Pour culminer au niveau professionnel, faut-il partager l’application de Kendra Harrison. C’est avec un état d’esprit aussi pugnace que l’Américaine est parvenue à s’approprier le record du monde au meeting de Londres le 22 juillet dernier. Et pour le dire ainsi, cela ne suffit guère. Décryptage de cette sur-athlète à la 41e édition d’Athletissima.
Kendra Harrison avait faim. Faim de compétition, de dépassement de soi à l’image du meeting de Londres en juillet dernier duquel elle en est ressortie sourire aux lèvres et record du monde dans la besace. Son 12”20 secondes fait histoire mais l’Américaine ne compte pas se contenter de cet exploit chronométrique. Le record mondial étant ainsi également son record personnel, Kendra Harrison se veut viser plus loin. « Je veux terminer ma saison avec succès et cela passe également par la tentative d’amélioration de mon record personnel. Ne pas avoir participé aux Jeux Olympiques de Rio m’a encore plus donné envie de tout donner pour cette fin d’année ». Le ton était donné en conférence de presse la veille du meeting d’Athletissima. Au championnat de Paris et au Weltklasse de Zürich, Kendra rendra tout aussi compte de son incroyable état de forme; elle, qui n’a de pesantes que ses larges motivations. Donc Kendra n’a pas pris part aux séries de Rio de Janeiro… et alors ? « Un record du monde est beaucoup plus rare qu’une médaille d’or », sourit-elle. Et elle a, en quelque sorte, raison. Raison de se targuer d’une performance qui la suivra à chaque étape de ses rendez-vous futurs. Voilà qu’à Lausanne, l’athlète s’est encore plus – disons-le, même sans record – affirmée. Auteur d’une course, aux confins de l’exceptionnel, l’Américaine s’est amusée d’approcher sa meilleure performance mondiale. Et ce ne fut alors “que” en 12”42 secondes qu’elle est parvenue à éloigner ses concurrentes; à trois dixièmes de sa compatriote Dawn Harper-Nelson qui signait son meilleur résultat de sa saison (12”71 secondes). Une course vertigineuse sur laquelle Kendra Harrison a pris le temps de travailler pendant qu’elle encourageait à la télévision les 555 athlètes de la délégation étasunienne au Brésil: « Le but était de récupérer une bonne forme pour les meetings. Actuellement, je travaille sur beaucoup de niveaux pour atteindre mes objectifs: sur la sortie des blocs et pourquoi pas élever ma vitesse entre la première et la deuxième haie ». Un perfectionnisme tout… américain. Et pour cause, l’on ne se tromperait point si affirmait que l’équipe américaine aux 100 mètres haies s’apparente à la meilleure jamais entrevue auparavant: « La discipline est en effet une longue tradition aux États-Unis. Tout cela ne peut que forger le niveau national et, par conséquent, le mien. Je souhaite, à ce niveau, être la meilleure ». Et il y a une détermination aussi. C’est indéniable.
Un départ « pas comme je l’aurais voulu »
À part Oslo, la recordwoman de la discipline s’est adjugée l’ensemble des meetings. Et même cela ne lui suffit plus tant que chaque course n’apparaît point comme une amélioration sur quelque plan qu’il soit. « Ce soir, je n’ai pas effectué le départ comme je le voulais », explique-t-elle. Et les chiffres ne lui donnent point tort. Avec un temps de réaction de 148 millièmes de seconde, elle est quasiment partie plus tard que toute les coureuses. Seule la Jamaïcaine Megan Simmonds a fait moins bien (174 millièmes). Mais ici ne résident que des broutilles: « Chaque étape sur la piste représente pour moi une opportunité de travailler sur mon exécution et, ce soir, même si j’ai remporté la course, il me reste encore quelques détails à peaufiner ». Aussi, détenir la meilleure performance mondiale de tous les temps ne représente pas une source de pression pour l’athlète américaine. Au contraire, elle semble être une formidable source de confiance: « L’objectif désormais sera de remporter les deux prochaines courses de la Diamond League et, à chaque fois, de me surpasser ». Mais, à l’arrière, la concurrence se réveille. À commencer par sa compatriote Dawn Harper-Nelson, médaillée d’argent aux Jeux Olympiques de Londres en 2012 et gagnante des trois dernières courses (2015, 2013 et 2012) à Lausanne. Et ce ne sont pas ses 12”71 secondes qui démontrent le contraire: « Je suis enchantée de ma performance aujourd’hui parce que la tâche était compliquée. J’ai envie de terminer ma saison au plus haut pour pouvoir préparer l’année prochaine au mieux. Et cette course me prouve que je suis à nouveau en forme. Aussi le niveau aux États-Unis est très élevé de nos jours, aussi je me retrouve parfaitement parmi ces jeunes filles qui démontrent toujours plus leur courage. Et ça ne peut aller que mieux », confirme Harper-Nelson.

Clélia Rard-Reuse tire sa révérence devant son public
« Il y a beaucoup d’émotions. Ce sont d’excellents souvenirs. Je suis contente de terminer avec une belle course même si ce n’est pas mon meilleur chrono ». La Suissesse de 28 ans a raison; ses 13 secondes rondes ne constituent pas son meilleur temps (à 12”87) mais rien de moins que la troisième meilleure performance de sa carrière. Un des meilleurs aboutissements – malgré sa sixième place à Athletissima – auxquels la native de Riddes, près de Martigny, pouvait espérer après plus de dix ans d’activité sur les pistes mondiales: « C’était une très belle dernière saison. J’ai bien commencé en 2005 et je finis en fanfare en 2016. Et même s’il y a eu des hauts et des bas, cette dernière saison restera gravée. Tout m’a réussi cette année », affirmait-elle pour son dernier passage en zone mixte. Mais l’athlète suisse rassure les journalistes: « Je resterai dans le monde de l’athlétisme. C’est mon sport de prédilection, je ne le quitte pas facilement ». C’est ainsi que, sur son terrain d’entraînement, Clélia a offert son meilleur présent à un public lausannois qui n’en demandait pas moins: « C’est mon terrain, mon public et ma famille est venue nombreuse à la Pontaise. C’est magnifique de terminer comme ça avec les applaudissement de l’entier du stade. Les Lausannois sont extraordinaires et je suis sûre que cette ambiance incroyable va me manquer ». Beaucoup d’émoi, en effet.