Avusy s’adonne à son tour au développement du rugby féminin

La nouvelle équipe féminine d'Avusy (renforcée par trois Alba Ladies) entourée par ses trois entraîneurs, de gauche à droite, Yoann Chassot, Maxime Buttet et Johann Locatelli. © leMultimedia.info / Oreste Di Cristino

Le rugby féminin ce dimanche 8 avril se développait à deux endroits bien distincts. Pour les Alémaniques, un programme entier était réservé à Würenlos, dans le canton d’Argovie. Pour les Romandes, le rendez-vous était à Avusy (Genève). Un endroit pas choisi au hasard, aussi parce que le club au bulldog a lancé, dès septembre 2017, sa propre formation féminine. Celle-ci devrait rejoindre la LNB féminine dès la saison prochaine. Une nouvelle équipe qui vient ainsi grossir les rangs des équipes genevoises à avoir développé une section pour les filles, après les Wildcats et les Switzers. Focus.

Les filles ont été accueillies par un doux printemps au centre communal d’Athénaz, à Avusy. Une température montante et un soleil presque trop tapageur (22 degrés en pointe) pour y développer un rugby de qualité. « Nous avons de la chance avec la météo, le beau temps est au rendez-vous », engage la conversation Johann Locatelli (35 ans), organisateur de la journée et entraîneur de la nouvelle équipe féminine du RC Avusy. C’est en effet, au bord de la frontière française, vers la partie de Chancy, que le rugby féminin a été nouvellement porté vers son développement. Des ateliers le matin et un tournoi à 7 avaient alors été prévus pour ce dimanche; elles étaient au nombre de 16 dès 9h sur la pelouse d’Avusy pour y engager les premiers échanges – principalement les représentantes des Wildcats de CERN et quelques joueuses du club hôte –, puis pas loin de 40 l’après-midi, rejointes par les joueuses des Switzers, emmenées par le président de l’ACGR Gianni Di Martino. « Ces journées sont importantes mais les heures du matin sont souvent perdues. Je suis plus favorable à ce que l’on retire les ateliers et qu’on les remplace par des heures de tournoi », commente au bord de la moitié de terrain de jeu Di Martino, avant de continuer: « Je pense qu’il vaille mieux axer sur le repérage, avec des stages de compétition. Personnellement, j’amène les filles pour jouer mais pas pour les entraîner. Pour cela, chaque club a assez à faire lors de ses propres entraînements. » À décharge, il semble évident que les circonstances d’apprivoisement du rugby soient diamétralement opposées entre un entraînement collectif, plus calme, plus posé, et une mise à épreuve directe par la voie de matches organisés dès le matin. Mais tout le monde ne partage pas pour autant cet avis, certaines filles de l’entourage du club proche de CERN St-Genis déployant leur enthousiasme lors d’une séance de revue à effectif réduit. « Les conditions idéales pour suivre un entraînement, à 16 », entend-t-on alors.

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Quoi qu’il en soit, c’est le bonheur des retrouvailles qui semble alors prévaloir; des filles de 13 (!) à quelque 30 ans ont participé à cette journée de développement. À 13 ans, une fille des Switzers a en effet connu ses premiers pas aux côtés de joueuses âgées, pour certaines, de plus du double d’années. « Nous l’avons essayées pour quelques instants. Elle doit grandir, elle qui ne peut pas encore jouer en LNB », témoigne Gianni Di Martino, entraîneur des Genevoises. Au moins, la large sélection aura permis une première satisfaction pour le rugby romand, et à plus forte mesure genevois, qui démontre savoir sans cesse se renouveler, tant au côtés des plus jeunes, qu’au près des plus aguerries et expérimentées. L’autre satisfaction est pour le rugby suisse, plus généralement, pour lequel les responsables de la FSR – dont Christa Herrmann, ayant fait présence en Suisse allemande – annoncent près de 100 filles présentes sur les terrains ce dimanche lors des stages dispensés simultanément sur les sites d’Avusy et de Würenlos (Argovie). Dans le canton de Genève, du moins, le tournoi à 7s aura attiré un petit monde – 40 spectateurs entre parents et amis du rugby – pour des matches qui auront mis aux prises trois formations différentes, toutes au maillot floqué d’un club de la région de Genève. Elles furent quatre filles de la nouvelle équipe d’Avusy à jouer ce dimanche avec le maillot du club local; elles ont fait équipe avec trois joueuses confirmées de l’Albaladejo Rugby Club (de Lausanne). En face, ont disputé deux équipes représentantes des deux ligues de rugby actuellement mises sur pied: les Wildcats de CERN-Saint-Genis (actuellement bonnes premières de LNA-F) et les Switzers donc qui se démènent avec succès dans la nouvelle LNB-F. Il y eut donc de tout à Avusy, une confrontation amicale et dynamique entre quelques joueuses débutantes et plusieurs rugbywomen de meilleure expérience. « Celles qui ont découvert le rugby sont à l’écoute de leurs aînées », soutien alors Johann Locatelli.

