Destins croisés pour les Suisses à Athletissima

Salomé Kora, heureuse après la victoire de la Suisse au relai 4 x 100 mètres. © Oreste Di Cristino / leMultimedia.info

Les Suisses ont été présents à l’occasion du 42e meeting d’Athletissima jeudi soir à la Pontaise. À Lausanne, Sarah Atcho et Mujinga Kambundji se sont satisfaites de leur chrono face aux meilleurs coureuses mondiales aux 200 mètres, Selina Büchel a connu un baisse de régime aux 800 mètres, alors que l’espoir genevois Julien Wanders a été contraint d’abandonner aux 5000 mètres. Autre résultat, très encourageant, la victoire et le record national détrôné au 4 x 100 mètres féminin en bout de meeting.

Au-delà des épreuves du 400 mètres haies, lors desquelles tant Lea Sprunger (2e) que Kariem Hussein (1er) ont dominé leur performance physique pour imposer leur meilleur temps sur la piste du Stade de la Pontaise, c’est sur 200 mètres que Sarah Atcho et Mujinga Kambundji ont acté pour une course ressentie satisfaisante pour les deux coureuses nationales. Frêle et en quête d’expérience, la jeune athlète de 22 ans partait du couloir numéro 2 sur le tapis cendré des Plaines-du-Loup pour une épreuve qu’elle souhaitait utile sur le plan personnel. Et malgré sa dernière place, à 23”04 secondes, l’expérience fut riche pour la cadette de la lignée, notamment au contact d’un public qu’elle admire et qui le lui rend bien: « C’était extraordinaire. En arrivant sur la piste, j’entendais mon nom partout. Il n’y a eu que du positif et c’était vraiment très agréable de courir ici. Le public était fantastique. Je ne peux rien demander de plus; la course n’était pas la meilleure mais j’ai recouru encore une fois en dessous du seuil qualificatif pour les championnats du monde, donc c’était une course optimale », lâche-t-elle en fin de course en zone mixte. En réalité, peu importe le classement, c’est la performance chiffrée qui esquisse le sourire sur le visage de la jeune Lausannoise car, rapide et concentrée, elle est parvenue à descendre à nouveau – après ses 22”92 secondes à Bulle – au-dessous des 23”10 secondes limites pour la qualification aux championnats du monde de Londres. Et ce n’est pas anecdotique:  « J’ai exécuté la course que je souhaitais. Recourir les limites qualificatives n’était pas anecdotique ce soir. Cela prouve que ce n’était pas un coup de chance dû à de très bonnes conditions. J’ai vraiment réussi à prouver mes compétences ce soir et j’en suis satisfaite. »

Courir face à des championnes mondiales

« Courir face à une championne du monde et des filles aussi rapides [ndlr, à l’image de Dafne Schippers, vice-championne olympique à Rio, gagnante de la Diamond League en 2016 et championne du monde 2015 à Pékin], c’est incroyable. Cela ne m’est pas arrivé souvent. Se concentrer ce soir, n’était pas aisé mais j’y suis parvenue tout de même. À Londres, ce seront ces conditions-ci donc il me faut m’y habituer; savoir courir indépendamment du couloir dans lequel je serai alignée », confie Sarah Atcho au terme de ses 200 mètres. Certes, courir à Londres sera une autre expérience, une autre occasion de se frotter au gratin de la discipline. Mais pour la jeune athlète de 22 ans, fêtés au début du mois de juin, un autre rendez-vous s’annonce imminent et lors duquel les attentes seront sensiblement plus élevées qu’à Londres. « Je concourrai les championnats d’Europe M23 prochainement [ndlr, à Bydgoszcz en Pologne du 13 au 16 juillet 2017] et là-bas, mon objectif est définitivement d’atteindre les finales et d’y décrocher un podium. Ce serait super ! », conclut-elle à la Pontaise.

« Une chose, j’adore vraiment cette ambiance ici ! »

Mujinga Kambundji

Il est pourtant une autre coureuse helvète qui s’est alignée sur les 200 mètres à Athletissima avec un temps honorable – même si insuffisant pour se jouer les premières places. Mujinga Kambundji a terminé au sixième rang de la course à la Pontaise mais en y enregistrant son meilleur chrono de la saison (22”82), améliorant sa marque de 21 centièmes: « Je me sens très bien. L’année dernière, ma course ici n’était pas optimale et je suis heureuse d’avoir améliorer ma performance ce soir. J’espérais courir en-dessous des 23 secondes et j’y suis parvenue. Néanmoins, je souhaite pouvoir courir plus vite pour les prochaines courses », confie la Bernoise d’Ütendorf avant de préciser: « Une chose, j’adore vraiment cette ambiance ici. Et cela aide beaucoup ! » L’athlète a néanmoins, depuis le début de l’année, accompli des temps très favorables, notamment à Zofingue, le 3 juin dernier, où elle a directement réussi à trouver ses minimas qualificatifs pour les championnats du monde de Londres en août sur la distance reine de 100 mètres (11”26 secondes) avant de réaliser un temps très rapide sur 200 mètres (22”87 secondes), portée pourtant par un vent favorable à +2,3 m/s. Nul doute que ce jeudi soir, à Athletissima, la confrontation avec les meilleures l’a contrainte à l’amélioration sans bavure de sa marque saisonnière, roulant très nettement en dessous de la barre des 23 secondes.

