Le FC Bâle éteint Lausanne à la 93e minute

Les deux capitaines, Olivier Custodio du FC Lausanne-Sport (à gauche) et Matias Delgado du FC Bâle ont personnalisé un duel à la hauteur des attentes des 6154 spectateurs de la Pontaise. © Oreste Di Cristino

Battu lors du week-end de Coupe à Köniz (3-1), Lausanne contemple la fortune de sa malchanceuse semaine anglaise. Défaits par le leader bâlois à domicile dans le cadre de la huitième journée de Super League (1-2), les hommes de Fabio Celestini peuvent nourrir le regret de laisser filer la seconde place de la hiérarchie. Ce n’est pourtant que partie remise.

Il en faut parfois peu. Certes. Mais ce peu nourrit les remords. Nourrit la frustration et la déception. Le prosélytisme lausannois – son zèle pour imposer son jeu, ses méthodes à un leader chevronné pendant bien soixante minutes – n’a pas assez payé, si bien que dominé, le FC Bâle n’a résisté qu’à l’aune des miracles de Tomas Vaclik (cinq parades en détente contre une seule pour Dany Da Silva). C’est ainsi que mercredi, la stature et l’aplomb, attributs certains des âmes championnes, ont fait le lit du succès et de l’audace rhénans. Et le sanctuaire bâlois reste, pour le dire, inviolable. À leur huitième match de championnat, les hommes d’Urs Fischer cultivent leur invulnérabilité. Et ce, même dans la douleur. Aussi bien qu’au terme du duel, c’est Éder Balanta, en coup de grâce et en supériorité numérique après l’expulsion de Xavier Margairaz – que faut-il de plus ? – qui crucifie l’impudence lausannoise dans les arrêts de jeu (93e). On en contemple l’hérésie de ce final haletant – des crampes de Samuele Campo à la résistance épuisée d’une défense centrale en bout de course –, l’étendue d’un marasme lausannois qui nourrit les plus grands malaises, le souffre qui entoure Fabio Celestini en conférence de presse, dénué de ses sentiments, le regard creux: « Nous ne méritions pas de perdre ce soir. C’est très frustrant pour les joueurs parce qu’ils ont fait un match extraordinaire. Nous avions tout fait pendant soixante-cinq minutes pour aller au moins chercher un point. Mais apparemment, il nous manque encore quelques petits détails », explique-t-il. Une accolade avec son vis-à-vis et la fête prend gravement fin, s’estompant sur les bancs de vestiaires froids et d’un silence dont le son était encore pieusement méconnaissable depuis les débuts du club dans l’élite. Mais pourtant, la situation est bien loin d’être confuse; troisième défaite pour une stable quatrième place. « Il nous faut quelque chose en plus – ajoutait l’entraîneur lausannois avant de poursuivre – Nous perdons trois fois contre Bâle, Young Boys et Grasshopper, trois clubs européens. Apparemment, malgré trois grandes performances, nous ne sommes pas parvenus à prendre 1 point. Donc il nous manque quelque chose. Il va falloir aller le chercher ». C’est subséquemment à ces titres de persévérance que le LS lancera sa dernière et troisième étape de sa semaine anglaise samedi à Lucerne avec, peut-être, le satisfecit d’un podium au terme du premier des quatre tours de l’exercice 2016-2017.

Éviter de perdre l’énergie des premières 60 minutes

Une heure et puis s’en va ? Le carburant se raréfie trop facilement dans la demeure lausannoise, aussi bien qu’après une bonne heure de jeu, l’intensité baisse parallèlement à la dangerosité des offensives. Un piège énergétique incriminant un manque de constance fatal pour un outsider. « On a vu soixante minutes de grand Lausanne sur tous les niveaux: tactique, technique avec la présence de vraies personnalités et d’une ambition certaine. Malheureusement, sur la dernière demi-heure, Bâle a eu ses possibilités et nous a vaincus. Nous en avions pourtant eues durant la première heure et nous ne sommes pas parvenu à inscrire le 2-0 », avoue Fabio Celestini. À attiser la contrition et le repentir, la dernière opportunité de Kwang-Ryong Pak (54e); servi dans le dos de Michael Lang par un travail remarquable de Francesco Margiotta, le Nord-Coréen écrase son tir sur le mollet de l’extrême défenseur bâlois, laquelle habileté ne fit l’ombre d’un doute tout au long d’une rencontre absorbante. Aussi, si l’avant-centre – actif à tous les niveaux – se positionne en figure incontestable de l’avant-garde lausannoise, il est à s’enquérir de l’endurance de l’entier du groupe sur la longueur maître des quatre-vingt-dix minutes. Autrement dit: attaquer toujours, est-ce possible ? « Je pense que nous sommes capables de jouer 90 minutes avec la même intensité. Mais nous ne pouvons pas non plus aller presser toujours aux 16 mètres adverses. Même Barcelone ne peut pas le faire », explique Nicolas Gétaz. Aussi, le latéral reconnaît les torts d’une baisse de régime qui s’avère – trop – néfaste: « [Fabio] nous demande bien sûr de faire de gros efforts et d’aller toujours au pressing. De jouer toujours vers l’avant car nous savons que nous n’avons pas les joueurs nécessaires pour défendre en bloc. Mais à un moment dans le match, nous avons une baisse de rythme et c’est là où nous devons apprendre. Apprendre à être plus agressifs dans nos 30 mètres ». Justifié, par les faits-mêmes. À la 67e minute de jeu, Andraz Sporar déborde Marcus Diniz, inattentif – qui n’invite nullement à méprendre la prestation du défenseur brésilien, solide rempart pour une équipe qui en a trop souvent manqué lors des précédentes saisons – et centre pour le hors-classe islandais, Birkir Bjarnason, libéré, esseulé qui n’a plus qu’à ajuster son pied pour tromper Dany Da Silva sur le tout premier tir cadré des Rhénans. Regrettable. « Avec Bâle, on sait que tout se joue sur des détails – glose Nicolas Gétaz – et rien n’est jamais fini ». Soit.

