Marina Rollman, le manifeste du stand-up

Marina Rollman sur scène, micro à la main. © Oreste Di Cristino / leMultimedia.info

De retour sur scène après une pause de mi-2016 à janvier 2017, Marina Rollman dit avoir mûri et changé de cap. « Créativement parlant, j’étais asséchée » confie-t-elle. Désormais, son nouveau spectacle était en rodage à l’occasion du festival Morges-sous-rire.

Humoriste, plume, femme de convictions, voici Marina Rollman. Lorsqu’elle s’exprime, c’est avec passion car elle a tant à dire qu’elle parle à toute vitesse. Elle consomme à haute dose du stand-up, ce genre américain qui se veut à la croisée du confessionnal et de la tribune philosophico-politique. Rollman en est experte et malgré quelques découragements d’une carrière qui décolle mal, elle n’a pas voulu lâcher le métier.

« Je devais réorienter la manière de pratiquer mon métier »

« La pause de l’été dernier, c’est parce que je saturais. J’écrivais beaucoup de chroniques pour la radio et de webséries. Créativement parlant, j’étais asséchée. Mais comme j’aime beaucoup ce métier, j’ai repris », déclare Marina Rollman. Humoriste, c’est un métier dont on ne sait jamais de quoi demain sera fait. Pour Rollman, la radio a été une priorité car c’est la garantie d’un revenu régulier. Cependant, elle s’est remise en question et a décidé de pratiquer le métier comme il lui plaît le plus : « Je me suis dit qu’il ne fallait plus me soumettre au rythme des chroniques à la radio, car pour ceux qui en font tous les jours, on ne réalise pas la quantité de texte qu’ils doivent écrire. Or ça ne m’allait pas. Depuis janvier, je me concentre sur la scène. Et le pari me semble gagné car je vais certainement signer avec Olympia Production pour jouer toutes les semaines à Paris. Je ne lâche pas complètement la radio suisse et je jouerai aussi un peu ici, notamment à Vevey et Carouge. Mais j’ai un intérêt pour la France car le faible prix des billets permet à des jeunes de venir me voir et je suis à moitié Française. Alors que je serais beaucoup mieux payée en Suisse. »

Surtout, elle a changé de style. « Sur scène, j’ai changé physiquement. Je ne porte plus de lunettes car je trouvais que choisir un look débile pour être marrante comme je le faisais n’était pas nécessaire pour faire de la comédie. Le pari est plus intéressant si l’on reste comme on est. Et sur mes blagues, j’en avais assez de faire rire en disant simplement des mots comme « sodomie ». Je voulais devenir adulte et ne pas tirer sur des ficelles « faciles ». » Son atout, c’est sa plume. « Je crois que j’écris bien et d’ailleurs je ne veux pas de co-auteur car je considère que c’est mon boulot. C’est comme ça que je me sens légitime », déclare-t-elle. Son intervention au Forum des 100 en est un bon exemple.

Marina Rollman au Forum des 100

Les femmes dans le stand-up

Quid de la minorité de femmes dans le stand-up alors qu’il n’y en a pas au théâtre ? Marina Rollman, qui a été influencée en regardant Maria Bamford et Sarah Silverman toutes très célèbres aux États-Unis répond : « Je pense que la vraie raison, c’est que les femmes se sentent moins légitimes. 99% des comiques sont mauvais et ne disent pas des choses intéressantes. Simplement, les hommes ne se posent la question « Je dois dire ça ou pas ? ». Les femmes, je crois, s’interrogent beaucoup plus. Donc osent peu monter sur scène. À ce sujet, Amy Schumer a fait un super sketch sur la manière dont les femmes s’excusent constamment dans le milieu professionnel. Et il faut se rendre compte du nombre de fois où l’on voit des femmes en plateau télé se faire recadrer par des hommes ou encore des commentaires d’hommes qui me disent de la fermer sur Facebook. Tout cela est révélateur. »

L’humoriste de 28 ans, passée par divers métiers auparavant, s’est toujours sentie libre et disait dans Femina le devoir aux femmes de sa famille : « Elles ont toutes été très ouvertes et hyper encourageantes, quoi que j’entreprenne. Mes grands-mères et ma mère sont fortes, créatives, indépendantes. Elles ont toutes orchestré leur vie. Aucune ne s’est tue, aucune n’a mis le poing dans la poche sans rien dire. »

Son spectacle, le pari de l’humoriste-citoyenne

Son show est en évolution. C’est un condensé des questions de société à se poser en 2017, par exemple les tendances comme le crossfit ou la surconsommation de viande. « La viande, c’est trop bon et c’est notre seule excuse pour continuer à en manger » commente-t-elle. Avec, une bonne pointe d’humour et d’autodérision. Exemple : « Qu’est-ce qu’on peut proposer pour la consommation locale à Paris ? Des mégots ? » Marina dit souvent que le stand-up vient de la banlieue en France alors qu’en Suisse ce sont plutôt des jeunes bourgeois qui en font. D’ailleurs, elle se prononce à son sujet : « Je pense que j’ai quelque chose de bourgeois et intello. Sur scène, je souhaite apporter du fond, de l’élégance et j’espère quelques convictions qui résonnent ». Pas de doute, cette femme-là ne prend pas l’humour à la légère. Davantage comme une arme de réflexion.

Biographie:

9 août 1988 : naissance à Genève.

2015 : Vainqueur du prix François Silvant, première partie de Gad Elmaleh en anglais.

2015 à 2017 : Bipèdes (actrice) / Carac Attack (auteure et actrice RTS) / La vie sur Vénus (co-auteure RTS) / Les Beaux Parleurs (chroniqueuse RTS) / Vertigo (chroniqueuse RTS).

2017 : Marraine de Polycomedy, formation en storytelling de l’école Polycom.