Gaetan Hirsch a été vaillant, à l’image de son équipe. Le demi de mêlée genevois aurait pu lancer les prolongations si sa pénalité réussissait lors de la dernière seconde de match. Nyon remporte ainsi la coupe Guillaume Tell (22-19) trois ans après avoir constamment échoué en finale. Voir également notre galerie photo de la finale.
Le ciel menaçant du matin s’était adouci. Les nuages amoncelés à Saint-Prex, perturbant le doux vent guidant les voiles du Bol d’Or Mirabaud s’étaient considérablement éloignés de Plan-les-Ouates. C’est ainsi qu’au centre sportif des Cherpines, la fête était totale, souveraine. Que l’on soit bleu et rouge ou bleu et jaune, cela n’importait au final que très peu. Enfin, pas autant que cela ; la finale du championnat suisse de rugby est avant tout le concert final d’un long festival, nourrissant les ambitions mais aussi les craintes des plus férus. « Sur nos monts, quand le soleil annonce un brillant réveil », le cantique suisse retentit, impérial et solennel marquant le début de cette grande échéance. Non, nous n’étions pas à Lens à l’occasion de l’entrée en compétition de l’équipe de Suisse à l’Euro 2016 mais bien à quelque 700 kilomètres de là. Et l’enjeu était tout aussi sérieux ; pragmatisme et tension ont accompagné les 30 acteurs dans leur dernier effort – même si Genève Plan-les-Ouates devra encore en découdre dans une autre finale le 25 juin prochain, celle de la Coupe de Suisse face au Lausanne Université Club. Et c’est avec un prestige tout aussi marqué que cette finale a été lancée et, vraisemblablement, Nyon l’a prise du bon bout. Déjà agressifs d’entrée lors de leur demi-finale face à Hermance à Colovray (35-10), les hommes de Patrice Philippe ont su réitérer face aux leaders de la phase régulière. C’est ainsi qu’à 15 heures tapantes, Nyon allait déjà à la rencontre de son histoire.
Un duel Maans Dye versus Gaetan Hirsch
Un historique de pénalités ou un duel des numéro 10 : voilà à quoi pourrait se résumer cette dernière sous pression – même si deux essais transformés (un par camp) sont venus compléter le tableau des scores. Véritable compétition de précision et d’adrénaline, la rencontre n’a pu que récompenser l’extrême bravoure et brio des deux demi d’ouverture et de mêlée, Maans Dye (17 points inscrits) et Gaetan Hirsch (14). Et cela est d’autant plus vrai qu’à la 80e minute, Hirsch avait la balle d’égalisation à 22 partout lors d’une pénalité à 20 mètres. Mis sous pression en fin de match suite à une pénalité empochée par Plan-les-Ouates, qui recollait à 22-19 à la 72e minute, le XV nyonnais n’avait que la fine marge de trois points à défendre. C’est alors que sur une phase de conquête genevoise – celle de la dernière chance – les hommes de Patrice Philippe, tendus, caressant le titre qui leur fuyait depuis trois finales déjà commettent la faute. L’espoir renaît du côté des entraîneurs Éric Andreu et Frédéric Labasse ; les prolongations sont à portée de main (ou de pied plutôt). Dernière action, dernier silence. Le soupir est maître du stade, le championnat national se décidera lors de cette dernière action. Jusqu’à la dernière minute, PLO et Nyon se tenaient au coude-à-coude, méritants et vaillants tous les deux, réduits au sort du cadet des frères Hirsch pour les départager. La tâche était loin d’être aisée et parfois, l’étoffe d’un champion – celle du jeune Genevois – ne suffit pas. Face à la chance, tous sont guides mais nul n’est roi et cela, Gaetan Hirsch l’a bien compris : « C’était une très belle finale, ça jouait des deux côté. Mais voilà : c’est le sport. C’est toujours très serré. Aujourd’hui, il n’y avait pas de gros scores mais bien un seul essai à la clé et il était pour Nyon. Nous n’avons plus qu’à nous remettre au travail pour la finale de coupe le 25 juin et je sais déjà que ce ne sera que de l’émotion pour l’année prochaine pour venir à nouveau conquérir ce titre », nous explique-t-il.

