À Neuchâtel, l’attente du derby se fait doucement sentir

Vendredi après-midi à la Maladière. Michel Decastel (à gauche) et Thibault Corbaz se sondent du regard. © leMultimedia.info / Oreste Di Cristino

Lundi, Neuchâtel Xamax joue sa promotion en Raiffeisen Super League. Les hommes de Michel Decastel vont certainement jouer le match au sommet le plus important qu’ils n’aient jamais disputé. Lors des sept dernières confrontations directes, les Rouges et Noirs n’ont jamais concédé la moindre défaite au Servette FC. Mais les Grenat ont des ressources… à commencer par une grandissime envie de revanche. « Servette est la meilleure défense du championnat mais a aussi connu plusieurs passages à vide », Michel Decastel.

Rien n’a changé; à la Maladière, la sérénité des esprits prime sur le reste. Depuis leur victoire convaincante face au FC Aarau vendredi soir (3-1), les hommes de Michel Decastel n’ont pas manqué de se retrouver en équipe depuis. C’est là, un groupe qui vit, qui se comprend et se soutient. Mis en congé seulement la journée de dimanche et ce vendredi, les Xamaxiens vivent le rythme au gré de leur ambition, la promotion en Super League. À vrai dire, plus rien – ni personne – ne devrait être en mesure de les freiner dans leur élan, quand bien même ce lundi attend, aux yeux du public, une dualité décisive face au Servette FC, bon vainqueur à Schaffhouse lors de sa dernière sortie (0-1). À l’heure actuelle, les Rouges et Noirs comptent une avance “colossale” de onze points sur leurs dauphins, potentiellement 14 au terme de cette 21e journée de championnat. Un monde entre les deux équipes, tout aussi fragile que déterminant à cette heure. Si les objectifs du Servette FC ne fait l’ombre d’un doute – gagner à tout prix –, pour Neuchâtel Xamax FCS, il conviendra avant tout de maîtriser la rencontre et surtout de ne pas concéder une mise pleine aux Genevois. « Nous jouerons avec un avantage comptable considérable. Il est clair que même si nous jouons toujours pour gagner, il nous faudra avant tout essayer de ne pas perdre. À Vaduz [ndlr, 3-3], à la pause, nous étions tous conscients que nous ne pourrions pas remporter la rencontre, mais nous avons tout fait pour ne pas la perdre », lâche Thibault Corbaz, assis confortablement dans un fauteuil du salon rouge surplombant le stade de la Maladière. La conscience d’un avenir qui s’écrit est absorbé pour le numéro 7, tout comme pour son entraîneur. « Lundi, ce sera un match certainement important, un peu spécial. En cas de victoire, nous aurions officiellement 14 points d’avance et serions officieusement promus », concède, non sans un petit sourire, Michel Decastel. Toujours est-il que pour le chef de l’équipe, l’idée même d’égarer des points (doit) rester une éventualité purement et strictement secondaire: « Nous jouons à domicile. Nous n’avons perdu qu’un seul match à la Maladière, face au FC Schaffhouse [ndlr, 0-1 le 18 août 2017]. Nous n’avons d’autre choix que de nous imposer lundi; nous n’allons pas commencer à nous retrancher à l’arrière chez nous. Cela n’est nullement notre style de jeu. »

« Nous devrons être prêts à nous battre 95 minutes durant »

Thibault Corbaz, milieu de terrain de Neuchâtel Xamax FCS

Il semble à tous égards évident que Servette se présentera sous son meilleur habit à la Maladière, avec sa volonté offensive connue et une défense – la meilleure du championnat (16 buts encaissés) – solidement rodée. En face, Xamax armera ses forces et atouts – la cupidité de buts de Raphaël Nuzzolo en premier lieu, meilleur buteur du championnat (16 réussites), autant que l’attaque rouge et noire est la plus prolifique de l’exercice (46 buts) –, parachevant sans doute le solide plan de jeu que l’équipe a renforcé depuis deux saisons en Challenge League. L’équilibre et l’économie générale de la partie sont pleinement devinables, à défaut de son dénouement; Servette a le devoir de produire du jeu, Xamax de le contrer. Les Grenat d’armer l’offensive, Xamax de la neutraliser. Les Servettiens de l’emporter, Xamax également. À ce jeu, la rencontre desservira les intérêts du moins audacieux, du moins combattif, du plus lambin. « La rencontre, aussi intense soit-elle, aura tout du pur combat. Ce sera un match très engagé, à l’image même des deux précédents affrontements », pressent alors Thibault Corbaz. L’histoire joue néanmoins en faveur des Rouges et Noirs, sortis victorieux à domicile (3-2 le 20 septembre 2017) autant qu’au Stade de Genève (1-2 le 4 décembre dernier). À chaque fois, toutefois, en encaissant le premier but (20e à la Maladière et 19e à la Praille) et en cueillant la pleine mise dans les temps additionnels (92e, puis 95e avec un dernier but décisif de Thibault Corbaz). « Ces victoires sont le fruit du mérite du travail de l’équipe entière et non seulement du buteur décisif. Ce serait prétentieux de ma part de me considérer en héros de Neuchâtel après mon but à Genève – lâche le numéro 7 avant de poursuivre – Nous avons un clair objectif de victoire et peu importe qui marque. Chaque match est différent et nous ne pouvons jamais prévoir ce qui va se passer à l’avance. Ce qui est sûr, c’est que nous devrons éviter les situations qui ont été celles des deux précédents affrontements en concédant des buts dans les premières minutes de la rencontre, même si cela n’est pas toujours facile, ni même possible. Quoi qu’il en soit, nous nous tenons prêts à nous battre 95 minutes durant. »

