Ronan One Man Band envoûte et rassemble au Blues Rules Crissier Festival

Dans la programmation d’un festival, le set de 21h30 est dangereux, il ne faut pas manquer le coche. Toujours au Blues Rules Festival Crissier, ce créneau horaire était attribué, ce samedi 20 mai, à Ronan One Man Band. Homme à tout faire, le jeune Breton, accompagné de sa guitare et de sa caisse, nous a offert une prestation en finesse, singulière et puissante. Retour sur sa première contribution à Crissier qui est également sa première prestation en Suisse.

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Lorsque c’est à son tour de s’approprier la scène du Blues Rules, Ronan succède à la légende et fils de légende Robert Kimbrough Sr. Cela tombe bien puisque lui aussi est un peu originaire du Mississippi. Son Mississippi natal, la Bretagne : « En Bretagne, on a une grosse culture musicale. Ça va aussi bien de la musique celtique en passant par le hard-rock et au métal. Il y a vraiment une culture musicale et de la fête. Comme tout le monde aime bien danser moi je me suis mis dans le Boogy, ça paraît naturel là-bas ».

Une voix de fer enveloppée de velours

On pourrait presque croire à un accident mais dès les premières minutes du concert, sa voix, chauffée au whisky, hypnotise le public. Hybride, Ronan One Man Band nous propose un numéro d’équilibriste hors pair puisqu’il manie guitare et batterie tout en chantant. Lorsqu’on le croise en dehors de la scène, ce grand bonhomme à la voix rauque se révèle humble et réservé, un peu à l’image du logo du Band. Ourson dans la vie et féroce bête de scène en live: « En arrivant, j’étais stressé comme tout, puis en m’installant sur ma chaise devant les drums et la guitare en main, c’est parti et il n’y a que des amis en face, c’est que du plaisir », nous dit-il au sortir de scène. Charismatique, il magnétise son public et impose une présence scénique. Inutile de vouloir lui arracher son secret, il vous répondra qu’il ne sait pas comment il instaure un tel rapport avec son public. Il en va de même pour son hybridité sur scène, quitte à se démultiplier : « Je ne sais pas. Je ne suis pas tout seul: j’ai mon batteur et mon guitariste sur scène [ndlr, dit-il en montrant ses pieds et ses mains]. Le public porte. Une fois sur scène, ce n’est plus moi. C’est Ronan One Man Band et donc je suis là pour envoyer et faire le show. J’essaie de faire mon possible pour que les gens soient heureux et qu’ils dansent un petit peu. J’adore voir les gens danser ». C’est un carton plein pour Ronan, très sollicité par le public et beaucoup applaudi au terme de son set. D’autant plus qu’il s’agissait, pour lui, d’une première en dehors du sol français: « Le show était très court mais le public était super. Un très bon concert. Je n’ai pas vraiment pu profiter de mon séjour en Suisse puisque j’ai seulement navigué entre l’hôtel et le festival. Mais je reviendrai visiter un de ces quatre ».

Une notoriété qui se gagne lentement, mais sûrement

Ce n’est pas parce qu’il est casanier que Ronan ne suit pas les activités outre territoire français : « Ça fait quelques temps que je connais le Blues Rules grâce à Vincent [ndlr, Delsupexhe, le cofondateur du festival, aux côtés de Thomas Lécuyer] qui fait des “one string” et comme je construis des “Cigarbox Guitars”, on s’est rencontré comme ça. Je connais donc le festival depuis deux, trois ans. » D’autant plus qu’il est très sollicité, notamment par de nombreux artistes de prestiges comme James Legg ou encore Left Lane Cruiser afin d’assurer leur première partie: « Ça fait huit ans que je fais ça et puis au fur et à mesure, mon réseau s’agrandit, à force de faire des premières parties et de jouer un peu partout. Ça fonctionne pas mal au bouche à oreille ». Le Breton apprécie de pouvoir échanger avec les artistes, et notamment ici en Suisse : « La force de ce festival, c’est de proposer des grosses têtes d’affiches, par exemple Robert Kimbrough, comme des gens moins connu du public et de mélanger le tout. Ici, personne ne se prend la tête, on est tous au même niveau. On se retrouve autour d’un verre pour discuter et en sortant de scène on s’applaudit, on se dit bravo. On échange parce qu’on fait tous la même musique. Cela nous unit, que l’on soit Américain, Suisse, Belge ou Français ». En France, Ronan enchaîne les concerts dans le milieu du blues mais il sait également tirer son épingle du jeu en dehors des manifestations dédiées à celui-ci : « Je fais aussi bien des festivals purement blues que des festivals généralistes ou encore des petits bars. Partout où l’on m’appelle, j’y vais. C’est mon boulot, je propage la bonne parole du blues. Peu importe l’endroit, j’aime retrouver le public. J’aime cette proximité. Tant que je peux m’exprimer. J’adore ». Du côté de ses projets personnels, les fans de la première heure, tout comme les initiés, devraient être rassasiés. Ronan, qui aime prendre son temps, prévoit de sortir son troisième album d’ici le mois de septembre. En attendant, il sera en tournée dans toute la France et couvrira de nombreux festivals pendant l’été. Espérons qu’il revienne chez ses voisins pour nous livrer un show dont lui seul a le secret.

La réinterprétation comme l’âme du blues

Le blues de Ronan se compose d’un savant mélange entre ses compositions personnelles et des reprises qu’il retravaille librement : « J’aime bien mélanger des reprises et mes compositions. J’essaie de les réadapter à ma façon de faire. Par exemple, si je reprends du Muddy Waters, je me distancie de lui. Je le joue et le chante à ma façon. Ça vaut aussi bien pour du Howlin’Wolf, que du Bukka White. J’aime bien les mélanger avec mes compositions pour avoir quelque chose qui se tient ». C’est ce qui fait perdurer une certaine conception de cette musique, où les nouvelles générations affectionnent la tradition du clin d’œil à leurs aînés : « On trouve beaucoup de reprises dans l’univers blues, c’est une pratique très commune. Robert Johnson a repris Son House, Eric Clapton a repris Robert Johnson… De plus, les gens adorent que l’on reprenne des vieux classiques qu’on retape un petit peu. Ça fait partie de cette musique », conclut-il à notre micro.

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