Neuchâtel Xamax perd le duel des leaders (0-1)

Raphaël Nuzzolo, déçu en fin de match. En arrière-plan, Liridon Mulaj. © Oreste Di Cristino / leMultimedia.info

Les hommes de Michel Decastel ont été détrônés dans leur Maladière. Battus sur une réussite de Miguel Castroman (71e), les Xamaxiens n’ont jamais réussi à rendre leur jeu dangereux du côté du jeune Serbe Đorđe Nikolić, prêté par le FC Bâle. Averse au risque pour une bonne partie de la rencontre – 70 minutes – Neuchâtel Xamax est définitivement passé à côté de son choc au sommet, la Challenge League étant désormais conduite par le FC Schaffhouse, encore invaincu (15 points en cinq rencontres). Revivre également la rencontre en 100 images.

Une soirée pluvieuse à Neuchâtel, terne, morne, malgré un public dense (4’622 spectateurs). Pourtant pensée en véritable combat des leaders, la rencontre a rapidement tourné à l’attentisme, de part et d’autre. Une rencontre où la tactique a prévalu sur le reste, Schaffhouse réinventant un jeu tombé toujours plus dans la désuétude du football moderne. Mais vraiment efficace, pratique et presque infaillible, quand il se veut réfléchi avec le métier et l’expérience. Habituée à une mise en place dynamique sur le terrain – formée d’un 3-1-4-2 énergique où la faible résistance à l’arrière traduit les opportunités nombreuses à l’avant –, la paire d’entraîneurs formée par les frères Yakin a su innover à l’heure de fouler le synthétique de la Maladière en avant-match de la cinquième journée de Challenge League. Le tacticien que Murat a toujours été n’a pas froissé une réputation longue de plus de dix ans au plus haut niveau en Super League; au contraire, il l’alimente de jour en jour et la teste parfois même. Comme ce vendredi soir à Neuchâtel, où l’audace a surtout prévalu sur le génie tactique. Hélios Sessolo incertain, Jean-Pierre Rhyner blessé et Christian Zock parti pour Sion dans le courant de la semaine, l’effectif du nord de la Suisse a notamment connu quelques remous dans sa préparation. Mais aux grandes équipes – du moins celles postulant à juste titre à la promotion finale en Super League –, ses grands remèdes. Investis d’entrée de match, Luca Tranquilli au soutien du transfuge turc du Boluspor, Tunahan Cicek et André Luis Neitzke prenant place dans une large défense à cinq, le FC Schaffhouse a également su démontrer ne pas dépendre de ses meilleures individualités. Et ce n’est pas rien.

« On s’attendait à un 5-3-2, pas à un 5-4-1 »

Michel Decastel, entraîneur de Neuchâtel Xamax FCS

Quoi qu’il en soit, le rythme de la rencontre est donné. Calme, relativement peu animé. Et Schaffhouse se préserve; à neuf joueurs derrière, difficile d’approcher la cage de Đorđe Nikolić. C’est ici que la structure du jeu est réfléchie par le tacticien Murat. La base du jeu concentre indubitablement une attention particulière sur une base défensive forte et réactive. De plus, Schaffhouse sait priver l’adversaire du ballon, son atout le plus fort. Mais les hommes des frères Yakin se réservent également dans la transition, où la précipitation est souvent mauvaise conseillère. Jouant relativement peu sur les longs ballons, le jeu n’en ressort que plus étudié, mêlant défense robuste et pressing actif. Le jeu est fluide et nul doute que Schaffhouse joue juste alors qu’en face, souvent, Xamax reste statique et peu inspiré. « En première mi-temps, nous avons bien fait tourner le ballon, nous avons été patients. Mais fallait bien accélérer quelques fois – lâche Michel Decastel en fin de match avant de poursuivre – Nous n’avons pas eu une bonne maîtrise technique aujourd’hui, et c’est tout. Nous nous attendions à un 5-3-2 de la part de Schaffhouse et nous nous retrouvons avec un 5-4-1. À partir de là, difficile de les bouger. Il fallait surtout ne pas prendre le premier but. » Alors à mesure que les minutes s’allongent, un constat: celui de l’impuissance, même si Neuchâtel Xamax avait ses opportunités, faibles mais réelles. D’autre part, dans les premières 45 minutes de jeu, l’on retiendra uniquement quelques sursauts, principalement côté Schaffhouse; d’abord un tir hors cadre de Castroman dans le premier quart d’heure (11e), puis une accélération en contre conclue sur le poteau par Bujar Lika (25e). S’en est suivie une nouvelle tentative de Bunjaku à la demi-heure (30e) mais rien de bien alarmant pour Laurent Walthert, toisant l’ensemble d’une période dont la tournure sombrait toujours plus dans une platitude déconcertante.

