« Retrouver la Super League n’était pas un objectif, mais un rêve! »

Un trophée aux rubans rouges et noirs s'élève vers le ciel au Stade de la Maladière. Neuchâtel Xamax FCS est champion de Challenge League 2018. © leMultimedia.info / Oreste Di Cristino

Après un dernier festival face au FC Wil à la Maladière (6-3), Neuchâtel Xamax FCS a fêté dignement sa promotion en Super League. La remise du trophée et les festivités qui suivirent sur l’esplanade du stade de la Maladière furent aussi réussies et fédératrices que l’ensemble d’une saison marquée par la maîtrise et la mesure d’un club qui aura réussi quatre promotions en six ans, de la deuxième ligue interrégionale à la Super League. Les hommes de Michel Decastel – qui comptent déjà deux renforts, le Servettien, ex-OL, William Le Pogam et le portier du FC Winterthur Matthias Minder – étudieront dès le 12 juin les affaires qui seront les leur dans l’élite à partir du mois de juillet.

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Gregory Binggeli a savouré la dernière en Challenge League. Une fête familiale, à l’image d’un club qui a su préserver le versant humain de son identité. Car c’est dans la simplicité que Neuchâtel Xamax FCS a retrouvé sa place au sein des dix meilleures équipes de Suisse. Et pourtant, le club est reparti de très loin. En 2012, la sanction est brutale, dramatique; Neuchâtel Xamax ne joue alors même pas le second tour de championnat que la relégation administrative est confirmée par la Swiss Football League. Un déchirement pour une communauté qui aura dû lutter haut et fort pour renaître tel le phœnix. Les objectifs étaient sérieux – dès la reprise en août 2012 – en deuxième ligue interrégionale; les rêves aussi. « Notre objectif était de réussir une promotion chaque année, pour atteindre la Challenge League. Il y a six ans, la Super League nous paraissait inatteignable avec le budget qui était le nôtre et sans mécène qui nous finance. Et pourtant, avec tout ce que nous avions accompli saison par saison, nous avons compris que tout était possible. Nous avions un public modeste mais fidèle et un stade fait pour la Super League. Cela nous a poussés à revoir nos objectifs. Mais la Super League est toujours restée un rêve », confirme Gregory Binggeli, vice-président du club et fils du Président Christian. Et puis, la nature et l’économie générale du club passe aussi par l’élégance et la sobriété de ses dirigeants. Un air de famille pour une communion familiale avec quelque 10’000 supporters massés allègrement dans les travées du stade de la Maladière pour la dernière face au FC Wil (victoire 6-3). « Nous allons essayé de garder cet esprit familial, au-delà bien sûr de la famille Binggeli qui est à la tête du club. Mais il faut dire qu’il existe des fraternités à tous les niveaux au sein du club; au sein du comité, au sein des joueurs. À Neuchâtel, tout le monde connaît au moins une personne qui est liée au club. Donc tout le monde se reconnaît en Xamax », confirme encore Greg, suivi dans ses propos par Geoffrey Tréand, médaille d’or au cou et cheveux teintés d’un rouge flamboyant: « Xamax est un ensemble de personnes, d’humains qui s’entendent bien et qui vit bien. Le groupe est très sain. Dans les divisions inférieures, interrégionales, le versant familial est évidemment plus marqué que dans le football professionnel. La grande force de Neuchâtel Xamax FCS est d’être parvenu à maintenir ce même esprit tout du long, tout en recrutant d’excellents joueurs qui se sont reconnus dans le projet qui était celui du club. »

« Je ne sais pas si l’on peut parler de rêve, tant la promotion était devenue évidente et un objectif plus qu’atteignable ! »

Geoffrey Tréand, numéro 17 xamaxien promu en Super League

« Nous avons eu le temps de préparer notre fête, de bien communiquer, de réserver des artistes et d’organiser les festivités sur l’esplanade. Nous avons vraiment pu profiter des moments qui sont les nôtres. » Gregory Binggeli baigne dans un bonheur inimaginé il y a encore peu. Ne prévoyant absolument pas un retour aussi prompt en Super League, le vice-président du club savoure les moments qui sont ceux-ci, la remise du trophée dans le stade et le champagne sabré sur l’esplanade. 9’212 spectateurs ont même répondu présent pour cette dernière longue journée de championnat, un record monumental qui vient clore trois saisons maîtrisées au mieux dans l’antichambre de l’élite. Et pourtant, tout ne fait encore que commencer (aussi parce que le plus dur arrive): « J’espère pouvoir revoir une Maladière aussi pleine la saison prochaine. Il est clair que le premier match s’annoncera très festif. Je sais que les Neuchâtelois et les nombreux fans de Xamax et du ballon rond vont se presser au stade; nous en avons eu une très belle preuve ce lundi. Il y avait une euphorie certaine, une envie (et une joie) partagée de retrouver le football d’élite. Il nous faudra maintenir ce momentum, mais profitons aussi du moment. » L’autre grande qualité du club demeure aussi dans la maîtrise des propres émotions. Autrement dit, le club entier – des dirigeants aux joueurs – gardent les pieds bien en terre. Une constante qui n’a pas forcément été le cas pour tous les clubs cette saison; le FC Lausanne-Sport personnalisant le parfait contre-exemple. La juste modestie xamaxienne passe dans la connaissance précise des capacités de l’entier groupe – « Je ne sais pas si l’on peut parler de rêve, tant la promotion était devenue évidente et un objectif plus qu’atteignable ! La preuve, cela fait déjà un mois que nous avons assuré notre place en Super League », avoue Geoffrey Tréand – tout autant que des défis entiers qui attendent le promu dans la catégorie supérieure – « Les choses seront moins faciles la saison prochaine, cela est certain. Mais nous y serons quand même », lâche alors le capitaine Laurent Walthert sur la scène de l’esplanade du stade de la Maladière.

