FAE-UNES, le référendum qui captive l’Université de Lausanne

Joachim Léger (à gauche) et Francisco Da Cruz Sousa Martins éclairent sur les enjeux du référendum à l'Université de Lausanne. © Yves Di Cristino

Les étudiant-e-s de l’Université de Lausanne ont sans doute vécu une semaine très particulière. Le tout premier référendum interne à l’établissement a eu lieu du lundi 31 octobre au vendredi 4 novembre. Près de 14’000 étudiant-e-s (dont le taux de participation suscitera les premières curiosités) ont pu se prononcer électroniquement sur la décision contestée de la sortie de leur faîtière, la FAE – Fédération des Associations d’Étudiant-e-s – de l’Union Nationale des Étudiant-e-s Suisses (UNES). Alors qu’un débat organisé par l’association Uthink avait lieu lundi soir au sein de l’UNIL, leMultimedia.info participe également à la mise en lumière des enjeux de la votation pour les étudiant-e-s de la ville de Lausanne. Interview des deux co-présidents de la faîtière lausannoise.

L’UNIL connaîtra dans quelques jours sa première expérience référendaire. Quel regard portez-vous sur l’événement qui impliquera les 14’000 étudiant-e-s lausannois-e ?

Joachim Léger : Nous sommes très heureux de cette échéance. Nous allons de toute façon être gagnants de deux manières. La première est la visibilité que prend la FAE grâce à cette votation. Une certaine prise de conscience peut avoir lieu pour certain-e-s étudiant-e-s, à savoir qu’ils/elles puissent peut-être, aujourd’hui, s’investir plus en faveur d’une association universitaire qu’ils ne l’ont fait auparavant. Ils peuvent découvrir le rôle politique que joue la FAE grâce à ce référendum. Nous ne sommes pas uniquement fournisseurs de services mais se tient aussi en notre sein toute une dimension politique qui ressort particulièrement aujourd’hui. En second lieu, cette votation interroge également sur ce qu’est l’UNES. Cette semaine, nous aurons l’avis direct d’une population sur un sujet particulier. Et cela est d’autant plus excitant que d’habitude, nous avons un fonctionnement à divers échelons dans lesquels l’étudiant-e de base contacte d’abord sa section facultaire pour un problème juridique ou autre, avant de passer par nous, par l’Assemblée des délégué-e-s (AD) et peut-être même remonter jusqu’à l’UNES. Et finalement, à notre échelon, la FAE a parfois un rapport un peu indirect avec les étudiant-e-s ; nous en avons beaucoup lorsqu’il s’agit de résoudre un cas éminemment juridique et concret mais nous l’avons moins pour des avis de politique générale. C’est pourquoi, l’outil référendaire rend déjà compte d’une situation inédite à l’Université de Lausanne.

Francisco Da Cruz Sousa Martins : Un référendum débute par une contestation. Et rien que cela, ce n’est pas une situation évidente. Elle peut même devenir exténuante si le respect mutuel se perd. Mais dans tous les cas – et c’est tout-à-fait positif – cela débouche sur une votation populaire et elle se révèle être une excellente occasion pour informer les étudiant-e-s et les intéresser aux institutions qui travaillent pour eux. C’est un enjeu en soi car les questions représentatives sont vite complexes et pas nécessairement attrayantes. De plus, il faut se rappeler que la représentation n’est qu’un petit groupe de personnes qui s’efforce de travailler pour un plus grand groupe. Pour la partie qui ne connait pas ou peu l’existence de leurs représentants – ce qui tiens du paradoxe – cette échéance va peut-être permettre à intéresser et rendre plus de monde curieux, à la fois sur le fonctionnement interne de la FAE et sur l’existence de structures nationales.

J.L. : De plus, la plupart du temps, nous, les représentants, ne pouvons que supposer la position des étudiant-e-s via un échantillon d’entre eux, ce qui rappelle que tout système représentatif a ses limites. Un retour plus direct des étudiant-e-s sur le cap à défendre semble être une bonne chose. C’est pourquoi il est bien que ceux-ci nous donnent précisément un cap à défendre que personne ne pourra plus délégitimer.

