C’est la personnalité qui a forgé seule son succès sur Facebook. Son objectif : faire rire ; ses compétences : incarner André Delacrottaz, un vaudois grivois et bien d’autres personnages du terroir romand. Ce que l’on sait moins, c’est que dans son spectacle « Seul(s) dans ma tête » Yoann Provenzano a quelque chose d’autre à démontrer.
24 ans, 88 000 fans sur Facebook et une notoriété régionale. Voici Yoann Provenzano, l’humoriste du web qui conquiert avec ses personnages du terroir romand. André Delacrottaz, ce vieil homme vaudois un peu grivois, cet ami portugais que chaque Romand a dans son entourage ou MC Terkuït, un albanais qui ne jure que par sa BMW, … Ils sont depuis longtemps connus chez les 15 – 24 ans grâce aux partages de vidéos et les tags dans les commentaires Facebook. Si le talent de Yoann paraît indéniable, que souhaite-t-il en faire au-delà de ses courtes vidéos ? Comme tous les humoristes, il a conscience qu’il faut se renouveler pour ne pas disparaître dans la masse. Avant de se lancer sur le web, il a effectué son service civil dans un EMS à Prilly, où il a utilisé l’humour comme une arme de pédagogie : « Je me socialise bien avec l’humour, explique-t-il. Le but était de faire oublier aux résidents qu’ils sont dans un EMS et être un petit rayon de soleil. » En fait, l’humoriste a plusieurs facettes, dont celle peu connue d’étudiant en 2e année de lettres qui souhaite devenir professeur d’anglais s’il ne peut pas vivre de l’humour. D’ailleurs, son spectacle est une représentation de tous ses visages qu’il dévoile, non sans autodérision.
Son spectacle autoportrait : Seul(s) dans ma tête
« Il faut concevoir que Yoann Provenzano est un personnage à part », confie Sébastien Corthésy, son producteur. Ce personnage, il l’anime seul sur scène pour donner vie à tous ceux qu’il a trouvé en Romandie. De plus, Yoann a souhaité se donner un défi supplémentaire en poussant leur satire au maximum. « Je pense que si l’on va dans les extrêmes d’un art, c’est comme cela qu’on peut le transmettre. Cette folie permet d’exprimer mon art de façon la plus complète. » D’où son interprétation du marabout africain qui déclame une citation d’André Malraux : « Le fou copie l’artiste, et l’artiste veut ressembler au fou. » Le contenu sur scène, s’il est inspiré de celui de la vidéo, donne de la profondeur à ses personnages en racontant leur histoire. Sa notoriété sur Facebook l’aide à remplir sa salle, mais il souhaite s’émanciper : « J’ai envie de conquérir des gens qui ne me connaissent pas bien sur internet et qui me verraient comme un artiste de scène. » Sur les planches, l’humoriste et étudiant en lettres sont à la croisée des chemins pour le plaisir des spectateurs, dont beaucoup ont terminé l’école obligatoire contrairement au cliché qui court sur le jeune âge de son public. En rodage depuis le début de l’année, il est prêt. Comme les vidéos ne lui rapportent pas d’argent, il faut bien une prestation supplémentaire et payante pour devenir indépendant.

Aux portes d’une carrière pro
Si Yoann n’est pas encore professionnel, les professionnels s’intéressent déjà à lui. Tous les mercredis, il est à l’antenne (et en vidéo) chez Rouge FM et l’été dernier, Rivella l’a sollicité avec son homologue suisse allemand Bendrit Bajra pour une campagne publicitaire. Guest star d’un clip et d’une campagne portant sur une série de défis proposés par les internautes, ce n’est pas rien ! De plus, ce premier tournage professionnel l’a marqué : « C’était en Italie à Monfalcone […]. Il y avait des caméras professionnelles – alors que j’étais habitué à travailler avec un téléphone et Instagram pour faire du montage – ainsi que des perches, des fonds verts et des drones. Pour l’anecdote, j’avais un examen de latin le lendemain des deux jours de tournage, et la boîte de production n’avait pas réussi à me booker un avion. Je suis rentré en voiture avec un gars de la société, et il y avait huit heures de route. J’ai pu réviser mon latin et j’ai réussi mon examen ! C’était une très bonne expérience. » Quand à vendre son âme en collaborant avec une marque ? « Travailler avec une marque ne me gêne pas tant que je ne suis pas un panneau publicitaire, répond-il. C’était un contrat de pub, certes, mais ce n’était pas un placement de produit dans mes vidéos où je disais « Rivella » trois fois en quinze secondes. » « On ne travaille qu’avec les marques intéressées pour créer quelque chose avec Yoann », ajoute Sébastien Corthésy.
De plus, Yoann Provenzano a participé au Montreux Comedy Festival, collaboré avec le collectif Carac Attack et récemment avec Pierre Naftule, producteur bien réputé dans le milieu, pour le tournage du clip « Trop la loose, bref j’ai des dettes » des Rotarys Clubs de Genève. Le professionnalisme n’est plus qu’à un pas et lui tend les bras.