Le relai suisse supersonique à la Pontaise

Dernière épreuve de la soirée lausannoise, le relai 4 x 100 mètres féminin n’a pas manqué d’apporter son lot de spectacle et de surprises l’accompagnant. Le quatuor helvétique, composé d’Ajla Del Ponte, Sarah Atcho, Salomé Kora et Mujinga Kambundji, a littéralement pulvérisé le record national de la discipline – avec 42”53 secondes – en place depuis le 31 décembre 1999. Les Suissesses l’ont en effet amélioré de 34 centièmes; une performance magistrale en clôture de la 42e édition d’Athletissima: « Ce soir était une très grande et très belle opportunité de parvenir à des belles performances et nous l’avons fait ! – lâche Ajla Del Ponte au terme de la course avant de poursuivre – Nous venons de battre le record national et c’est incroyable. Je pense que nous étions toutes prêtes à accomplir quelque chose de spécial et non seulement nous avons bien couru, mais les passages de témoins ont été parfaits. Nous jouons désormais un rôle important et notre prochain objectif sera clairement de se qualifier pour les championnats du monde et pourquoi pas battre à nouveau le record national une nouvelle fois. » Un défi ambitieux porteur de grands espoirs dans l’athlétisme suisse.

Selina Büchel dans le dur sur 800 mètres

En l’absence de Caster Semenya, championne olympique en titre et détentrice de la meilleure performance mondiale de l’année (1’56”61 minute) et de sa médaillée de bronze, Margaret Wambui, la discipline des 800 mètres n’a pas perdu de son charme. D’abord parce que la troisième composante du podium de Rio, la Francine Niyonsaba, était bien présente à Lausanne jeudi soir. Puis, parce que s’y jouait immanquablement, comme à chaque meeting, la meilleure performance mondiale de l’année; une occasion pour la Burundaise de ravir la distinction à la sud-Africaine. Il s’en est fallu de peu mais la performance de Semenya, enregistrée à Doha le 4 mai dernier, a tenu bon à Lausanne. Ce qui n’a toutefois pas empêcher Niyonsaba de marquer le coup en enregistrant sa meilleure performance personnelle cette saison en dominant les débats en 1’56”82 minute, soit plus d’une seconde d’amélioration. Un résultat satisfaisant à l’approche des mondiaux de Londres: « Je suis extrêmement contente. C’était un groupe de coureuses très fort et je crois pouvoir pousser mon corps jusqu’à ce qu’il me permette d’accomplir de bons résultats », débute la médaillée d’argent à Rio avant de poursuivre: « Je ne concoure pas avec les autres, je concoure avec moi-même, en essayant de toujours donner de mon mieux, même si je sais que Caster [Semenya] sera à Londres et que sa réputation n’est plus à faire. Mais je reste confiante. »

Face à cette concurrence, la course de Selina Büchel s’est révélée compliquée. La Saint-Galloise de 25 ans n’est pas parvenue à améliorer ses chronos enregistrés lors des précédents meetings, à Eugène (1’59”46) et à Stockholm (1’59”66), bouclant ses deux tours de piste en 1’59”77 minute. Une dernière place – sans compter l’abandon de Ilona Usovich – qui frustre quelque peu la Suissesse. « C’était une course très difficile et le premier tour était relativement rapide. J’ai eu un petit problème d’énergie et de niveau ce soir et je ne pense pas que ce soit ma meilleure course tactique. Je vais aller maintenant aux championnats suisses de Bellinzone et espérer réaliser le meilleur résultat possible. » Sans compter Londres, bien évidemment !

Julien Wanders forcé d’abandonner

L’espoir genevois de 21 ans a été contraint de quitter la piste à deux tours de la fin lors de l’épreuve des 5000 mètres. En cause, un problème de respiration: « Mes jambes n’étaient pas le problème ce soir, je me sentais bien. Le problème était plutôt concentré sur ma respiration qui s’est bloquée à un certain moment et cela m’a empêché de continuer la course. Mais je suis confiant, je parviendrai à résoudre ce problème et je ferai mieux tout au long de la saison », confie-t-il à la presse après son abandon. La discipline a été remportée ce jeudi soir par l’Éthiopien Muktar Edris en 12’55”23 minutes, décrochant là la meilleure performance mondiale de l’année – déclassant Mo Farah de plus de cinq secondes – et le record du stade enregistré depuis 2011 (12’59”13) par le Kényan Vincent Kiprop Chepkok. Du grand art à la 42e édition du meeting de Lausanne.