La Suissesse de 26 ans a manqué son rendez-vous jeudi soir au Stade de la Pontaise. Lea Sprunger, prête à effacer la contre-performance des Jeux Olympiques de Rio, n’a guère réussi à sauter les obstacles comme elle s’y attendait. Terminée en queue de course avec un chrono qui déborde sur les 56 secondes, la Nyonnaise s’en veut de ne pas avoir corrigé le tir dans ce qui est pour elle, une fin de saison éprouvante. Quant à sa sœur Ellen, engagée au relai 4×100 mètres, arrive au bout de son expérience dans une discipline qu’elle maîtrisait avec ses partenaires Sarah Atcho, Ajla Del Ponte et Salomé Kora.
Lea, que s’est-il passé ce soir ?
Rien ne va, tout est là. Dans ma tête, j’avais envie d’effacer ma contre-performance de Rio et jusqu’à hier, je me sentais très bien. Seulement, ce matin au réveil [ndlr, le 25 août 2016], je me sentais absolument stressée et passablement anxieuse, aussi parce que la panique de la “catastrophe” des Jeux Olympiques me hantait. J’ai eu très peur de ne plus savoir courir un 400 mètres haies. Il est clair que dans des cas pareils, il y a des remises en question mais il faut se dire que si l’on devait changer de discipline à chaque mauvaise course, l’on pourrait rapidement tous se retrouver au marathon. Aussi, avant le départ pour le Brésil, j’ai réussi un très bon début de saison qui me procure beaucoup de satisfaction. Donc pour le moment, je me retrouve avec des sentiments très mitigés.
Vous vous êtes mise seule sous pression, ce qui s’est concrétisé en un manque de confiance sur la piste ?
Oui, c’est cela. C’est frustrant et ça fait mal. La saison est certes encore longue mais pour l’instant, j’ai juste envie d’aller me reposer pour ne plus penser à cette fin de saison très pénible. C’est difficile de rebondir après un tel échec comme celui entrevu aux Jeux Olympiques; j’ai cru que j’en étais capable mais ça n’a pas été le cas ce soir. Et cela me fait d’autant plus mal d’avoir manqué mon rendez-vous devant mon public, sur ma piste d’entraînement que je connais par cœur. Je courrai à Zürich [ndlr, Weltklasse le premier septembre 2016] devant ce même public suisse mais ce sont des jours très difficiles à passer.
Vous avez hérité d’une série des plus concurrentielles avec l’ensemble du podium olympique, c’est une donnée qui a beaucoup pesé dans votre conscience ?
Pour le dire, pas vraiment. C’est d’ailleurs l’une des meilleures conditions que l’on puisse retrouver; c’est là l’une des particularités qui m’ont justement poussée à me surpasser. J’ai essayé de profiter d’une telle occasion pour me distinguer mais pour y parvenir, il faut être dans un bon état d’esprit. Par ailleurs, quand Sara Petersen [ndlr, médaillée d’argent à Rio et championne d’Europe à Amsterdam] m’a dépassée, cela ne m’a pas posé énormément de problèmes, bien au contraire, je l’ai renversé tel un avantage. Nous étions – il est vrai – dans une série rapide dans laquelle je suis, d’emblée, partie rapidement. Mais je n’ai pas su tirer profit de la course.
Vous visiez une performance en deçà des 55 secondes mais vous avez terminé avec un chrono de 56.05 secondes. Comment expliquez-vous le résultat ?
Tout simplement, rien n’a été et cela ne s’explique que par le fait que le meeting était dans le sillage de Rio. J’ai eu beau partir plus vite mais techniquement, sur les haies, il y a eu de grandes lacunes; j’ai commis des erreurs en franchissant chaque obstacle et ma mauvaise jambe m’a fait grandement défaut, ce qui m’a d’ailleurs failli faire tomber en en passant une. Il est très difficile d’analyser l’ensemble de la course à chaud. Je suis très fatiguée et rien ne se passe quand je pousse mon corps; je suis bloquée à ce niveau de la saison.
Vous êtes bien sûr déçue mais vous avez tout de même une pensée pour Clélia Rard-Reuse qui a terminé sa carrière ici, à Athletissima ?
C’est difficile parce que c’est ma copine depuis toujours. Je me suis toujours entraînée avec elle, elle a également été ma collègue de chambre. Nous avons toujours tout partagé sur le circuit et ça me rend très triste de la voir quitter l’athlétisme. Elle a eu une carrière incroyable et je lui souhaite le meilleur pour la suite.
Paroles d’athlètes
Dalilah Muhammad, USA
Gagnante du 400 mètres haies (53,78 secondes)« Je n’ai absolument pas couru pour le chrono, mais davantage pour la position finale. Et avec ma victoire à Lausanne, je suis satisfaite pour le reste de la saison et je vais pouvoir aller me reposer avec tranquillité. Mais je n’oublie pas le record du monde [ndlr, 52,34 secondes de la Russe Yuliya Nosova-Pechonkina en 2003] que je tenterai d’approcher l’année prochaine. Et ma course très propre réalisée à Rio sera une fantastique source de motivation. Je vais, par là, continuer à m’entraîner comme je l’ai fait depuis une année avec mon coach, tout en perfectionnant mes capacités en y apportant quelques ajustements. Cela devrait me permettre de courir beaucoup plus vite… bien plus vite que mon record personnel (52,88 secondes) mais aussi plus que le record du monde (52,34 secondes) ».
Eilidh Doyle, Grande-Bratagne
Deuxième du 400 mètres haies (54,45 secondes)« J’ai fais une course parfaite et je suis honorée et très heureuse de terminer derrière la championne olympique, Dalilah Muhammad. Avec cette performance, je maintiens ma première place au classement de la Diamond League devant Cassandra Tate. Et après ma deuxième place en 2014, je suis vraiment motivée à aller chercher le sacre cette année ».
Ellen Sprunger, Suisse
Deuxième au 4×100 mètres relai (43,64 secondes)« Je suis un peu surprise du résultat ce soir; l’Ukraine était loin devant nous. Nous étions très motivées à courir ce soir à Lausanne, aussi car nous aimons ce meeting. Mais le retour de Rio mardi a certainement empiété sur notre état de forme. Nous avions toutes des jambes lourdes mais je ne pense pas que nous ayons commis la moindre erreur. Nos entraînements se sont bien déroulés hier et les passages de témoin se sont bien passés. Et pour ma part, je me sentais mieux avec ma jambe gauche qu’à Rio. Mais après Zürich (Weltklasse), je mettrai un terme au relai 4×100 mètres. J’aurai mes vacances pour réfléchir si repartir ou non pour une nouvelle saison, mais si c’est le cas, ce sera avant tout en heptathlon ».
Propos recueillis en interviews collectives