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Voir également: L'interview complète à Geoffrey Tréand lors de la remise du trophée à la Maladière

Des victoires et de belles histoires…

Cette saison 2017/2018 fut décidément pleine pour Neuchâtel Xamax. Des succès triomphaux à domicile, des remontées extraordinaires à l’extérieur et, au milieu, de fantastiques histoires à raconter aux plus jeunes, dans un futur proche. « Nous avons bien évidemment vibré à la maison mais beaucoup a été accompli aussi à l’extérieur – raconte alors Greg Binggeli – Je me souviens parfaitement de nos rencontres mémorables à Genève, mais aussi l’ensemble de nos “remontada” à Vaduz [3-3] et à Winterthur [4-4]. Nous avons vécu d’extraordinaires histoires à chaque match. Je crois qu’on ne pouvait pas rêver d’une aussi belle réussite. Rien n’était pourtant prédit en début de saison au vue d’une concurrence élevée avec Vaduz, Aarau et bien sûr Servette. C’est véritablement au cours de la saison que nous avons tous constaté que nous avions véritablement l’équipe qu’il nous fallait pour terminer premiers cette année. » D’ineffables succès auxquels s’ajoutent de grands et uniques souvenirs personnels. Le premier tournant de la saison passa inévitablement par le succès en remontée 3-2 face au Servette FC à la Maladière. Une rencontre où le suspense ajouta à la réussite neuchâteloise toute sa grandeur et sa prodigalité, et avec une touche symbolique de complémentarité entre l’expérience et la fougue. Car ce 20 septembre marquait aussi la titularisation exceptionnelle de Federico Nicastro, troisième gardien de 36 ans – passé même second derrière la stature de Laurent Walthert depuis – et marque inconditionnelle de la pleine réussite d’un club qui se renouvelle et se “recycle” aussi – dans le très bon sens du terme: « J’étais venu à Neuchâtel pour assurer un rôle de troisième gardien. Et bien sûr, rarement un gardien réserviste trouve du temps de jeu dans une saison aussi relevée en Challenge League – confie alors l’Italien, ancien joueur en Serie C – Et pourtant, j’ai eu la chance de pouvoir disputer le derby capital face au Servette FC avec une victoire primordiale à la clef. Tout cela en plus d’avoir encore la satisfaction de disputer deux nouvelles rencontres en cette fin de championnat [ndlr, un total de jeu de 270 minutes]. C’est évidemment une joie certaine, cinq années après avoir mis un terme au football professionnel en Italie. »

« Je dois dire que finir ma carrière ici à Neuchâtel Xamax est comme un rêve pour moi, parce que depuis que je suis venu vivre à Neuchâtel en 2013, j’ai toujours idéalisé le stade de la Maladière que je voyais depuis ma maison. J’ai toujours nourri l’espoir et le souhait d’y jouer un jour. Et j’ai réussi… »

Federico Nicastro, troisième gardien xamaxien promu en Super League

Au plus simple, les rêves les plus fins; n’imaginant pas remettre les pieds au sein d’un club professionnel en Suisse – lui qui a porté les maillots du FC Ticino en troisième ligue, de l’ASI Audax-Friul en deuxième ligue, puis du FC Portalban/Gletterens en deuxième ligue interrégionale lors des trois saisons passées – Federico a toujours nourri un espoir de se retrouver au premier plan, dans un club de renom. « Je dois dire que finir ma carrière ici à Neuchâtel Xamax est comme un rêve pour moi, parce que depuis que je suis venu vivre à Neuchâtel en 2013, j’ai toujours idéalisé le stade de la Maladière que je voyais depuis ma maison. J’ai toujours nourri l’espoir et le souhait d’y jouer un jour. Et j’ai réussi… » Et à vrai dire, il a réussi plus que cela, validant une promotion historique pour le club rouge et noir. Tout cela, en ayant pour plus contribué pleinement à cette réussite collective. N’est-ce pas aussi pour cela que l’on lui a attribué le numéro 1, floqué sur son maillot ? Beau récit que celui-ci…