Le RC Avusy rejoindra la LNB-F dès septembre 2018

La journée s’est déroulée à Avusy, « sur initiation du club », annonce-t-on, aussi pour faire montre de la nouvelle formation féminine qui n’a vu le jour qu’en septembre 2017, soit quelque quatre mois après le dernier stage féminin à Monthey, en Valais – preuve sans doute de l’authenticité et de la nécessité de telles rencontres tout autour de la Suisse. Autant dire que la formation est jeune et repart, tambours battant, d’un niveau zéro, par les bases du sport. Aussi, depuis que la section existe, le club peut compter sur un bon noyau de 15 filles, licenciées. Un nombre encore un peu restreint car, quand bien même les journées de développement abordent le rugby sous sa formule à 7s, l’objectif avoué reste bien de développer un rugby à XV. « C’est ce que tout club souhaite », aiguillonne Locatelli, l’un des entraîneurs de cette formation plus que naissante. « Mais la première étape était de créer un groupe puis, dans un second temps, d’officialiser l’équipe avec la création d’une unité spécifique au sein du club. » Ce qui est en très bonne voie, à l’heure actuelle, à tel point que l’intégration des filles sur le pré d’Athénaz devrait les amener à rejoindre la LNB-F dès le mois de septembre prochain (sur paiement d’une somme à la FSR pour participer à la ligue). Selon les dires des entraîneurs, l’équipe compte aujourd’hui un groupe de filles entre les 20 et 38 ans, lesquelles avaient déjà disputé un premier match face à l’équipe de Saint-Julien-en-Genevois, qui s’était déroulé un mercredi pluvieux devant pas moins de 100 personnes (c’est dire l’engouement!). Ce groupe de filles majeures, de plus, est supposé accueillir, dans un futur proche, deux filles évoluant actuellement dans l’équipe (mixte) des U14 du RC Avusy, dont Johann Locatelli s’occupe également. « C’est toute une structure que l’on souhaite monter et qui est destinée à perdurer. Que nos deux U14 puissent intégrer l’équipe première féminine à leurs 17 ans est une attente réelle du club », précise encore ce dernier. « Faire progresser une équipe féminine, au-delà de contribuer au développement cantonal et suisse du rugby féminin, est aussi un plus éminemment positif pour Avusy. »

« Le groupe avance à force d’un travail assidu. Le collectif est en réalité un vrai groupe de copines »

Maxime Buttet, joueur au RC Avusy et co-entraîneur de l’équipe première féminine

Ils sont trois aux commandes de l’équipe première féminine à Avusy. Il y a donc Johann Locatelli, ancien international suisse et joueur en équipe réserve en Excellence A – au club depuis deux ans, après 25 ans de rugby dans les jambes. Il y a aussi Yoann Chassot – au club (le premier de sa carrière) depuis 2007 – et enfin, Maxime Buttet, également joueur en Excellence A – au club depuis 2010, dont il est également devenu sponsor. Ensemble, ils témoignent du travail certain de leurs protégées. Et autant dire que pour des présumées joueuses (100% débutantes), le niveau tient déjà bonne route. « Le développement de notre équipe avance. Le niveau que l’on voit aujourd’hui est le fruit d’un travail assidu. Le groupe est concentré et se donne les moyens d’évoluer. Nous avons voulu un collectif qui soit avant tout un bon groupe de copines, et on voit que la méthode porte ses fruits », affirme Maxime Buttet. « Avusy est une grande famille et cela a toujours été inévitable. » Faut-il dire que, même si passablement portée par trois Alba Ladies, auteures de la plupart des essais de l’équipe, la qualité de jeu de l’équipe féminine d’Avusy semble tenir le rythme en vue de la LNB. « Les filles sont mentalement – et largement – prêtes pour le championnat. Elles n’ont absolument pas à rougir face aux autres équipes », poursuit Buttet. « Mais il y a tellement de subtilités dans le rugby que la préparation doit continuer et maintenir la même intensité. » Aussi, vainqueurs contre les Switzers et accrochant nettement les Wildcats dans le courant de ce dimanche après-midi, les filles d’Avusy témoignent déjà d’une envie décisive. « Il devrait y avoir (logiquement) une différence notoire entre nous et les autres équipes mais on voit bien qu’elle ne se confirme pas du tout. »

