Mujinga Kambundji: « Mes premiers 60 mètres étaient bien mais je me suis crispée à la fin »

Belle entrée de saison pour Mujinga Kambundji au meeting de Doha. Au Qatar, la Bernoise s'est classée 7e des 100 mètres mais avec un chrono encourageant de 11”17 secondes. © leMultimedia.info / Oreste Di Cristino
Du Qatar Sports Club Stadium, Doha (Qatar)

La Suissesse Mujinga Kambundji a fait une bonne rentrée pour son premier meeting en plein air à Doha. La Bernoise, bien que seulement 7e, s’est classée avec un temps prometteur de 11”17 sur les 100 mètres. Face à une rude concurrence, fort rapide, avec la meilleure performance mondiale de l’année établie par l’Ivoirienne Marie-Josée Ta Lou (10”85), Mujinga s’est passablement rassurée malgré une course qu’elle n’a pas maîtrisée de bout en bout. Elle tient encore plus crédible de descendre au-dessous des 11 secondes dans le courant de la saison. Le 12 mai, néanmoins, elle s’alignera pour les 200 mètres du meeting de Shanghai, le deuxième du calendrier de la Diamond League.

La Suissesse s’est montrée très souriante au terme de sa course à Doha. Sur ses 100 mètres, elle s’est pourtant classée 7e avec un chrono assez éloigné de son record de Suisse. Mais il faut tenir compte de la préparation de la jeune athlète bernoise; deux mois seulement après sa médaille de bronze aux mondiaux indoor de Birmingham, elle a repris l’entraînement avec une très grande détermination en Floride, aux côtés de l’Américain Rana Reider qui n’est toutefois pas (encore ?) son entraîneur. Dans les faits, Mujinga s’est longtemps entraînée sans véritable coach en ce début d’année 2018. Pas une situation idéale mais une situation qu’elle dit maîtriser; et cela lui porte plutôt bien. Pour sa première sortie internationale en extérieur, ses 11”17 secondes témoignent un très bon augure. Et dans la confrontation, les plus rapides, les Ivoiriennes Marie-Josée Ta Lou (1ere) et Murielle Ahouré (4e), la Nigériane Blessing Okagbare (2e) ou encore la Jamaïcaine Elaine Thompson (3e) ont certainement tiré majeur profit des conditions météo: 30 degrés relativement peu humides (39%) et un vent fortement favorable (+1,5 m/s). De son côté, Mujinga Kambundji a dû apprivoiser une piste qu’elle n’avait jamais découverte auparavant, à Doha. Elle a aussi dû gérer un temps de préparation court; elle aurait pu s’inscrire au meeting de Langenthal (BE) le 10 mai prochain, mais a préféré se frotter dès le début à une concurrence parmi les plus relevées. Elle l’expérimentera encore une fois le 12 mai lors du deuxième meeting de la Diamond League à Shanghai où, cette fois, elle sera alignée sur les 200 mètres. Une première pour la Bernoise qui n’avait jamais repris la compétition aussi tôt un mois de mai. Et physiquement, avoue-t-elle au terme de sa course au Qatar Sports Club Stadium, elle en a ressenti quelques gênes. « J’étais surprise du résultat parce que je ne me sentais pas bien du tout sur la piste », débute-t-elle alors en zone mixte: « C’est un bon chrono surtout pour une première course. Il faut dire que j’ai parfois besoin d’un peu de temps au début de saison pour trouver mes marques. »

« 11”17 augure de toute manière une belle suite. Je sens que je peux arriver à hauteur de mon record de Suisse et même descendre sous les 11 secondes cette saison »

Mujinga Kambundji, sprinteuse suisse

Pourtant, le début de cours était rapide et parfaitement ajusté, avec notamment l’un des temps de réaction les plus courts du plateau (0”140 centièmes). Seule Murielle Ahouré a été plus prompte sur le départ (0”136), ce qui – bien évidemment – ne procure pas un avantage décisif sur la course, mais bien défini, dans une moindre mesure, la forme physique et mentale de l’athlète. Par ailleurs, la sprinteuse suisse en convient; l’ensemble de son départ était satisfaisant. La course s’est alors compliquée dans sa deuxième moitié. « L’accélération était bonne, mes premiers 50-60 mètres étaient bien mais je me suis crispée à la fin, je sentais que je n’étais pas dans la bonne position », explique-t-elle alors en zone mixte avant de poursuivre: « Je n’ai pas réussi à me relâcher. Je sais que quand je ne me sens pas à mon aise, comme cela, je ne peux pas faire mieux. 11”17 augure de toute manière une belle suite. Je sens que je peux arriver à hauteur de mon record de Suisse (11”07) et même certainement descendre sous les 11 secondes cette saison. » Les ambitions sont donc intactes au terme de cette première course saisonnière au Qatar. Et puis, en réalité, elle ne s’attendait nullement à un résultat meilleur que celui-ci. « Mais aujourd’hui, il ne fallait pas mieux s’attendre. Il aurait été illusoire de viser un top chrono », conclut-elle alors.

