Après une série de premières parties d’artistes de renom, d’apparitions sur les diverses scènes de la région romande (Rock Oz’Arènes, Banane Comedy Club, Swiss Comedy Club entre autres) mais aussi à la radio, Tamara Cesar vient d’aboutir l’écriture de son premier one (wo)man show au Lido Comedy & Club de Lausanne. Après Edem Labah, Bastien Cretton, Thomas Wiesel ou encore Vishal Joneja, leMultimedia.info s’en est allé rencontrer l’une des prodiges de l’humour romand. Interview.
Première apparition d’une heure sur scène, comment te sens-tu ?
Soulagée parce que pendant un mois, je me faisais le compte à rebours dans la tête et on est un peu mal. J’avais déjà fait des passages allant de 10 minutes à maximum une demi-heure et c’était compliqué pour moi de devoir d’un coup me mettre à parler pendant une heure. J’appréhendais beaucoup ce spectacle parce qu’il fallait du contenu, que ça ressemble à un spectacle, que ce soit un show et que ça bouge ! Donc je suis relativement soulagée que ce soit surtout bien passé.
C’est un jour historique pour toi, sans entrer dans l’exagération des termes ?
Alors, je vais m’en rappeler toute ma vie. Historique, je trouve que ça résume bien l’instant.
Tu as une manière très personnelle de te présenter sur scène avec beaucoup d’autodérision. Ce n’est pas trop tomber dans la (bonne) facilité que de se jeter des pics à longueur de spectacle ?
Beaucoup de gens me le disent, en effet. On me dit que je suis dure avec moi-même mais au final, c’est la « faute » au public qui rigole (rires). Après, c’est clair que quand on trouve le bon filon, on est toujours prêt à en rajouter, ça fait partie de mon personnage. Depuis le début, je me moque de mon poids et dès que je rajoute un petit gag, ça fait rire les gens. C’est clair qu’on entre dans la facilité mais j’essaie de ne pas trop y tomber parce que sinon on ne fait plus rire personne.
Depuis le début que tu montes sur les planches, tu as toujours gardé ce même style de présentation avec beaucoup de storytelling ?
Oui, bien sûr ! Je suis une très grande fan de l’autodérision. Je parle de moi parce que c’est ma vie et je rajoute que beaucoup de choses sont véridiques. Du coup, je parle sur scène comme dans la vraie vie. C’est aussi ça le stand-up. Chaque anecdote des humoristes que l’on va voir semblent être spontanées alors que tout est quand même écrit. Sauf que moi, j’entre moins dans l’actualité mais je parle plus de moi et ça roule pour l’instant.
Depuis le temps que je te vois faire des premières parties, j’ai l’impression qu’à chaque fois tu arrives avec une histoire nouvelle à raconter. Comment tu les intègres dans ton sketch ? Ce sont des faits qui se sont produits la veille ou c’est ajouté au cas par cas ?
Alors, les faits ne m’arrivent pas la veille mais elles m’arrivent quand même. Ces histoires sont vraiment issues de faits réels. Mais cela ne veut pas dire, justement, qu’il n’y a pas de travail derrière. L’humoriste doit faire en sorte que tout soit bien construit de manière à ce que le public pense que ce soit spontané. Il ne faut surtout pas rentrer dans une mécanique et, au début, j’avais énormément de peine à le faire. J’avais déjà travaillé à la radio, ce qui faisait que mes blagues étaient toutes calculées – mes phrases était trop récitées – et on m’avait rendu compte de ce problème. Donc l’humoriste doit se garder d’être trop proche de son texte et faire en sorte de vraiment raconter une histoire comme si elle venait de se produire. Donc ça me fait plaisir que tu remarques cela car cela veut dire que mon travail a été bien fait.
Aujourd’hui, tu as présenté pour la première fois du nouveau contenu. Quel ressenti as-tu, quelles différences as-tu noté entre le nouveau et « l’ancien » contenu ?