« Nous sommes la seule association en Suisse à regrouper autant d’équipes féminines »

Gianni Di Martino, Président de l’Association Cantonale Genevoise de Rugby (ACGR) et entraîneur de l’équipe première féminine des Switzers

Président de l’ACGR, Gianni Di Martino cueille, bien évidemment, avec un plaisir non dissimulé l’apparition – et l’intégration en LNB-F – d’une nouvelle formation féminine dans le canton de Genève. « Nous sommes la seule association cantonale en Suisse à regrouper autant d’équipes féminines. À ce titre, l’arrivée en LNB-F d’Avusy ne peut que me réjouir, en tant que Président. » Aussi, la constitution d’une ligue inférieure compétitive de rugby féminin fait partie intégrante du développement de la section. « Le rugby féminin ne doit pas être un mouvement éphémère. Il doit perdurer et donc sans cesse évoluer », lâche donc Di Martino. Les performances et le développement passant donc par le terrain, la mise sur pied d’une ligue B devrait tendre à hausser toujours plus le niveau des filles, y compris les joueuses des Switzers engagées (justement) en LNB-F. « Pour que le rugby féminin dans le canton se développe, le titre des Wildcats en LNA pourrait fournir un élan supplémentaire », explique ce dernier. Gagnantes lors de leurs deux dernières sorties à Lucerne (5-26) et à Monthey face à l’Entente Mermigans, ce samedi 7 avril (0-26), les filles de CERN et Saint-Genis-Pouilly en France dominent le championnat, devançant même les Luzern Dangels, historiques dominatrices de l’exercice ces six dernières années.

Les Switzers préparaient leur rencontre face à Bâle (à Vessy)

Pour certaines, la présence ce dimanche était déjà gage de bonne conduite. Pour d’autres, la performance sur le terrain communal d’Athénaz comptait un peu plus. C’est le cas des filles de l’équipe genevoise des Switzers. En effet, samedi 14 avril, à Vessy (15h), en lever de rideau du match des U16 du Servette Rugby Club face au Grenoble Université Club (reportage à suivre sur leMultimedia.info), les Switzers affronteront les leaders de LNB-F, les Basel Birds. Une rencontre d’importance au vue du classement actuel. « Nous voulions préparer au mieux notre match face à Bâle », confirme Gianni Di Martino avant de continuer: « Mais je dois dire que les filles sont un peu en-dessous aujourd’hui. Elles ne sont pas réveillées, presque méconnaissables. » En effet, les Switzers ont été passablement dominées par les deux autres formations de ce tournoi de développement à Avusy. Un mauvais signe à une semaine de la reprise de la compétition. « Vaut mieux que cela arrive ici que samedi à Vessy – sourit alors l’entraîneur – Même si pour nous, aujourd’hui, cela était plus un entraînement qu’un un tournoi de développement. Elles étaient un peu trop agressées, et n’entraient pas assez dans les rucks. »

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« Je suis un peu déçu aujourd’hui mais dans l’ensemble notre saison va très bien. » Les performances des Switzers en ce début d’année 2018 ne semblent pas disconvenir à Gianni Di Martino. Elles ont en effet dominé Zug 49-25 le 24 mars dernier. « Nous avons fait une très belle entame chez nous. » Mais en neuf matches joués cette saison, les Genevoises n’ont inscrit que 17 points, pour une troisième place au classement (Albaladejo 35 et Basel Birds, premières avec 37). Elles devancent seulement la fraîche équipe de Zoug (2 points), qui peine à trouver sa voie pour l’instant en championnat. Toujours est-il que la compétition attire du monde, et c’est tant mieux.