L’assemblée des délégué-e-s de la FAE décidait le 25 avril dernier de quitter la faîtière nationale. Quels en étaient les raisons apparentes et déclencheurs à l’époque ?

J.L. : Les arguments n’ont pas changé depuis la présentation qui en a été faite en Assemblée des délégué-e-s du 25 avril 2016. La décision phare qui a déclenché la volonté de sortie remonte sans doute à la décision prise par l’UNES de faire recours contre le départ de l’AGEF. Nous avions déjà eu des précédents aux AD lors desquelles les délégué-e-s exprimaient des sentiments contestataires et critiques envers l’UNES. Et le recours de cette dernière face à une décision de sortie prise par l’AGEF a cristallisé en quelque sorte les passions. À ce moment, ce sont bien trois associations membres de la FAE qui sont venues vers nous et ont exprimé leur volonté de voter sur la sortie de l’Union.

F.M. : La situation était déjà problématique depuis longtemps mais les discussions avaient été temporisées, suite aux promesses de réformes au sein de l’UNES, réformes qu’on attend toujours. Et il y a eu le recours contre l’AGEF et l’AD de la FAE a voté contre le maintien du recours, recours juridique qui va à l’encontre de tout ce que la FAE souhaite comme rapports entre l’Union et ses membres. Nous avons, à cet égard, exprimé une position très forte avec une quasi-unanimité au sein de la FAE. Toutefois, malgré notre vote contre cela, le recours a été maintenu suite à un vote de l’UNES durant un comité législatif, qui est le petit législatif et qui n’est d’ailleurs pas la bonne instance pour prendre cette décision. L’Assemblée des Délégué-e-s de l’UNES qui a eu lieu après aurait été l’instance appropriée pour voter la décision du maintien du recours, mais celle-ci n’y a même pas été présentée. De plus, ce recours a été lancé par l’exécutif de l’UNES sans être passé par le législatif avant. Ce qui fait que nous avons tous été mis devant le fait accompli, alors même que les frais de justice pour ce recours étaient déjà engagés et irrécupérables. Enfin, ce recours contre la décision de sortie d’un membre de l’Union viole les statuts de cette dernière car il est stipulé que « l’UNES respecte l’indépendance de ses membres ». Donc, il y avait déjà un ensemble de problèmes latents et cet épisode du recours a très clairement rouvert la boîte de Pandore des inconvénients que présente l’UNES.

J.L. : L’effet que cette situation a produit pour les délégué-e-s à cet instant peut se comprendre comme un sentiment d’obligation d’adhérer à l’UNES sans avoir aucune opportunité de sortie effective, en d’autres termes, de rester membre par contrainte de l’Union. Et cette situation, les membres du législatif de la FAE l’ont très mal vécue car elle va à l’encontre de leurs convictions les plus profondes.

F.M. : Il y a divers problèmes qui préexistent, en plus de ce recours. En premier lieu, il y a la bureaucratisation croissante tant au niveau rédactionnel que directionnel. Deuxièmement, de gros problèmes sont liés aux manques de traduction des documents fournis, ce qui pour nous est un prérequis indispensable pour une compréhension mutuelle ainsi qu’une prise de position commune. Une union nationale qui néglige ce fondement indispensable à unir a perdu de vue son rôle premier. Troisièmement, la transparence des comptes et des documents décisionnels n’est pas garantie, alors que ces documents devraient être publics et accessibles à tous les étudiant-e-s. Nous sommes donc en droit de nous demander quelles sont les justificatifs d’un tel comportement qui ne dépend pas de moyens techniques mais bien d’un manque de volonté. Et last but not the least, l’ingérence dont a fait preuve l’UNES concernant la volonté de sortie de l’AGEF démontre un manque de pragmatisme alors même que l’UNES garantit par ses statuts l’indépendance des sections qui la composent. Or, elle s’est permise d’attenter un recours juridique contre la sortie d’une d’entre elles. La goutte d’eau qui…