Urs Fischer, la clairvoyance du tacticien

« La pression n’était pas sur nos épaules ce soir », tanne Nicolas Gétaz. Cela n’éreinte pourtant pas la tension des matches à grands enjeux. Et vraisemblablement, la mise était élevée. Tant est qu’à l’heure de jeu – considérés les matches nuls de Lucerne face à Sion (2-2) et des Young Boys à Vaduz (0-0) – le contingent vaudois pointait au second rang du classement du championnat, à longueurs plurielles d’un FC Bâle décidément supérieur au lot. Une prise de conscience douloureuse à laquelle il convenait – sans doute – d’en négliger les retombées moralement négatives: « Quoi qu’il en soit, nous aurons de toute manière des remords, pour le simple fait de n’avoir été qu’à peu de battre le FC Bâle. Mais le classement n’est pas fondamental à ce point. C’est certes dommage pour la conscience car cela aurait été très agréable de nous voir là haut. Mais il faut voir de l’avant », console le bon sens du latéral gauche lausannois. Toujours est-il que, mené d’un but, ne fallait-il pas s’attendre à voir caner le colosse rhénan. Car tel n’est pas l’esprit du club. Pour Urs Fischer, les dispositions doivent être prises avec réactivité: « Nous sommes habitués à certains schémas de jeu mais parfois ils ne correspondent pas à celui de l’adversaire. Nous devons apprendre à changer de tactique de jeu directement sur le terrain ». C’est ainsi qu’en procédant – dans un premier temps – au changement de Seydou Doumbia (aligné plus volontiers en Champions League), remplaçant l’absence de Marc Janka, blessé, par Andraz Sporar sur le couloir droit, les premières réactions apparaissent. Notamment avec plus d’impact sur les périphéries latérales du terrain. L’essoufflement de Nicolas Gétaz était par ailleurs un signe avant-coureur de l’état de faiblesse grandissante de la résistance défensive vaudoise. Il n’est alors pas du sort du hasard de voir le Serbe, en provenance de Ljubljana, se distinguer pour son premier match de championnat de la saison en délivrant sa passe décisive à Bjarnason (67e). Autant de “détails” essentiels qui édifient la supériorité tactique et plurielle du FC Bâle sur ses concurrents nationaux. « Après avoir changé de plan tactique, nous avons vu une différence. Toujours est-il que nous avons beaucoup été mis en danger en première mi-temps, avant d’avoir davantage nos chances en seconde », confirme l’entraîneur bâlois en conférence de presse. Le tout conclu simplement et dignement par la grâce d’Eder Balanta, réel point d’orgue d’une soirée virevoltante.

LES FAITS DE MATCH
Stade de la Pontaise - Lausanne, 6'154 spectateurs

Buts: Margiotta 36' (1-0); Bjarnason 67' (1-1); Alvarez Balanta 93' (1-2).

Composition du FC Lausanne-Sport:
Da Silva, Manière, Monteiro, Kololli (12' Lotomba), Araz, Pak (67' Margairaz), Campo, Diniz, Gétaz, Custodio et Margiotta (56' Torres).

Composition du FC Bâle:
Vaclik, Gaber, Lang, Serey Die (72' Fransson), Bjarnason, Delgado (78' Elyounoussi), Steffen, Suchy, Alvarez Balanta, Xhaka et Doumbia (64' Sporar).

Notes: Expulsion de Margairaz (90').