En cette soirée du 1er juillet, c’est la formation belge Soulwax qui occupe la première partie de la soirée à l’auditorium Stravinsky. L’occasion de pouvoir écouter la formation après une dizaine d’années d’absence des studios d’enregistrement. Leur nouvelle mouture, From Deewee, percutante et déjantée, confirme son statut en version live. Voir également les 50 images exclusives du passage de Soulwax au 51e Montreux Jazz Festival.
À vingt heures précise, c’est dans une mise en scène quelque peu déconcertante que le groupe belge s’installe sur la scène de l’Auditorium Stravinsky. On remarque du premier coup d’œil les trois batteries installées: deux aux extrémités de l’espace scénique et l’une au centre, surélevée. Contenues dans des armatures formant des cubes, on se doute déjà que les boules quiès ne seront pas inutiles face à la puissance des trois monstres blancs. Au centre de la scène, les deux énormes tables de mixages, dans un style très retro, se font face.
Une scène transcendantale
C’est donc une installation sans fioriture et à la symétrie prononcée, métallique et froide que propose la formation qui se joue du mélange entre le rock et l’électro. Comme pour s’accorder à la belle affiche du festival créée par Malika Favre, le dress code du groupe est dans le thème black and white. Chemises blanches et pantalons noirs, les belges se fondent dans cet espace clinique et épuré qu’ils vont transcender. La machine Soulwax est lancée. Pendant une heure, le son vrombissant des batteries couplé au style nettement plus club va faire danser les festivaliers. La proposition éléctro-rock s’avère nerveuse et efficace. Les mélanges entre drums vrombissants, lourds et compressés et les passages très disco sont savamment équilibrés. Il en résulte un réel enthousiasme de la part du public, qui prend plaisir à être surpris par ces arrangements bizarres qui percutent les sens. Le spectateur est envoyé dans une autre dimension et se laisse entraîner par la machine infernale Soulwax. On se demande d’ailleurs comment tout peut fonctionner avec une telle harmonie. Il faut dire que le groupe belge se compose de sept membres ; les frères Dewaele Stephen et David ainsi que Stefaan Van Leuven sont au mixage. Ils sont accompagné du trio de batterie complètement fou composé de Iggor Cavalera, Victoria Smith et Blake Davies, le tout soutenu par Laima Leyton Cavalera en chœur et aux percussions synthétiques. Loin de poser une difficulté de surreprésentation numéraire, on trouve une vraie complicité sur scène ainsi qu’une maîtrise des registres, tant lorsqu’il s’agit des solos de batteries que lorsque la musique bascule dans l’électro.
Drums and Fun
Sur la scène, on retrouve également la discrète présence d’un buste métallique – qui n’est pas par ailleurs sans rappeler le robot du film Metropolis – issu de la couverture du dernier album, le bien nommé From Deewee. Vraie prouesse technique, l’album est enregistré en une seule prise dans le studio du groupe en terre flamande. Cet album vient combler une période de dix ans d’attente pendant laquelle le groupe n’a pas sorti d’album studio. Il est d’ailleurs à noter que le précédent album, dont le nom est très certainement l’un des plus longs noms d’album que l’on puisse imaginer, était une compilation des remix élaborés par le groupe. Tentant de trainer l’oreille autour de celui de Gravity’s Rainbow des Klaxon ainsi que celui de Lovelight de Robbie Williams afin de constater l’inventivité du groupe. Si par ailleurs, adepte de jeux vidéo, le groupe possède une station radio à son nom dans le jeu GTA V ! On l’aura compris, l’hybridité du groupe et sa capacité à se réinventer d’année en année, même après une longue période d’absence, prouve qu’il est bien capable d’offrir une musique singulière qui fonctionne à merveille, tant en studio que sur scène. Ce soir là, dans l’Auditorium Stravinski bien rempli, les morceaux s’enchaînent et le buste de From Deewee, comme une boule à facette, est en constante rotation. À l’image des spectateurs au son de Is it Always Binary, de la bombe Transient Program for Drums and Machinery ou encore Here Come the Men in Suits, il perd le sens de l’orientation, tourne de plus en plus vite. Il est ailleurs. Par l’inventivité et l’expérimentation dont le groupe fait preuve depuis bien des années, il se devait d’être à la hauteur de son nouvel album, ce qui n’est pas forcément le cas en live. Pari réussi pour Soulwax qui nous a transportés quelque part, entre le Stravinski et la Lune, et on ne s’en remet toujours pas.