J.L. : Il y a, disons, un méta-problème avec l’UNES qui est bien la fin de la recherche d’un compromis. C’est à dire que, selon moi, l’on ne fait pas une union si nous ne regroupons pas la quasi-unanimité sur les principales décisions qui y sont prises. Il est moralement très difficile de prendre systématiquement un mur aux propositions que nous présentons à l’UNES, notamment lorsqu’on essaie de la réformer de l’intérieur. Avoir des positions fortes de ses étudiant-e-s et ne pas pouvoir les exprimer et les réaliser à Berne, ça fait mal.

L’UNES offre une représentation nationale aux étudiant-e-s de l’Université de Lausanne. Un oui à l’abandon à la faîtière nationale mettrait-il durement à mal les intérêts des étudiant-e-s lausannois dès 2017 ?

J.L. : Les étudiant-e-s lausannois sont actuellement peu (ou mal) écoutés, même s’il y a eu des tentatives d’amélioration et des promesses de la part de l’UNES. Mais cela n’a pas suffi. J’entends par là que beaucoup de nos propositions à l’UNES ont davantage été perçues comme une provocation qu’autre chose, alors que ce sont des positionnements qui font l’objet de longs débats chez nous et sont votés souvent à 90% des voix.

F.M. : Les principaux problèmes que l’on a identifiés depuis un an – à commencer par la transparence financière et législative vis-à-vis des étudiant-e-s que nous sommes censés représenter – n’ont pas trouvé écoute. Ce que nous voulons, c’est que tout étudiant-e ait un droit de regard sur ce que fait l’Union, notamment sur l’utilisation et l’allocation de ses ressources. Malgré nos demandes répétées, ce n’est toujours pas le cas. Même nous, en tant que membres actifs qui allons aux réunions, nous avons un accès difficile aux documents. De plus, au niveau humain, il est très énergivore et chronophage de s’investir dans cette Union nationale, qui accapare les ressources de la FAE, au détriment de nos étudiant-e-s ici à l’UNIL. Sans résultats apparents. L’UNES s’accapare également une part importante de notre budget sans donner la traçabilité de son utilisation. Enfin, la volonté de se réformer de l’UNES n’est pas présente, ou du moins pas sur les choses qui nous semblent fondamentales. Dans les archives de l’UNES, on découvre que la FAE demandait les mêmes choses déjà en 2008 et 2010.

J.L. : Ce qui devient intéressant en cas de sortie, c’est que la FAE n’a pas l’intention de cesser toute collaboration avec l’UNES. Cela nous permettrait de nous investir à la fois financièrement et humainement sur les sujets choisis sur lesquels nous avons, pour le coup, avec eux, une unanimité. A l’exemple d’une hausse globale des taxes d’étude en Suisse ou d’un désinvestissement massif du fédéral dans la formation. La différence sera alors que l’on ne collaborera qu’à partir du moment où notre vision correspondra à la leur. On ne collaborera pas sur des sujets qui sortent du champ de la politique étudiante ou qui vont manifestement contre la position de nos étudiant-e-s. L’on a alors la possibilité de faire quelque chose de plus constructif en dehors de l’Union si l’on arrive à se trouver des intérêts communs. Et l’on en trouvera !

Des intérêts communs qui prendraient forme dans des accords bilatéraux avec l’UNES mais aussi avec les autres faîtières universitaires suisses…

J.L. : Tout-à-fait ! Il y aura des collaborations fortes s’il y a des problèmes forts. Pour beaucoup d’autres sujets moins centraux, cela risque par contre d’être plus compliqué.