Quand tout va mal…

À la reprise, Michel Decastel eut bien tenté de raviver – ou plutôt d’allumer – la flamme mais Xamax a pêché là où il réussit généralement. De nature patients, les hommes de Michel Decastel sont souvent les premiers à faire tomber l’adversaire, de par une agilité certaine, une rapidité croissante et une coordination (quasi) parfaite entre les joueurs. Et pourtant, comme freinés par un enjeu oublié au fil des minutes, il n’en fut plus rien ce vendredi soir, ou presque. « Gaëtan [Karlen] est revenu de 15 jours d’absence et ce n’est pas le Gaëtan que l’on a connu. Il a perdu tous ses duels – démarre l’entraîneur xamaxien en zone mixte avant de continuer – Il y a des jours comme ça, où ça ne veut pas. Les coups de pied arrêtés n’ont également pas bien été tirés, du tout [ndlr, comme ce coup-franc galvaudé par Nuzzolo à la 64e]. Certaines combinaisons à deux que nous faisons alors que nous ne les avons pas testées. Nous lançons le ballon devant sans comprendre que leurs défenseurs mesurent tous 1,95m. Nous ne réfléchissons pas assez à cela. »

« Perdre trois points à la maison sur un but aussi bête »

Michel Decastel, entraîneur de Neuchâtel Xamax FCS

Puis, il y eut – comme une fatalité inéluctable dans ces cas-là – un ballon perdu bêtement au milieu de terrain, une récupération adverse, une défense mal positionnée, surprise, engourdie… et un but, aussi glaçant qu’évitable (71e). « C’est un but bête », résumera même Michel Decastel, marqué par la première défaite de la saison, à domicile et face au co-leader du championnat: « Il fallait perdre un jour et nous perdons aujourd’hui. C’est dommage de perdre trois points à la maison de cette manière; au moins, le nul nous aurait suffit », confirme-t-il ensuite. Et pourtant, ce ne fut pas faute d’avoir tenté; en seconde mi-temps, bien qu’encore un brin trop passif, la montée de Raphaël Nuzzolo aux côtés de Gaëtan Karlen dans une attaque à deux témoignait d’une première prise de risque dans la rencontre, lors de laquelle tant d’un côté comme de l’autre, la méfiance stratégique prévalait sur un excès de zèle libératoire. Plus incisif dans la seconde fraction, Xamax a par ailleurs eu quelques occasions d’ouvrir le compteur, aussi grâce à l’entrée de Max Veloso à l’heure de jeu (66e), apportant sensiblement plus de profondeur au jeu neuchâtelois. Mais rien n’y fait; la qualité technique de Schaffhouse et ses larges possibilités tactiques en font sans aucun doute le club le plus dangereux du championnat, et le plus imprévisible. « Nous aurions pu égaliser, notamment sur la superbe occasion de Thibault [Corbaz, 88e]. Schaffhouse est une équipe très solide et ils marquent sur leur seule occasion de la seconde mi-temps. Maintenant faudra aller chercher des points à l’extérieur pour rattraper le retard », constate à nouveau l’entraîneur rouge et noir. Il y eut, en effet, dans le final – comme un signe implacable des possibilités manquées par Neuchâtel Xamax FCS tout au long du match – des actions très précises et tout aussi dangereuses qui auraient pu permettre aux Rouges et Noirs de rééquilibrer le compteur. D’abord sur une reprise de volée (manquée) de Raphaël Nuzzolo (85e), puis sur ce qui s’est apparentée comme la meilleure occasion de but de la rencontre pour les deux équipes pour Thibault Corbaz (88e), qui s’est finalement heurté à la bravoure du portier Nikolić. Un quart d’heure de rébellion après l’ouverture du score mais ce fut tout. Ce fut peu pour prétendre débusquer Schaffhouse.

Thibault Corbaz: « Ça aurait été sévère de siffler pénalty »

Pour Michel Decastel, cela ne fait aucun doute. « Pénalty ! », lance-t-il d’abord à l’endroit de Pascal Erlachner avant de se retourner furieux auprès du quatrième officiel, Marco Rothenfluh. À vrai dire, seules les images de télévision peuvent traduire une once de réalité. Mais pour le principal intéressé – atterré en pleine surface de réparation alors que l’on jouait les minutes additionnelles post-90e – Thibault Corbaz, la réponse est si peu éclatante qu’il faille se rendre à une honnête évidence: « Difficile à dire. Je me mets devant pour protéger le ballon et mon adversaire ne le joue pas forcément. Toutefois, je pense que ça aurait été sévère de siffler le pénalty », avoue-t-il en zone mixte au terme de la rencontre. Mais le même constat d’échec sur une rencontre vide en substance: « Ils étaient à cinq derrière et ils jouaient sur les contres. On l’a tout de suite remarqué; quand ils partaient, c’était toujours très dangereux. Mais c’était difficile de trouver la solution au sol; nous étions contraints de jouer des longs ballons mais il nous a manqué beaucoup d’efficacité. Très peu d’occasions, mais rien que sur celle que j’ai eue (88e), nous aurions pu égaliser », confirme le numéro 7 xamaxien.