Voir également: L'interview complète à Federico Nicastro lors de la remise du trophée à la Maladière

De grandes révélations à la Maladière

L’on pourra écrire que les mythes furent omniprésents tout au long de la saison. Avec 85 points inscrits en 36 recontres, c’est déjà un record (égalé avec le FC Zürich la saison passée) que Neuchâtel Xamax FCS a établi. Puis, la domination fut totale; à l’image de performances maîtrisées, tant dans le jeu, que dans les émotions sur le terrain. Face au FC Wil, ce lundi après-midi, les hommes de Michel Decastel ont livré un dernier aperçu de leur large répertoire démontré tout au long de l’exercice: six buts et une résistance coriace, malgré les réussites adverses. Et dans le lot, voici le hat trick de Raphaël Nuzzolo. Tout juste sept mois après être parvenu à le réaliser (pour la première fois de sa carrière) à Vaduz lors de la large victoire 5-0 le 20 octobre, l’ancien attaquant de Young Boys a réitéré, à domicile cette fois. Preuve aussi de l’extraordinaire trouvaille d’un joueur qui s’est révélé à la pointe de l’attaque neuchâteloise. « Faire un coup du chapeau à la Maladière aura vraiment été la dernière chose qu’il me fallait réaliser pour boucler la boucle. Peut-être que j’y parviendrai aussi la saison prochaine, mais la Super League reste un niveau très au-dessus. Ce qui compte, c’est que les 9’200 spectateurs aient pris du plaisir cet après-midi », confirme Nuzzolo. Et puis, il faut dire que le numéro 14 n’en est pas à sa première promotion avec le club rouge et noir. Il y a onze ans, déjà, il soulevait le trophée de la LNB pour matérialiser, après un dernier match à Lugano, une mémorable promotion dans l’élite. Et les choses – les équilibres surtout – ont changé depuis: « Il y a onze ans, on avait eu le temps de faire la fête, quatre heures durant, dans le bus. Cette fois, il faut dire que le fait de terminer le championnat à domicile, face à 9’000 spectateurs, retient quelque chose de magique. J’aurais au moins vécu les deux situations dans ma carrière. »

« Nous avons pleinement les capacités pour nous maintenir. De plus, quand je suis allé voir deux-trois matches cette année, je pense sincèrement que nous n’avons rien à envier à certaines formations présentes dans l’élite. »

Raphaël Nuzzolo, numéro 14 xamaxien promu en Super League

Depuis, Raphaël Nuzzolo a grandi, muri et son football est devenu plus “responsable”. Il est désormais le meneur, le guide expérimenté de cette jeune formation xamaxienne. Son total de buts cette saison (26 en 34 rencontres disputées) en témoigne parfaitement. « C’est toujours aux plus anciens de montrer la voie et de guider l’équipe. Il y a onze ans, je me laissais par ailleurs guider. J’avais moins de pression qu’aujourd’hui; les vieux nous menaient sur la juste voie. Maintenant, c’est moi qui essaie d’aider mes coéquipiers et j’espère qu’ils porteront le même regard que moi sur les vieux très bons joueurs de l’équipe quand ils en parleront dans dix ans », commente encore Nuzz, pour qui – donc – les responsabilités seront encore plus élevées en Super League. « C’est vrai, mais il ne faut pas avoir peur – explique-t-il alors – Nous avons pleinement les capacités pour nous maintenir. De plus, quand je suis allé voir deux-trois matches cette année, je pense sincèrement que nous n’avons rien à envier à certaines formations présentes dans l’élite. L’important sera de bien débuter afin de nous prouver, à nous, que nous avons le niveau de la Super League. Néanmoins, avec quelques renforts expérimentés et les jeunes que le club dispose, nous devrions pouvoir y arriver. »

Voir également: L'interview complète à Raphaël Nuzzolo en zone mixte à la Maladière
Voir également: L'interview complète à Steve Lawson lors de la remise du trophée à la Maladière

Et puis parmi les jeunes, et non moins belle révélation cette année, Steve Lawson aura vécu une saison (presque) pleine. « C’est une saison très réussie pour moi, même si entachée quelque peu par ma blessure. Nous sommes champions, nous sommes promus dans l’élite et j’ai fêté mes premières sélections avec mon équipe nationale [ndrl, le Togo], c’était un rêve et je ne pouvais pas rêver mieux pour cette saison. » Et voilà donc servi le premier trophée de sa jeune carrière (à pas encore 24 ans): « C’est un grand accomplissement dans la carrière d’un footballeur de soulever un trophée, parce que pas tous n’ont la chance de le vivre un jour. Aujourd’hui, j’ai la chance de le vivre avec un club qui a eu beaucoup de problèmes par le passé mais qui a su se relever. Cela me rend extrêmement fier d’avoir pu contribuer, ensemble avec mes coéquipiers, à cette très belle remontée du club en Super League », termine alors le numéro 15 neuchâtelois.