Mujinga Kambundji, Ditaji (classe 2002), engagée à la fois aux 100 mètres et aux 100 mètres haies. Pour ces jeunes sportifs, l’Abendmeeting de Thoune le 20 juin prochain sera bien le théâtre des prochains affrontements; où les sélections seront vraisemblablement jugées en base aux résultats produits. Une sorte de trials à l’américaine où la participation est rendue – à tout titre – obligatoire. Les sélections finales seront ensuite dévoilées le 25 juin. « Ils se retrouvent [tous] dans un contexte inhabituel et doivent réussir leur meilleure performance le jour J », commente alors Peter Haas. Une belle mis en compétition en vue de ces Européens, lesquels seront aussi considérés comme principaux jeux de qualification en vue des Jeux Olympiques de la Jeunesse de Buenos Aires du 6 au 18 octobre 2018. À ce propos, le responsable des performances Peter Haas espère compter entre trois et cinq athlètes engagés en Argentine; là aussi, une délégation suisse portée vers l’exceptionnel.
« Pour nos jeunes talents, ces compétitions sont importantes pour engranger de l’expérience au niveau international »
Peter Haas, chef des performances sportives de Swiss Athletics
« Notre plus grand but est de d’assurer un avenir durable de l’athlétisme suisse », avouait également ce mercredi matin à Zofingue le directeur de Swiss Athletics Peter Bohnenblust. Et l’avenir durable, passe bien évidemment par la présence nombreuse d’athlètes sur les principales scènes internationales. « Nous souhaitons promouvoir un plan de long terme qui englobe l’ensemble de nos athlètes, des catégories élites aux juniors, U23, U20 et U18. Pour nos jeunes talents, ces compétitions [ndlr, championnats d’Europe et du monde] sont importantes pour engranger de l’expérience au niveau international », expliquait alors Peter Haas lors de la conférence de presse printanière de la Fédération nationale. C’est le cas notamment de Géraldine Ruckstuhl qui, après avoir brillé dans les sélections et compétitions juniors, se démarque aussi sur parmi les meilleures athlètes du monde. L’heptathlonienne de 19 ans s’insère désormais parmi les grandes; sa 11e place aux championnats du monde de Londres en août dernier témoigne de son potentiel fort séduisant. À le penser ainsi, Géraldine personnalise par sa bravoure et son ambition certaine – tout comme la Biennoise Caroline Agnou – tout l’attrait de Swiss Athletics pour sa jeunesse montante. Médaillée d’argent aux Européens junior (M20) de Grosseto – avant de se distinguer en capitale anglaise auprès des meilleures mondiales à l’image de la Belge Nafissatou Thiam, sacrée championne du monde à 23 ans –, la native d’Altbüron dans le canton de Lucerne est aussi celle qui détient le record de Suisse de l’heptathlon (6’357 points), lequel reste, pour plus, encore à sa pleine portée ainsi qu’à celle d’Agnou. Géraldine Ruckstuhl est, pour ainsi dire, aussi une (ancienne) championne du monde du monde U18 de sa discipline; elle remporta en effet la médaille d’or aux mondiaux de la jeunesse à Cali en Colombie en 2015 avec un total déjà grandiose de 6’037 points. Un talent précoce que Swiss Athletics a su préserver, même au travers de la blessure de la jeune fille à l’abdomen dans le courant du mois de mars 2016. La voilà désormais prête à relever la barre des grandes compétitions qui lui constituent les échéances de cette prochaine année.
« Nous serions heureux que les performances de l’année passée puissent être réitérées, notamment à Götzis, qui est l’un des grands rendez-vous internationaux de la saison »
Peter Haas, chef des performances sportives de Swiss Athletics
Sa saison va donc débuter au Combined Events Challenge de Götzis en Autriche, où, à nouveau, la jeune Lucernoise se mesurera à l’élite mondiale, à l’instar de la Cubaine Yorgelis Rodríguez (23 ans) et médaillée de bronze aux derniers championnats du monde indoor de Birmingham en mars dernier. Une concurrence prête à la mettre en selle à quelques trois mois du point d’orgue continental; aussi, nommée Youngster de l’année en athlétisme, la jeune femme de 19 ans s’attend à progresser au cours de la saison avec un objectif précis: « établir un nouveau record de Suisse (dans la mesure du possible). » Ce à quoi encourage volontiers Peter Haas: « Nous serions heureux que les performances de l’année passée puissent être réitérées, notamment à Götzis, qui est l’un des grands rendez-vous internationaux de la saison. »