« Nous avons été patients, mais contraints de tenter des choses »

« Nous avons été patients mais nous avons aussi été contraints de tenter des choses. Sans doute qu’il manquait un peu de volonté. C’est un match difficile ce soir », aiguillonne encore Thibault Corbaz. Une réalité éclate pour autant: face à telle résistance, Neuchâtel Xamax a fini par jouer avec des craintes et un manque latent courage. Juste ? « Quand une équipe reste derrière, c’est difficile de trouver des solutions. Après, ils sont plus rentrés dans le match et ils ont eu leur phase de jeu. Néanmoins, ça reste une très bonne équipe. Il incombait à nous d’être plus percutants », conclut-il.

Hélios Sessolo: « Il reste encore 31 matches à jouer »

Naturellement souriant, l’ancien joueur du FC Lausanne-Sport Hélios Sessolo a le visage serein à son arrivée en zone mixte au stade de la Maladière. Fort de la confiance que lui porte Murat Yakin, Hélios s’est par ailleurs imposé comme une référence au devant de l’attaque du FC Schaffhouse, aux côtés de Tunahan Cicek (ex-Saint-Gall, Winterthur et Boluspor en Turquie). Remplaçant – encore jugé incertain hier soir – le jeune de 25 ans, formé à Young Boys est entré à la 72e minute de jeu, juste après la réussite de Miguel Castroman. « C’était un jeu d’échec au début. Mais nous avons été confiants de notre plan de jeu, tout en restant patients. Nous avons marqué sur l’une de nos occasions et c’est ce qu’il nous fallait », commente-t-il, pragmatique, avant de poursuivre: « Je ne pense pas que ce soit le match le plus important de la saison. Néanmoins, c’était un match primordial face à un adversaire qui joue la promotion comme nous. Et ce soir, nous avons fait notre job; nous avons réussi à marquer tout en restant solides défensivement. Les trois points sont venus avec de la réussite. Tant mieux. » Aussi, grâce au succès obtenu face au rival direct pour la promotion en Super League, à l’extérieur qui plus est, l’avantage comptable se traduit-il aussi par un avantage psychologique ? « C’est sûr que cela nous aide. Mais c’est un match parmi tant d’autres, il en reste encore 31. Nous allons prendre match après match et une chose est sûre, c’est que rien n’est encore joué », conclut-il.

Les faits de match:
Neuchâtel Xamax FCS v FC Schaffhouse, 0-1 (0-0)

Composition de Neuchâtel Xamax FCS:
Laurent Walthert ©, Mike Gomes, Mustafa Sejmenovic, Igor Djuric, Janick Kamber, Pietro Di Nardo (75e Samir Ramizi), Thibault Corbaz, Charles-André Doudin, Raphaël Nuzzolo, Geoffrey Tréand (79e Liridon Mulaj) et Gaëtan Karlen (66e Max Veloso). Entraîneur: Michel Decastel.

Composition du FC Schaffhouse:
Đorđe Nikolić, Noah Loosli, Nejc Mevlja, André Luis Neitzke ©, Imran Bunjaku, Paulo Menezes, Bujar Lika (77e Marko Dangubic), Miguel Castroman, Yassin Mikari, Luca Tranquilli (86e André Gonçalves), et Tunahan Cicek (72e Hélios Sessolo). Entraîneur: Murat Yakin.

Arbitres:
Pascal Erlachner. Assistants: Jan Köbeli, Benjamin Zürcher. 4e officiel: Marco Rothenfluh.

Buts: 71e Castroman (0-1).
Notes: Stade de la Maladière, Neuchâtel. 4'622 spectateurs.
Neuchâtel Xamax sans Sonny Escolano, Frederico Da Costa, Dilan Qela (blessés), Léo Farine, Safet Alic, Arbenit Xhemajli, Astor Kilezi et Frédéric Nimani (non convoqués). Schaffhouse sans Mateo Matic, Franck Grasseler, Karim Barry, Faruk Gül, Jean-Pierre Rhyner (blessés) et Asllan Demhasaj (non convoqué).