F.M. : Mais pour ces sujets qui paraissent moins évidents, dans le sens où ils ne génèrent pas spontanément des coalitions naturelles, il y aura la possibilité de se réunir et de travailler en réseau, avec la mise en place du Réseau Suisse des Hautes Ecoles. Nous souhaitons aussi développer des accords bilatéraux avec les autres universités voire même avec l’UNES. Il s’agirait de s’investir sur quelques dossiers choisis avec soin, plutôt que diluer nos ressources dans l’UNES de manière systématique et aveugle. Là où l’UNES est une structure centralisé, lourde, bureaucratique et opaque, nous visons un fonctionnent en réseau avec des tables rondes, soit une structure légère avec moins de coûts fixes et plus de transparence.

Le bureau de la FAE prend position et fait campagne. Pourquoi ?

F.M. : Exécuter la politique de la FAE, définie par son législatif au nom de la FAE, c’est précisément le rôle de son exécutif. Pour rappel chronologique, à la demande du législatif, l’exécutif a donné son préavis durant l’Assemblée des délégué-e-s qui était alors déjà favorable à la sortie de l’UNES. Mais cela n’engageait à rien. Dans un second temps, l’AD s’est prononcée pour la sortie de l’UNES et, à cet instant précis, la position de la FAE dans son ensemble a alors été définie. Ensuite, la décision de la FAE a été contestée par un référendum. Par conséquent, en dernier lieu, l’exécutif de la FAE qui doit exécuter la décision prise par son législatif, défend donc la position de la sortie et fait alors campagne. En faisant cela, nous respectons précisément nos statuts. Quand une décision est contestée, l’émetteur de celle-ci et ceux qui la contestent doivent expliquer les raisons de leur action. Au début, le comité référendaire s’était présenté comme neutre vis-à-vis de la sortie de l’UNES et nous allions partir sur une campagne d’information conjointe. Mais par la suite ils ont décidé de faire une campagne dissociée et polarisée, en affirmant leur position pour le maintien au sein de l’UNES et contre la décision de sortie de l’UNES votée par la FAE. Il y a un paradoxe. Bien que l’UNES vise à les représenter, la plupart des étudiant-e-s ignorent tout de l’UNES, y compris son existence. Parmi la minorité qui en connaissent l’existence, les seules personnes qui sont réellement au contact de l’UNES et qui collaborent régulièrement avec ses organes sont pour l’essentiel les membres du bureau de la FAE et les étudiant-e-s qui gravitent autour. Par conséquent, il est tout-à-fait normal que l’exécutif de la FAE qui connait les informations concernant les fonctionnements ou dysfonctionnements de l’UNES donne son préavis sur cette question. Quand le bureau donne un préavis en AD et que l’AD vote et décide de la position de la FAE – et par ailleurs qu’en tant que Fédération des Associations d’Étudiant-e-s, nous sommes dans le devoir d’informer les étudiant-e-s sur la politique entreprise – il semble tout-à-fait nécessaire que nous expliquions au moins les ressorts de notre position. Ainsi, la neutralité initialement espérée a un quelque chose de paradoxal. Et elle l’est d’autant plus que l’outil choisi pour contester cette décision – il y en avait plusieurs – soit le référendum. Cela crée donc spontanément deux camps : l’émetteur de la décision initiale et ceux qui s’y opposent.

Vous dénoncez un traitement déloyal et inégal de l’UNES à l’égard des diverses associations universitaires membres. La décision de sortie est-elle en ces termes, une protestation ?

J.L. : C’est un traitement inégal malgré eux. Du point de vue des aires linguistiques, il y a une mise en minorité de fait et cela ne dépend nullement de la volonté de l’UNES.

F.M. : La question me parait assez curieuse, compte tenu que nous ne dénonçons pas spécialement un traitement déloyal de la part de l’UNES. Certes, il existe une iniquité dans le traitement des sections membres et dans le calcul des cotisations mais ce n’est pas là le problème fondamental qui nous amène à ce référendum aujourd’hui. Les raisons qui conduisent la FAE à sa décision de sortie touchent aux fondements de l’Union, c’est à dire le manque de transparence généralisée ou encore le non-respect de l’indépendance de ses membres.