Nyon, trois ans après
D’un côté, des larmes de joie, de l’autre, celles de tristesse. Nyon a connu de nombreuses désillusions lors de ses précédentes finales les trois dernières années. Fallait-il garder un mental robuste et persévérant pour se présenter (à nouveau) face à Plan-les-Ouates en finale du championnat et les battre pour la deuxième fois cette saison. Quelle belle aventure que celle qui récompense les efforts fournis tout au long d’une longue saison. Nyon a longuement attendu son heure de gloire et c’est grâce au travail mais aussi aux valeurs démontrées sur la pelouse que la récompense est arrivée : « On a vécu la défaite pendant trois années d’affilée et cette année, on a tout donné. On est allé rechercher au fond de nous-mêmes les ressources nécessaires pour y parvenir : la solidarité, l’amitié,… C’est magnifique », nous raconte l’entraîneur nyonnais Patrice Philippe. Mais ce succès final est tout aussi la résultante d’une gestion intelligente et parcimonieuse du groupe. Après deux défaites blessantes à domicile face à ce même PLO, puis face au LUC dans les dernières rencontres de la phase régulière, le collectif nyonnais subit de grands remous. Calme, discussions et honnêteté ont alors su apaiser les tensions et donner un nouvel élan solidaire au club engagé plus que vaillamment dans les play-offs. « On a pris un coup au moral pendant deux semaines. On a discuté entre nous et on s’est rappelés aussi bien des efforts fournis individuellement comme collectivement que de l’objectif que l’on visait. On a tous adhéré à notre projet et aujourd’hui, nous sommes champions », nous explique Patrice Philippe. Des sentiments qui convergent avec ceux du troisième ligne Cyril Lin : « Nous sommes un groupe fantastique avec les entraîneurs et le président. Nous avons combattu toute la saison et le coup de mou face au LUC avant la demie, nous a fait beaucoup de bien. Nous nous étions mentis et nous nous étions un peu tiré dans les bottes après la défaite lors du dernier match de la phase régulière. Nous avions alors pu nous dire les choses en face et c’est grâce à cela aussi qu’on a gagné aujourd’hui. Notre meilleur ennemi, c’est nous-mêmes, nous savons de quoi nous sommes capables et nous l’avons prouvé aujourd’hui ». Voilà donc qu’après le 21-0 des Cherpines le 30 avril dernier, Nyon a démontré la même hargne pour enfin s’adjuger la coupe Guillaume Tell au terme d’un match passionnant. « Quand je suis venu dans le club l’année dernière, on m’a dit que l’objectif était le titre. Psychologiquement, nous nous sommes renforcés et nous avions rien à perdre même si PLO a fini premier et nous seconds. La logique aurait voulu qu’ils gagnent mais au rugby, il n’y a pas de logique et sur une finale, c’est celui qui la joue au mental et au cœur qui remporte le trophée. Et maintenant, c’est la fête », conclut Cyril Lin, auteur de l’essai nyonnais (décisif ?) à la 50e minute de jeu.
Plan-les Ouates plus précis mais moins percutant
Pourtant plus précis dans les phases de conquête, plus résistants dans les rucks et plus proches de l’essai que leurs adversaires, les Genevois n’ont jamais mené au score, un signe de la grande agressivité prônée d’entrée de match par les Nyonnais : « On court derrière le score mais cela est secondaire – nous explique Gaetan Hirsch avant de poursuivre – Nous sommes toujours parvenus à garder le contact. À 19-9 (ndlr, suite à l’essai de Cyril Lin), nous n’avons pas perdu nos moyens, nous sommes restés dans notre jeu tout en suivant les consignes des coaches et nous avons réussi à recoller au score (ndlr, grâce à un essai de Nicolas Ruys à la 64e). Au final, tout s’est joué sur un détail mais c’est comme ça ». De l’autre côté, Nyon a beaucoup manqué de fantaisie dans l’usage du ballon mais cela n’a eu, semble-t-il, que très peu d’incidence sur le résultat final ; l’esprit de la gagne suffisait samedi soir aux Nyonnais pour se porter champion national : « On en voulait tellement, on avait si peur de passer à nouveau à côté du titre qu’on s’est jetés comme des morts de faim sur tous les ballons – nous explique Patrice Philippe – Et même à la fin, quand ils étaient à la limite de marquer, on s’est défendus comme des lions tout en étant solidaires. C’est ce que nous n’avions pas réussi à faire les années précédentes et aujourd’hui, nous y sommes arrivés, c’est magnifique ». Pour PLO, il restera ainsi la finale de coupe pour se racheter le 25 juin prochain à Colovray.
Le récit du match
Essais:
Nyon: Cyril Lin – transformation par Maans Dye (50e);
PLO: Nicolas Ruys – transformation par Gaetan Hirsch (64e)Pénalités:
Nyon: Maans Dye (3e, 15e, 27e, 54e et 69e)
PLO: Gaetan Hirsch (11e, 30e, 35e et 72e)Cartons jaunes:
Romain Biasin, PLO (35e)Nyon Rugby Club avec:
1. Alfredo Burgener, 2. Rémi Quermener, 3. Thomas Porter, 4. Alexandre Coullon, 5. Bryan Seale, 6. Julien Rolaz, 7. Géraud d’Espinay Saint-Luc, 8. Cyril Lin, 9. Théodore Renard, 10. Maans Dye, 11. Kamel Adjirì, 12. Iain Wise, 13. Jovan Mayor, 14. Kevin Raufaste, 15. Tismen Dye.Remplaçants: 16. Arnaud Dufourcq, 17. Julien Gaillard, 18. Tim Sauty, 19. Lawrence Wilson, 20. Geoffroy Lartigue, 21. Edouard Progin, 22. Alexander Broeksmit.
Rugby Club Genève Plan-les-Ouates avec:
1. Raffaelle Castillo, 2. Florian Diller, 3. David Smith, 4. Yanis Holweger, 5. Nicolas Ruys, 6. Romain Biasin, 7. Vincent Giffard, 8. Sébastien Fourot, 9. Léo Bel, 10. Gaetan Hirsch, 11. Geoffrey Miquel, 12. Pierre Giffard, 13. Célien Mundler, 14. Maxime Chiavaroli, 15. Cyril Dairain.Remplaçants: 16. Romain Chamand, 17. Emanuel Vazquez Losada, 18. Rachid Benammou, 19. Aurélien Debarge, 20. Romain Gérard, 21. Adrien Boissin, 22. Sylvain Loubet.