Quand il y a du nouveau contenu, c’est vraiment un gros challenge pour les humoristes. On est dans l’attente, on ne sait pas quels effets portera le nouveau texte sur le public. C’est vraiment très perturbant et ce n’est pas un exercice facile pour moi. J’aime bien faire une apparition de cinq minutes avec un texte que je maîtrise et que je connais, quitte à ajouter du nouveau au fur et à mesure. Au final, il y a des valeurs sûres. Quand on fait des premières parties, on se doit d’assurer un show donc on ne vient pas avec du test. Sauf que là, j’ai du écrire une heure de spectacle et donc j’ai dû créer et c’est tout le défi que représentait cette soirée au Lido. Mais à la fin, on est soulagé et en regardant en arrière le travail accompli, on est bien content de pouvoir le rejouer dans des occasions futures. Mais il ne faut pas oublier cette notion de défi (challenge). Parler une heure avec mes copines est une chose, parler devant un public qui t’écoutes en est une autre. Tester devant une cinquantaine de personnes, ça fait vraiment peur.
Beaucoup de ratures à déplorer ce soir ?
Disons que c’est ma première en one (wo)man show, il y a encore des phrases à peaufiner. Je n’y ai même pas donné de titre donc cela va me prendre encore beaucoup de travail. Après, je ne pense pas qu’il y ait de grosses ratures parce que je me sentais vraiment à l’aise, le public me suivais bien et je suis globalement très contente même s’il y a quand même quelques petites faiblesses à améliorer. Mais cette première date « entre amis » sert également à cette fin; se sentir un peu plus à l’aise et s’apercevoir des points faibles dans notre spectacle. Je pense que l’on nous appellerait même plus des artistes s’il n’y avait rien à retravailler.
Il manque peut-être encore un peu d’improvisation dans tes sorties ?
C’est vrai, même si j’étais relativement étonnée ce soir de voir qu’il y avait une part de jeu avec le public. Je pensais que j’allais vraiment être dans mon texte et que je n’allais y sortir que très rarement de peur de m’y perdre. Mais le meilleur réside bien sûr dans l’improvisation; le meilleur rire est le rire spontané. C’est le rire recherché par l’artiste; quand le public se sent concerné. Gad Elmaleh, dans le genre, est un exemple à suivre pour tout le monde. Cela n’empêche que c’est un pari très risqué parce que l’on sort des sentiers battus et que l’on risque des pertes de contact avec le public. Si cela se produit, il faut être fort ensuite pour se remettre dans le bain et continuer. Toutefois, si l’opportunité d’échanger avec les personnes présentes arrive, on ne peut que profiter de l’occasion qui nous est offerte. Quand le public nous tend la perche, on essaiera toujours de la prendre. On espère tous un jour avoir assez d’aisance pour le faire. Les autres artistes dont je faisais les premières parties m’annonçaient parfois que cette aisance leur venait qu’après dix ans de scène. Alors on attend et on s’entraîne en attendant.
Tu as ton style sur scène en tout cas; tu chauffes ta propre salle, tu es une adepte de l’insulte aux grandes blondes bien foutues. Tu dis beaucoup de « connasses » en réalité ou c’est un style que tu adoptes sur scène ?
Non (rires). Je suis quelqu’un de spontanée. Je n’ai pas ma langue dans la poche et si quelqu’un me cherche, il se récolte l’insulte (rires), mais toujours de manière sympathique. Mais c’est l’important dans ce genre de situation, de ne pas aller trop dans l’excès pour ne pas trop offusquer. Personne n’est jamais venu me voir pour dénoncer mon arrogance sur scène et c’est le plus important. Mon penchant pour l’autodérision est tellement prégnant, qu’il camoufle complètement ces petits pics lancés à l’encontre de certaines personnes. Donc les insultes sont, dans l’ensemble, bien digérées parce qu’au préalable, j’ai fait mon nécessaire pour les désamorcer.
Tu resteras toujours sincère sur scène ?
Oui, je pense. J’ai déjà de la peine à m’approprier des mots des autres alors dire des choses que je ne pense pas, je pense pas.