J.L. : D’autres sections sont sorties à cause de ces problèmes-ci. Concernant l’AGEPoly (ndlr, faîtière de l’EPFL), leurs représentants avaient simplement le sentiment de ne pas être écoutés. Ils n’avaient pas l’impression que la volonté de leurs étudiant-e-s aient un quelconque impact chez eux. Ils sont donc sortis et c’est ce qui a fragilisé encore plus la position des francophones au sein de l’UNES. Si on rajoute à cela, le manque de traductions car pas ou peu considéré comme priorité, l’on se rend rapidement compte que notre avis compte de moins en moins. Alors, dans les faits, nous sommes dans un pays à majorité alémanique qui parle évidemment allemand et cela ne nous pose évidemment aucun problème. Ce qui est problématique, en revanche, c’est le temps laissé aux francophones et la volonté d’arriver à un compromis avec eux. Si l’on ne tient pas compte des minorités de manière effective, alors ça devient très dur pour nous. La preuve, l’AGEF (Fribourg) et l’AGEPoly ont déjà quitté le navire. Quant à la CUAE (Genève), ils sont rentrés et l’on attend de voir si cela est à même de changer le paradigme actuel. Mais pour l’instant, ce sont surtout des sections francophones qui sortent alors même que nous ne sommes pas très nombreux.

F.M. : Oui, la CUAE est rentrée mais, pour l’instant, elle n’a jamais fait son apparition en conseil législatif. De manière générale, il faut garder à l’esprit qu’être membre sur le papier ne dit pas grand-chose sur la réalité de l’engagement ou du désengagement dans l’UNES. On bénéficie de l’étiquette membre de l’Union nationale dès lors qu’on paie sa cotisation.

Vous attendez-vous tout de même, qu’en cas de sortie de la FAE, cela puisse changer quelque chose du côté de l’UNES ?

F.M. : Il y a plusieurs parties de réponse. Il y a déjà eu dans le passé des Groupes de Travail (GT) visant à réformer l’UNES et ces derniers avaient déjà identifié les mêmes questions qui se posent aujourd’hui. Pourtant c’est le statu quo qui domine et ces GT ont déjà plusieurs années. Actuellement au sein de l’UNES, un nouveau groupe de travail réfléchit à ces questions. Et là encore, des choses vont émerger mais cela va mettre un temps conséquent et on n’est pas sûrs que tout se concrétise ou que ça aille dans le sens qu’on attend. Néanmoins, il est tout-à-fait possible que notre sortie fasse réagir l’UNES. Et si c’est le cas, tant mieux. Si l’UNES parvient enfin à changer suite à la prise de conscience que différentes sections partent – et souvent pour les mêmes raisons–, alors ce n’est de loin pas une mauvaise chose. Et, par-là, cela signifie qu’il est possible qu’un jour, nos successeurs décident de réintégrer l’Union, qui aura alors un fonctionnement différent. Mais maintenant, la question à laquelle nous devons réfléchir est bien celle de l’allocation des ressources de la FAE. Où investir notre argent pour qu’il puisse être profitable pour les étudiant-e-s de l’Unil et aux étudiant-e-s en général. Malheureusement, il y a trop de dysfonctionnements internes et trop d’opacité à l’UNES en ce moment pour que nos ressources ne soient réellement profitables. Cela fait déjà un an que nous identifions ce problème et que nous le notifions à l’Union mais à un moment donné, l’on se rend compte que la sortie est la seule solution qui nous reste. Surtout qu’en creusant dans les archives, on retrouve les mêmes critiques faites à l’UNES, déjà en 2008 et 2010.