« La Super League est encore loin »

La lutte pour la première place est encore longue, le chemin sinueux, les mauvaises surprises toujours possibles. Michel Decastel en est pleinement conscient. Mais au-delà de maintenir la large avance acquise lors des 20 dernières journées de championnat, c’est dans le jeu que Neuchâtel Xamax FCS doit encore grandir. « Il nous faudra être toujours plus déterminés en concentrés au fil de prochaines rencontres. Nous prenons [par exemple] trop de buts sur balles arrêtées, cela ne va pas », concède l’entraîneur neuchâtelois. La conscience du tournant est en pleine amorce, car affirmer manière et volonté dans ses succès, ne permettra pas uniquement à Xamax de dominer Servette ou encore Schaffhouse le 11 mars prochain, mais aussi de se préparer de la meilleure des façons à l’échelon supérieur. Par ailleurs, les joueurs y pensent-ils déjà ? « Pas plus que ça – rétorque Thibault Corbaz avant de poursuivre – Nous n’y sommes pas encore [en Super League]. Tout cela est encore loin, il reste encore beaucoup de matches et rien ne sera encore officiel lundi. »

« Servette a la meilleure défense mais a souvent connu beaucoup de passages à vide »

Michel Decastel, entraîneur de Neuchâtel Xamax FCS

À Genève, l’espoir est plus grand et ample que La Praille. De toute évidence, Neuchâtel Xamax FCS est encore à portée de mains, pour l’instant. La détermination et l’application des hommes de Meho Kodro prennent un poids considérable dans les discussions; rien n’est encore décidé. « Nous ne devons pas avoir peur », soutient tout de même Michel Decastel. « Nous avons les armes et le destin entre nos mains – ajoute même Thibault Corbaz avant de continuer – Nous ne devons pas nous préoccuper de ce que fait Servette. Nous n’en avons aucun besoin. » D’autant plus que le parcours parfait n’est nullement assuré pour aucune des deux équipes. « Servette a une équipe solide, qui plus est meilleure défense du championnat. Mais elle a aussi connu beaucoup de passages à vide, comme le match nul à domicile face au FC Chiasso [ndlr, 1-1 lors de la 19e journée] », lâche encore l’entraîneur rouge et noir. Mais l’autopsie révèle toutefois de grandes qualités; les Grenat ont, dans leur escarcelle, de grandes armes. « Offensivement, elle a du talent et de la personnalité », concède Michel Decastel. À commencer par Mychell Chagas, transfuge du FC Rapperswil-Jona et auteur de 10 buts en 18 matches joués cette saison. Mais il n’est pas le seul; avec Sébastien Wüthrich, Miroslav Stevanovic ou encore Steven Lang, le Servette FC a des atouts de grande qualité. « Ils ont aussi de grands remplaçants, à l’image de Willie qui revient de suspension ou encore Alexandre Alphonse. Devant il y a du matériel [rires] – convient encore Decastel – Nous devrons gagner les duels et nous gagnerons le match. »

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Neuchâtel Xamax au grand complet

Neuchâtel Xamax FCS pourra compter sur l’ensemble de ses joueurs lundi soir, sauf blessures d’ultime minute. Personne n’est par ailleurs suspendu. Mais six d’entre eux sont à risque (à leur troisième carton jaune de la saison). C’est le cas de Laurent Walthert, Igor Djuric, Pietro Di Nardo, Max Veloso, Raphaël Nuzzolo et Thibault Corbaz. « Il faudra faire attention mais nous n’y pensons pas vraiment à l’heure actuelle », lâche ce dernier. D’autant plus que l’affrontement face au Servette FC n’aura rien d’un parcours de santé, mais aura tout d’un match nerveux et intensif. « Ça a été le cas à Genève, il y a de fortes chances que ce soit la même chose ici. Ce sera intense et agressif sur les duels, d’autant plus que Servette jouera avec énormément de pression. À nous de jouer avec la juste attention », continue le numéro 7 xamaxien. L’acharnement sera de mise, le succès à rude épreuve. « La Super League est dure, mais la Challenge League aussi », plaisante alors Michel Decastel. Voilà tout lorsque les deux équipes les plus régulières du championnat prennent la belle pour défendre un enjeu aussi important qu’une promotion dans l’élite.

« La ville a besoin d’une équipe en Super League, mais tout le monde doit y mettre du sien »

Michel Decastel, entraîneur de Neuchâtel Xamax FCS

Du côté des tribunes, les attentes sont aussi élevées pour l’organisation. Aussi car 200 supporters genevois sont attendus dans le secteur visiteur de la Maladière. À cela s’ajoute également une très bonne donne pour la billetterie. « Les mouvements sont très vifs à quatre jours du match », précise Raphaèle Tschoumy, responsable de la communication du club. Est-ce dès lors, le bon jour pour faire mieux que les 6’235 spectateurs de la Praille (record de la saison en Challenge League) lors du dernier derby romand le 4 décembre dernier ? Michel Decastel l’espère: « Il nous faut du public à la Maladière, Jouer devant un peu plus de 2’000 personnes lors de la reprise [ndlr, face au FC Aarau samedi dernier] est un peu décevant – lâche-t-il avant de conclure – La ville a besoin d’une équipe en Super League, mais tout le monde doit y mettre du sien. »