Le FC Lausanne-Sport, domine, subit, égalise, puis perd son match face à Young Boys (1-2). Une situation qui pourrait même servir de canevas désormais pour Fabio Celestini, englué dans une série noire de six défaites d’affilée. Des défaites qui tombent encore et toujours en fin de rencontre ; une fatalité à laquelle Celestini ne peut sans doute « rien faire de plus ». Focus.
Fabio Celestini naviguait entre déni, dépit et fierté dimanche après-midi à l’heure où il se présente en conférence de presse d’après-match. Il faut dire que face aux Young Boys, il y avait bien de quoi se réjouir, mais l’ennui, puis la désillusion ont pris le dessus au coup de sifflet final. Bref, c’est bien là la sixième défaites consécutive, toutes subies dans le rond de quelques semaines. Aux portes de la Champions League il y a encore peu, le LS jouera désormais le maintien dans l’élite. Un cas de figure qui représente déjà le pire pour l’équipe qui menait solidement la barque romande en Super League jusqu’à la onzième journée. Pour Musa Araz, les mots prennent sens ; ils sont lourds : « On fait vraiment une très bonne première mi-temps. Mais c’est un cercle vicieux. Même quand on marque, on ne parvient pas à sauver le résultat. Il n’y a rien a dire de la qualité d’Hoarau mais c’est difficile d’en arriver là. ». Le discours est plus concis chez Nicolas Gétaz, qui persiste dans un pragmatisme révélateur : « C’est très frustrant. Nous avons été nettement meilleurs mais on voit que les matches se gagnent sur les 30 derniers mètres. À Hoarau, il n’est fallu que d’un mètre pour qu’il ne la mette au fond. C’est ce qu’il nous manque aujourd’hui. » Quoi qu’il en soit, le Lausanne-Sport vient de vivre dimanche après-midi un revers compliqué, émouvant et emprunt de solitude ; la victoire manque et la consolation du bon jeu ne semble même plus suffire. Les 5’040 spectateurs qui ont fait le déplacement au stade non plus. Simplement, à Lausanne, c’est la désolation, auquel l’entraîneur bernois Adi Hütter ajoute : « Nous avons été chanceux, Lausanne a mieux joué que nous. » Un euphémisme dans l’oreille de Lausannois déroutés, d’autant plus que Young Boys était privé de Yoric Ravet, Alain Rochat, Grégory Wuthrich, Denis Zakaria et Yuya Kubo, tous blessés. Pour la plupart, des titulaires indiscutables.
Quand l’ennui laisse place au dépit
Disons-le, pour une équipe qui se voulait de jouer les trouble-fêtes derrière les épaules d’un FC Bâle – qui accuse une avance extraordinaire sur ses poursuivants, +15 –, la réalité est désespérément plus maussade en cette fin d’année. Bien défendre et montrer la verve habituelle ne faisait pas des paroles du vice Jean-Yves Aymon un discours particulièrement novateur, sinon constant et fidèle aux attentes de Fabio Celestini. Toutefois, malgré une liste de blessés à rallonge, dans laquelle figurent aussi bien Xavier Margairaz que Jordan Lotomba – en plus de Carlos Blanco, Paolo Frascatore et Juan Esnaider – c’est une composition curieuse que Celestini a introduite sur la pelouse de la Pontaise dimanche après-midi. Si l’absence de Lotomba permet quelque peu de justifier une position excentrée de Musa Araz, l’“innovation” parvient plus du côté d’Alexandre Pasche, aligné en demi d’extérieur ; une position qui ne l’a pas tout-à-fait mis à l’honneur, jusqu’à son changement pour Nassim Ben Khalifa à la 76e minute. Mais rien de bien contestable au vu d’un jeu qui oppose pourtant autant de créativité à si peu de rentabilité. Car c’est bien Lausanne qui se porte dangereux dès la 9e minute par Kwang-Ryong Pak. Lancé en profondeur par Samuele Campo – qui s’est distingué par son agilité et sa technique remarquable – le Nord-Coréen parvient à éliminer Mvogo avant de buter sur Kevin Mbabu en position fort avantageuse. Là sera l’un des plus grands regrets pour le LS, incapable de trouver la voie des filets en première mi-temps, malgré une défense bernoise en perte de repères. Après quelques maladresses du gardien réserviste de l’équipe de Suisse, c’est bien Campo qui maintient Mvogo sous pression. Mais rien n’y fait dans cette première période qui ne se résume que par un peu de Lausanne sans trop d’YB. Autrement dit, ce fut morne, malgré une domination qui prit immanquablement le tournant lausannois ; le “n’importe quoi” primant du côté des hommes d’Adi Hütter pendant plus d’une heure. Mais au final, une équipe gagne. Pas la plus méritante. C’est aussi cela le football. À Lausanne, on ne changera peut-être pas ce qui fait coutume ces derniers temps. Face à une accumulation de fautes tactiques – cartons jaunes successifs à Leonardo Bertone et Sékou Sanogo – Lausanne écrase, les Young Boys ne réagissent que par à-coups, peu précis. Thorsten Schick tente bien une frappe à la 40e après avoir éliminé Gétaz mais la conclusion est trop faible pour faire exalter les supporters descendus de la capitale pour l’occasion. Face à une cristallisation du résultat, le rythme ralentit, même au-delà du thé. Ce ne sera pourtant qu’à la 55e minute que le tableau d’affichage réagit ; lancés par Mvogo, Miralem Sulejmani déborde côté gauche et centre efficacement pour Guillaume Hoarau, seul devant les six mètres, qui bat Kevin Martin. L’injustice serait d’autant plus grande à penser que le Français fasse la différence sur ce qui apparaît être son premier vrai ballon joué. À l’heure de jeu, le déni prend forme ; on continue de tenter mais on y arrive plus (ou moins pour le LS). Exceptions faite à Ben Khalifa qui crucifie le portier bernois des 25 mètres d’une frappe imparable (87e), à laquelle répond “tragiquement” et directement Hoarau (88e) d’une position avancée mais très désaxée. Pas de quoi altérer le potentiel de l’ancien Bleu. À 2-1, c’est sans doute le rire jaune des tribunes qui ont pris le dessus, momentanément, à l’ire, puis à la désillusion comme le démontre Musa Araz, interviewé en zone mixte en fin de rencontre : « Ce qui est le plus difficile à accepter, c’est l’ensemble des matches que l’on perd de cette manière. Six défaites comme cela, ça fait vraiment beaucoup. À chaque match, l’on ressort avec regrets et désolation dans le ventre. Chez nous, cela devient inexplicable. Mais à nous aussi d’aller chercher les raisons, peut-être hors du terrain. Parce que sur le terrain, il n’y a rien à redire. » C’est bien cela ; à Lausanne, on ne change pas, on se complait désormais à lâcher les matches en fin de partie.