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Il en est une pourtant qui nourrissait les mêmes espoirs que Mujinga Kambundji: celui d’améliorer son propre record national, tout autant que de descendre au-dessous des 11 secondes. À y voir de plus près, la Sud-Africaine Carina Horn a un parcours personnel assez proche de celui de Mujinga Kambundji. La sprinteuse de l’Université de Pretoria a longtemps navigué dans les mêmes eaux que la Bernoise. Toujours réactive, elle a sans cesse souhaité franchir de nouvelles étapes dans sa carrière. En 2015, lorsqu’elle égala le record national d’Afrique du Sud d’Evette de Klerk, elle s’est toujours attachée à le battre un jour, soit descendre plus bas que les 11”06 secondes qu’elle avait alors réussi à établir. Ce début de saison marquait alors pour l’athlète de 29 ans une occasion irrémédiable pour enfin atteindre ses objectifs. Et elle y est parvenue avec un brio extraordinaire; d’abord aux championnats nationaux à Pretoria le 15 mars dernier où elle a établi le record national à 11”03 secondes, puis de nouveau ce vendredi soir au Qatar Sports Club Stadium de Doha où sa cinquième place aux 100 mètres a paru dérisoire au vue du temps extraordinaire qu’elle a tiré de sa course. Rapide, elle est enfin parvenue à descendre au-dessous des 11 secondes. Carina Horn a alors talonné de très près le quatuor de tête en parcourant la distance en 10”98. Certainement que la Suissesse s’en inspirera à l’heure de se réaligner sur les 100 mètres, et ce pour l’ensemble de la saison.

Sentiments partagés pour Okagbare, grande satisfaction pour Ta Lou

Dans le haut du classement, l’on trouve également les filles déçues et les filles satisfaites. Deuxième du plateau à Doha, la Nigériane Blessing Okagbare (29 ans) s’est montrée quelque peu insatisfaite en zone mixte. « Je m’attendais à finir deuxième mais je m’attendais à un résultat définitivement meilleur. je m’étais fait beaucoup d’idées sur ce que cette course aurait pu m’offrir. Mais au-delà de cela, je ne peux pas non plus être totalement malheureuse pour le résultat – lâche-t-elle alors avant de poursuivre: « Tout ce que je peux faire à présent, c’est de continuer à m’entraîner et à courir vite. Je dois juste atteindre mes objectifs cette saison [ndlr, sans championnat majeur pour les athlètes non-Européens]. Je peux remercier Dieu d’avoir pu terminer la course en bonne conditions, tout en étant forte. »

« Honnêtement, j’ai couru pour me situer par rapport aux autres et à la compétition. Je ne peux être qu’heureuse de ma victoire et surtout de mon temps! »

Marie-Josée Ta Lou, gagnante du 100 mètres féminin

Tout le contraire de l’Ivoirienne Marie-Josée Ta Lou qui ne livrait que peu d’espoirs sur sa première course de la saison en plein air. La double médaillée d’argent aux championnats du monde de Londres en 2017 (sur 100 et 200 mètres) a toutefois fait exploser les compteurs en s’imposant souverainement devant l’ensemble du gratin mondial, de la Néerlandaise Dafne Schippers (6e) aux Jamaïcaines Elaine Thompson (3e) et Jura Levy (8e). L’athlète de 29 ans est parvenue à arracher le meilleur résultat de sa carrière pour établir la meilleure performance mondiale de l’année en courant la distance en 10”85 secondes. Un résultat plus que conséquent pour une première sortie planétaire. « Toutes les filles sur la piste sont mes rivales. Il faut dire, si je veux être honnête, que je me suis alignée à Doha d’abord pour tester ma condition physique et l’état de ma préparation. Je ne peux donc être qu’heureuse de ma victoire et surtout du temps établi ! », explique-t-elle alors au terme de la course en zone mixte avant de continuer: « Mon but, cette saison, est vraiment de donner de mon mieux partout où je serai inscrite et pourquoi pas remporter la Diamond League cette année. Je ne veux pas dire que j’ai envie de tout gagner mais si j’arrivais à battre à nouveau mon record personnel comme aujourd’hui, ce serait fantastique. » Même sentiment partagé par la tenante du titre en Diamond League, Elaine Thompson: « Je suis très heureuse d’avoir atteint le podium [3e]. Cette saison, je veux pouvoir me tenir en forme et tenter d’établir un nouveau record personnel. Je ne me fais pas de souci quant au fait de gagner à nouveau la Diamond League; je la regagnerai bien dans le futur – aiguillonne-t-elle alors avant de conclure – Mon principal espoir reste avant tout de rester en forme et en bonne santé. »

La Croate Sandra Perkovic remporte aisément le lancer du disque

Elle est double championne olympique et maintenant même double championne du monde et totalise, à elle seule, six trophées en Diamond League, ce qui est tout bonnement inédit dans le monde de l’athlétisme féminin. Ce vendredi soir à Doha, la Croate Sandra Perkovic a cueilli sa 39e victoire en Diamond League au lancer du disque. Il faut dire que l’athlète de 27 ans a été très expéditive. Elle n’a, en effet, eu besoin que d’un brin de chauffe pour établir, sur son troisième essai, le record de la Diamond League, tout autant que la meilleure performance mondiale de l’année – qu’elle détenait déjà (71,38 mètres). La Cubaine Yaimé Pérez (2e) n’a pu faire mieux qu’un lancer à 66,82 mètres, c’est dire l’écart de puissance. « J’étais tout près de mon record personnel [71,41m]. Je pense réellement que Doha est un lieu magique pour moi – consent alors Perkovic avant de conclure – L’ambiance est magique ici et les conditions de jeu permettent une très bonne mise en condition pour le reste de la saison. Cela semble parfait à quelques moins des championnats d’Europe de Berlin. À Doha, j’ai pu déjà prendre mes marques et cela aide énormément. »