Omar McLeod s’alignera sur les 200 mètres à Doha et affrontera le champion du monde Ramil Guliyev

Le Jamaïcain Omar McLeod veut se donner un nouvel air; il défiera André De Grasse et le champion du monde Ramil Guliyev sur leurs 200 mètres. © leMultimedia.info / Oreste Di Cristino
Du Marriot Marquis Hotel, Doha (Qatar)

Aux 200 mètres, à Doha, il y aura plusieurs grands enjeux. Tout d’abord, c’est le retour sur piste du champion du monde Ramil Guliyev. Après avoir créé la surprise à Londres en août dernier, en décrochant la médaille d’or, le Turc se frottera à nouveau à une très grande résistance. Wayde Van Niekerk blessé, la course maintiendra certainement une belle intensité. Il y aussi le retour (de blessure, quant à lui) du Canadien André De Grasse. Et surtout, il y aura la surprise Omar McLeod. Spécialiste des 110 mètres haies, le Jamaïcain a décidé de s’aligner sur les 200 mètres au Qatar. Premier athlète à être descendu au-dessous des 10 secondes aux 100 mètres (9”99) et des 13 sur 110 mètres haies (12”90), le médaillé d’or aux mondiaux de Londres souhaite désormais s’abaisser en dessous des 20 secondes sur les 200 mètres. À Doha, il en aura une première occasion.

« Chaque nouvelle saison est pour moi un pas de plus. » Ces mots ont été prononcés en début d’après-midi par Ramil Guliyev. Ramil Guliyev est turc et s’est probablement fait connaître du monde de l’athlétisme en décrochant, à la surprise générale, le titre mondial des 200 mètres à Londres en août dernier. Déjà vice-champion d’Europe de la discipline en 2016, il est devenu le premier champion du monde de l’athlétisme dans l’histoire de la Turquie. Et derrière lui, il n’y eut ni plus ni moins que du costaud; le Sud-Africain Wayde Van Niekerk (2e) – qui s’est blessé en fin d’année 2017 – et le Trinidadien Jareem Richards (3e). Bref, en 2017, Guliyev a créé la sensation et, même neuf mois plus tard, à Doha, on rappelle le moment de l’exploit: « Ma relation avec les médias a véritablement changé – explique-t-il alors avant de continuer – Mais il faut dire que pour moi rien n’a changé; ma conscience, mon esprit n’ont pas changé et mon amour pour la compétition encore moins. Il n’a jamais été très important pour moi de savoir où et quand je dois concourir, à chaque fois je donne mon meilleur et là, le meilleur est arrivé en pleine finale mondiale. » À Doha, ce sera pour lui la première compétition de sa saison extérieure et il se sent prêt à débuter: « Ma préparation a été optimale en hiver », explique-t-il alors. À Doha, il se confrontera en effet avec une concurrence aussi grande que – à quelques égards – surprenante.  La surprise vient certainement du choix du Jamaïcain Omar McLeod de s’aligner sur les 200 mètres. Spécialiste du 110 mètres haies, dont il est le champion olympique et champion du monde en titre, le jeune homme (24 ans) souhaite animer encore plus sa joie de courir: « C’est seulement la deuxième fois que je m’aligne sur un 200 mètres. Je veux vraiment apprivoiser la discipline. Je suis étudiant dans le sport et il faut dire que j’adore sprinter et j’adore m’inscrire dans une compétition où je sais que ce sera très difficile de s’imposer. Demain, au stade, j’espère pouvoir me mesurer aux autres et apprécier la course… et pourquoi pas descendre au-dessous des 20 secondes ? », lâche-t-il alors à l’hôtel des médias. Pour le Jamaïcain, sans doute, c’est aussi le moyen de garder la forme dans une année qui ne réserve plus de compétitions majeures pour les non-Européens. Il approuve également: « Je veux renforcer mon expérience sur piste et cela n’est pas facile lorsque nous ne nous focalisons pas sur un championnat en particulier. Aujourd’hui, je peux me dire que je ne me tiens pas nécessairement à me concentrer sur une seule discipline, mais à davantage maintenir ma forme pour les échéances à venir dans les trois prochaines années. »

« Je veux battre le record européen sur 200 mètres. Il me faudra être en bonne forme pour y réussir »