J.L. : De toute évidence, nous avons déjà gagné quelque chose. Il y a une différence notoire depuis le moment où la FAE a annoncé sa volonté de sortie de l’UNES en termes de traitement que nous accorde l’UNES. Après, s’il faut un référendum dès qu’il faut réformer l’UNES, simplement pour être entendu, c’est un autre problème. Mais nous sommes déjà gagnants, si la sortie d’un membre important crée une véritable remise en question. Que l’on sorte – je le souhaite – ou que l’on reste, un progrès conséquent aura été fait car un référendum laisse des traces ; les étudiant-e-s lausannois gagneront de cette votation populaire quel que soit le résultat vendredi.

Vous en arguez également l’organisation jugée trop chronophage de la faîtière. En jugez-vous clairement l’appartenance de la FAE à l’UNES comme étant une sérieuse perte de temps pour les délégué-e-s et les intérêts de la Fédération des Associations de l’Université de Lausanne ?

J.L. : Ce ne serait pas chronophage si l’UNES s’attachait à ne défendre que des positions sur des questions de formation. Si nous commençons à dériver sur des initiatives fédérales qui n’atteignent absolument pas la question estudiantine – à l’exemple de l’initiative vache à lait – je crois que la participation à l’Union en devient particulièrement chronophage, et s’éloigne de son but initial. Car si je dois passer du temps pour défendre une position autour de l’initiative vache à lait, ce sera dans tous les cas du temps et des ressources perdus pour la défense des étudiant-e-s, ce qui va se traduire par un suivi juridique moins effectif, des rencontres diminuées avec la direction de l’Université ou encore moins d’énergie pour les bourses d’étude. Et pour moi, c’est inconcevable. Une priorisation doit être pensée dans l’intérêt de nos étudiant-e-s.

La CUAE (Genève) en 2002 avait déjà quitté l’UNES avant de la réintégrer. N’est-ce pas prendre le risque, pour la FAE, de revenir plus tard sur une décision qui pourrait paraître aujourd’hui précipitée ?

J.L. : Si l’on prend l’exemple de la CUAE ; ils ont quitté l’UNES en 2002 et n’y sont revenus que 14 ans plus tard, et pour des raisons très différentes. Pour nous, les choses sont un peu différentes car nous sommes membres depuis une trentaine d’année, sans interruption. Cette décision est mûrement réfléchie, et c’est trois de nos associations facultaires qui ont demandé à voter sur la sortie de l’Union. Cela ne serait pas arrivé s’ils estimaient que la question était précipitée.

F.M. : Cela dépend beaucoup de comment on conçoit cette idée de précipitation. N’importe quel délégué-e ayant fait son devoir de relecture des procès-verbaux de nos AD se rendra compte que la discussion sur les problèmes avec l’UNES était déjà présente l’année passée. Et si l’on remonte encore plus dans les archives, on retrouve les mêmes problèmes depuis beaucoup plus longtemps.

J.L. : Des PV de 2008 ciblaient déjà les mêmes problématiques. Donc on voit que les tentatives de réformes de la part de l’UNES n’aboutissent absolument pas. C’est un phénomène cyclique ; nous retrouvons les mêmes griefs à quelques années d’intervalle, et sans résolution des problèmes. À partir de là, l’on peut légitimement affirmer que la décision de sortie est mûrement réfléchie. C’est l’histoire d’une génération entière d’étudiant-e-s.

La somme des cotisations s’élevant à un peu plus de 55’000 francs par année pour la FAE fait-elle débat, à l’aune des discussions récentes faisant foi au sein de l’AGEF, la faîtière fribourgeoise – comme le relève le journal estudiantin de Fribourg Spectrum ?

J.L. : Notre position est claire : les cotisations ne sont pas trop hautes. Pour la FAE, les cotisations pourraient s’élever à 60’000 ou 70’000 francs que cela ne poserait aucun problème. Nos comptes, heureusement, se portent très bien. Nous arrivons à maintenir une très bonne gestion de nos ressources. Le problème, déjà identifié, relève davantage de l’utilisation de cet argent. S’il n’y a pas de résultat effectif après avoir cotisé plus de 50’000 francs à l’UNES, par année, alors il se pose un vrai problème, surtout vu l’opacité générale de l’UNES. Transparence et résultats, encore une fois. De plus, il y aussi la question des priorités dans l’usage de cet argent, et à ce propos nous sommes souvent en désaccord avec l’UNES, par exemple sur la part allouée aux traductions.