Fabio Celestini ne peut pas « demander plus » à ses joueurs
Cinq buts pris dans le sillage de la 90e minute lors des quatre dernières confrontations (un contre YB, 88e, un contre Saint-Gall, 85e, deux contre Bâle, 91e et 92e et un contre Lucerne, 92e). Si on compte le but de Marco Schneuwly à la 79e, on pourrait même faire monter le chiffre à six. Puis, c’est la manière par laquelle le LS cède et concède. Immanquablement, les buts subis face à YB, Bâle et Lucerne proviennent moins de phases de contre-attaques désespérées – comme ce fut le cas à Saint-Gall – mais témoignent bien de retournements de situation particulièrement dramatiques ; passer de victoire à défaite en quelques secondes, c’est la mauvaise habitude que Lausanne perçoit désormais. Une fatalité compte tenu du jeu solide et brillant dont les hommes de Fabio Celestini ont fait preuve lors des 450 dernières minutes de jeu écoulées. Néanmoins, pour l’homme fort de Lausanne, il n’y a pourtant pas grand chose à faire : « Ici, le match se joue à de petits détails (ndlr, ici la longue remise en touche de Jan Lecjaks qui permit à Hoarau de reprendre l’avantage). Il faut garder le contenu, mais je ne peux pas demander de mieux jouer », affirme-t-il en conférence de presse d’après-match à la Pontaise. Coudoyé après la séance, il précise : « Il n’y a rien de spécial à redire : ils (ndlr, les Lausannois) ont fait un grand match. Je ne vois pas beaucoup d’équipes en Suisse qui produisent un aussi beau jeu. Je ne peux rien demander de plus. On peut toujours retravailler, c’est ce que l’on va faire. Certainement, on ne va rien lâcher pour les deux prochains matches (ndlr, face à Grasshopper, puis Vaduz). » C’est un sentiment que partage également son numéro 8, Musa Araz : « Peut-être devrions-nous être plus concentrés individuellement, le mental joue beaucoup. Mais je ne saurais pas quoi changer dans cette équipe car même dans un bon jour, contre des équipes comme Bâle et Young Boys, ça ne suffit pas. Il va falloir prouver qu’on peut gagner à nouveau contre GC car le beau jeu est une chose mais le bilan comptable en est un autre. » Et cela, malgré six revers de rang, Celestini ne désemplit pas de louanges envers une équipe qu’il affectionne vraiment. « Je voulais être fier de mes joueurs et qu’ils produisent un beau jeu. Ils l’ont fait. » À lui d’ajouter : « Je suis plus content des six derniers matches que des premiers, parce qu’avant, il y avait vraiment beaucoup à retravailler. Aujourd’hui, il n’y a pas à être catastrophé, l’équipe produit de grands efforts, réalise de grands matches mais sans en être récompensée. » Pourquoi Pak n’arrive pas à la mettre à but quasiment vide et Hoarau parvient à la placer en lucarne en position impossible ? « Ça, je n’en sais rien – avoue Celestini mais conclut sobrement et fièrement – Je suis satisfait de mes garçons ; nous gagnons le respect de toute la Super League. » À eux d’en tirer récompense face à Grasshopper, dimanche 4 décembre où il faudra se montrer « plus déterminants », selon le latéral gauche Nicolas Gétaz.
LES FAITS DE MATCH Composition du FC Lausanne-Sport: Kevin Martin, Elton Monteiro, Marcus Diniz, Nicolas Gétaz, Musa Araz, Olivier Custodio, Alexandre Pasche (76e Nassim Ben Khalifa), Samuele Campo, Maxime Dominguez (68e Yeltsin Tejeda), Francesco Margiotta et Kwang-Ryong Pak (68e Gabriel Torres). Composition du BSC Young Boys: Yvon Mvogo, Steve Von Bergen, Leonardo Bertone, Miralem Sulejmani (80e Scott Sutter), Alexander Gerndt (46e Michel Aebischer), Thorsten Schick, Kasim Nuhu, Sékou Sanogo, Sven Joss (12e Ian Lecjaks), Kevin Mbabu et Guillaume Hoarau. Buts: 55e Hoarau (0-1); 87e Ben Khalifa (1-1); 88e Hoarau (1-2). Notes: Lausanne-Sport sans Carlos Blanco, Xavier Margairaz, Paolo Frascatore, Juan Esnaider et Jordan Lotomba (blessés). Young Boys sans Yoric Ravet, Alain Rochat, Grégory Wuthrich, Denis Zakaria et Yuya Kubo (blessés).