Ramil Guliyev, champion du monde du 200 mètres

Le champion turc part néanmoins avec des ambitions bien précises cette année. Et, témoigne-t-il, l’arrivée prochaine des championnats d’Europe de Berlin sera un élément parfaitement motivant. « À chaque nouvelle saison, je repars presque à zéro. À chaque fois, je veux retrouver de nouvelles émotions et me forger toujours au gré de nouvelles expériences. Dans cette veine, les championnats d’Europe seront un parfait motivateur. Pour un athlète, il lui faut être constamment prêt à relever de nouveaux défis. Si l’on ne l’est pas, l’on est automatiquement hors de la compétition », lâche-t-il alors avant d’affirmer, solide et confiant: « Je veux essayer de battre le record d’Europe du 200 mètres cette saison [ndlr, détenu par l’Italien Pietro Mennea depuis 1979, en 19”72]. Pour cela, la préparation doit être optimale. Les émotions éprouvées sur la piste sont importantes. Bien dormir est aussi très important. Il faut en somme être mentalement prêt à le faire, et être en bonne forme. » Puis, précise-t-on encore, le temps entre la saison indoor et outdoor a été très court; la préparation a-t-elle donc été optimale ? « Il est vrai que pour faire des résultats, l’on a besoin d’un bon entraînement. C’est ce que j’essaie de faire en ces temps très courts. Si je suis bien préparé, on en aura un élément de réponse demain. » Pour rappel, le meilleur résultat personnel de Guliyev sur 200 mètres est établi à 19”88, ce qui est encore plus haut que le Canadien André De Grasse (19”80) et le Jamaïcain Rasheed Dwyer (19”80), parmi ses concurrents de vendredi au Qatar Sports Club.

Un plateau parmi les plus relevés

En face, il y aura en effet de grands noms. Le premier meeting de la Diamond League à Doha en regorge en réalité. Et cela est d’autant plus marquant sur les 200 mètres, alors même qu’Isaac Makwala a préféré s’aligner sur les 400 mètres plutôt que les 200. Parmi les américains – sinon Isiah Young (28 ans) – il y aura Noah Lyles, un jeune sprinteur de 20 ans, champion de la Diamond League en 2017. Noah était par ailleurs blessé aux sélections américaines et n’avait par conséquent pas pu participer à son tout premier championnat du monde à Londres en août dernier. Le garçon aura des raisons de tester son audace à Doha vendredi soir, d’autant plus que ce premier rendez-vous de la Diamond League de la saison voit le retour de blessure d’André De Grasse. Le Canadien s’était blessé aux ischio-jambiers juste avant les mondiaux de Londres. À Doha, ce sera donc son véritable retour sur la scène planétaire. Il avait auparavant – toutefois – déjà couru les 100 mètres lors d’un meeting à Des Moines dans l’Iowa. « Je me sens bien. J’essaye de me remettre en forme le plus possible et prendre ainsi un nouveau départ. C’est ma deuxième compétition cette année et je sens que je peux revenir à mon meilleur niveau. », affirmait-il alors à la presse ce jeudi après-midi à l’hôtel des médias, avant de poursuivre: « Je me prépare pour les mondiaux de 2019 à Doha et les JO de 2020 à Tokyo. Et en cela, la Diamond League va m’aider. »

« Généralement, on appréhende le sprint progressivement; on commence par 100 mètres, puis 150 et enfin 200. Ma stratégie est de commencer directement par les 200 »

Omar McLeod, sprinteur jamaïcain, spécialiste des 110 mètres haies

Dans le tableau, à Doha, il y aura donc aussi Omar McLeod. Spécialiste des 110 mètres haies, le Jamaïcain a presque du reprendre les bases du sprint sur plat. « Généralement, on appréhende le sprint progressivement; on commence par les 100 mètres, puis on fait 150 et enfin, on s’aligne sur les 200. J’ai stratégiquement choisi de m’aligner directement sur les 200 mètres. Il faut sprinter énormément et je me sens bien avec cette idée. Il faut dire que l’entraînement entre les 100 mètres et les 200 mètres ne change pas énormément, c’est le même », explique alors l’athlète qui compte énormément sur la saison de Diamond League pour se tenir en (bonne) activité, et que ça lui serve: « Ma volonté est de m’aligner dans les divers meetings relevés cette année, et pourquoi pas enlever la finale à Zürich [ndlr, le 30 août prochain au Letzigrund] ? » C’est, par là même, l’intérêt partagé par le Trinidadien Jareem Richards, médaillé de bronze à Londres – donc – et même d’or aux Jeux du Commonwealth à Gold Coast en Australie cette année. Il avait pourtant fini (seulement) 4e aux Mondiaux en salles de Birmingham au mois de mars. Et dans les faits, pour lui aussi, les grands rendez-vous sont passés, avec plus ou moins de réussite. Cela dit, à Doha, il ne courra pas (seulement) pour le plaisir. « Demain, je vais essayer de gagner la course. Quand je rentre au pays, j’aime dégainer mes succès, pour inspirer les jeunes. C’est en ce sens qu’il faut aussi être professionnel: gagner, quel que soit le lieu et la compétition que l’on dispute », aiguillonne-t-il alors.