Combien de temps prendraient théoriquement les procédures pour une sortie de la faîtière ?

J.L. : Dans la mesure où le référendum validerait la position de la FAE de sortir de l’UNES le 7 novembre, nous allons tâcher de communiquer la décision le plus rapidement à l’UNES. Les statuts de l’UNES ne prévoient pas de procédures spécifiques en cas de sortie d’une section membre. Il convient alors d’appliquer les dispositions pertinentes de la législation fédérale suisse. Ainsi, si les résultats du référendum valident la sortie de l’Assemblée des Délégué-e-s de la FAE du 25 avril 2016, la FAE sortirait six mois après en avoir communiqué la décision des étudiant-e-s de l’Université de Lausanne à la direction de l’UNES. Donc normalement, il s’agirait d’une sortie effective entre juin 2017 et décembre 2017.

F.M. : Cela signifie donc que si les étudiant-e-s décident de sortir de l’UNES, nous ne serons pas dehors du jour au lendemain. Nous continuerions à être actifs au sein de l’Union et en parallèle, nous pourrons mettre en place l’après-UNES – déjà bien préparée durant l’été avec d’autres sections récemment sorties, l’AGEF et l’AGEPoly. La sortie ne serait donc pas brutale et l’UNES pourrait également réadapter son budget pour l’année suivante. Nous aurions alors l’année pour créer un réseau alternatif tout en continuant à collaborer avec l’UNES, de l’intérieur ou de l’extérieur.

Chaque sociétaire est autorisé de par la loi à sortir de l'association, pourvu qu'il annonce sa sortie six mois avant la fin de l'année civile ou, lorsqu'un exercice administratif est prévu, six mois avant la fin de celui-ci.
 Code Civil du 10 décembre 1907, article 70, alinéa 2.

Le bureau et sa prochaine co-présidence (ndlr, Francisco démissionnera au terme du scrutin) assurera-t-elle de poursuivre des actions au niveau national même si l’appartenance à l’UNES devait être annulée ?

J.L. : Cela me semble important. Nous avons déjà pensé à une alternative viable en cas de sortie de l’UNES. Cela consisterait en un réseau qui débutera avec nous, l’AGEPoly (EPFL) et l’AGEF (Université de Fribourg). A priori, on ne prendra une position commune que si nous sommes unanimes sur le sujet. Cela donnerait une très grande force à nos prises de positions car ce sera bien un ensemble de trois grandes universités – et plus à l’avenir – qui s’entendront bien pour avancer. Le projet de Fribourg est d’ailleurs assez novateur et va dans ce sens. Il s’agirait de créer des faîtières cantonales qui iraient parler à leurs élus locaux ou fédéraux pour défendre la position des étudiant-e-s d’un même canton, car en Suisse l’université est surtout une affaire cantonale. Ce serait quelque chose d’assez fort. Cela tout en gardant un contact avec l’UNES pour faire en sorte que les sujets qui auraient un réel besoin d’union nationale soient défendus aussi bien humainement que financièrement. C’est comme cela que l’on prévoit le futur, si toutefois la FAE devait quitter l’UNES. De toute évidence – et cela est capital – nous ne souhaitons pas faire de la FAE un membre freerider. C’est à dire, que nous bénéficions d’avantages de la part de l’Union sans nous y investir pleinement. Nous ne souhaitons pas être le passager clandestin des actions de l’UNES. Nous souhaitons réellement nous investir sur les sujets qui nous concernent vraiment, pour ensuite décider des alliances nécessaires à une défense efficace et coordonnée. L’actualité politique est difficile à prévoir et il s’agira surtout d’être prêt pour les moments importants ; nous ne savons pas dans six mois, quels seront les principaux sujets politiques qu’il conviendra de défendre.